Nos opéras préférés, toutes époques confondues

Bel Canto a écrit:

Ceci dit, encore une fois, en art, tout est question de goût et surtout d'émotion comme le disait Bernstein "La musique sans émotion n'a pas de raison d'exister".

Bernstein défonce une porte ouverte tant l'émotion est la quête fondamentale de tout mélomane honnête et sincère dans ses démarches. Personnellement, je n'ai comme seul guide l'émotion et je ne peux concevoir un sens et une valeur à une oeuvre si celle-ci ne me procure aucune émotion, ce qui ne veut pas dire, bien sûr, qu'elle ne puisse pas avoir un sens et une valeur pour quelqu'un d'autre qui y trouverait ses émotions...Et justement, si je dois citer un opéra comme mon préféré, il faut qu'il soit celui qui me procure le plus d'émotions pendant l'écoute...et qu'est-ce qui génère des émotions dans un opéra: La beauté des airs, la beauté des voix solistes, des choeurs, les orchestrations, les qualités expressives de l'orchestre, les caractères joyeux ou graves des scènes vocales et instrumentales...tout ce que l'oreille va capter dans un opéra...je mets de côté tout ce qui compose l'aspect visuel...J'ai vu deux opéras à Châtelet; La mouche du duo Shore/Cronenberg et Nixon in China de John Adams, mais aucun des deux n'atteindra mon podium personnel. Marco Polo de Tan Dun en est déjà beaucoup plus proche, mais je n'irai pas jusqu'à le mettre tout en haut. Je ne suis pas sûr que ce soit l'opéra qui me procure le plus d'émotions.

Aujourd'hui, j'ai réécouté un opéra que j'aime également beaucoup:

Una Voce in Off est le second opéra de Xavier Montsalvatge, un opéra romantique en un acte et trois scènes pour deux personnages et voix-off. Les personnages sont ANGELA, la veuve de Claudio, interprétée par la soprano Rosa Mateu, MARIO, l'amant d'Angela, interprété par le baryton Angel Odena et VOIX DE CLAUDIO, mari décédé d'Angela interprété par le ténor Antonio Comas dans un contexte sonore particulier, toujours accompagné par un vibraphone, une harpe et un piano, comme un chant lointain, appartenant au passé et semblant provenir d'un enregistrement. L'opéra démarre sur une ouverture pour choeur et orchestre autoritaire puis majestueuse. Dès le premier morceau de la scène I, la voix-off de ténor apparaît et réapparaîtra ponctuellement dans les autres mouvements de l'oeuvre. Il y a du romantisme, de la nostalgie bien sûr, en partie évoquée par la voix du mari disparu, entonnant un chant d'une profonde mélancolie, une sorte de refrain pour tout l'opéra qui atteint des moments de très belle émotion. Je pense notamment au "Mi fai orrore" de la scène III interprété en solo et avec grande sensibilité par Rosa Mateu (Angela). Il ne m'en aurait pas fallu beaucoup plus pour sentir poindre une perle de larme sous mon oeil gauche...J'ignore pourquoi mais c'est toujours celui-là qui craque en premier, le droit étant un petit peu plus difficile à faire fondre.    Le morceau final où l'on retrouve la voix-off, la soprano et les choeurs, est également d'une grande beauté.

Quelques explications autour de l'opéra Le Retour d'Hélène de Thanos Mikroutsikos:

L'opéra de Thanos Mikroutsikos, Le Retour d'Hélène, pourrait avoir comme sous-titre "Une héroïne en quête d'elle-même", puisque l'oeuvre a pour thème le morcellement de la personnalité d'Hélène et ses efforts pour retrouver - ou plutôt se construire - une "identité" entière, sans pour autant ignorer ni effacer les différents volets de sa vie. L'histoire de l'héroïne, ce qu'elle a vécu en amont de l'action scénique, nous est connue par la mythologie: fille de Zeus et de Léda, Hélène, dont la beauté éblouissante est réputée jusqu'aux confins du monde connu d'alors, a épousé, par la volonté des dieux, Ménélas, roi de Sparte. Sur l'autre rive de l'Egée, dans une vallée de l'Ida, le jeune Pâris, prince de Troie, rencontre trois déesses de l'Olympe, qui lui demandent de décider laquelle d'entre elles est la plus belle. Aphrodite sort victorieuse de ce concours de beauté et promet à Pâris de lui donner en récompense la plus belle femme du monde - autrement dit Hélène, reine de Sparte. Fort de la faveur divine, Pâris atteint les rives de l'eurotas, conquiert Hélène et l'emmène à Troie. C'est alors qu'éclate la fameuse guerre de Troie, conflit de dix années responsable de la mort de nombreux héros dans les deux camps et de la destruction de Troie. Hélène, qui est à l'origine de la guerre, en refuse pourtant la responsabilité, estimant avoir été le jouet de volontés divines contraires. Parce qu'elle est fille du père des dieux et parce que sa séduction est une arme puissante, personne n'ose s'en prendre à elle, en dépit de toute la haine qu'elle a suscitée.

L'argument d'Hélène a visiblement inspiré plusieurs compositeurs:

__Christoph Willibald Gluck - Paris and Helen 1770
__Jacques Offenbach - Hélène de Troie 1864
__Camille Saint-Saëns - Hélène 1904
__Richard Strauss - The Egyptian Helen 1927

Le Retour d'Hélène de Thanos Mikroutsikos est un opéra en un acte, trois périodes et six scènes, chanté en grec sur des poésies de Yannis Ritsos et sur un livret de Christos D. Lambrakis. 1993.
Cet opéra m'est de plus en plus émouvant à chaque nouvelle écoute et parmi ceux que je viens de réécouter à l'occasion de mon nouveau cycle, il est celui qui, pour le moment, m'a procuré le plus de plaisir. Un des principaux facteurs d'émotions est bien sûr l'emploi de voix grecques. J'ai toujours été très réceptif à la voix et au chant grecs, que ce soit dans la musique légère, dans l'oratorio ou dans l'opéra, qu'il s'agisse d'ailleurs de voix féminines ou masculines: la voix grecque m'envoûte, m'hypnotise. Ce n'est pas un hasard si la musique grecque, surtout vocale, est fort bien représentée sur mes étagères par des compositeurs et des chanteurs des plus connus aux moins connus. Le Retour d'Hélène de Mikroutsikos fait déjà partie des opéras que j'adore écouter avec ceux de Mikis Theodorakis. Rien d'étonnant donc si je cite souvent, presque automatiquement, la voix d'Agnes Baltsa quand on me demande les chanteuses lyriques qui ont ma préférence, même si j'ai conscience qu'il y a d'autre grandes mezzo-sopranos et qu'elles ne sont pas toutes grecques. Il s'agit surtout d'une proximité émotionnelle et quelque-part mystérieuse entre la voix grecque et moi. C'est très personnel tout ça...
Distribution: Pamela Pantos/Tassis Kristoiannis/Mata Katsuli/Christophoros Stamboglis/Eleni Liona/Julia Souglakou/Antonis Koronaios/Yannis Christopoulos/Dimitri Kavrakos.

Icare a écrit:

Jacques Offenbach - Hélène de Troie 1864

Ce ne serait pas la Belle Hélène ?

En tout cas Offenbach reprend exactement la légende grecque telle que tu l'as résumée...

Oui, il s'agit bien de La Belle Hélène, concernant Offenbach.

Et pour te récompenser...

Un Tramway nommé Désir de André Previn: (extrait)



Probablement mon opéra préféré toutes périodes confondues, en fonction de ce que je connais. Renée Fleming fait également partie avec Agnès Baltsa des chanteuses lyriques dont la voix me touche le plus.

Icare a écrit:

Un Tramway nommé Désir d'André Previn: (extrait)

Je connais le film tiré de la pièce mais je ne savais pas qu'il y avait un opéra sur le même sujet.
C'est assez récent d'après ce que j'ai lu : San Francisco 1998.
Renée Fleming a une voix superbe, envoutante, suave et avec de merveilleuses couleurs !  J'aime beaucoup aussi.

 Voici un opéra qui m'a procuré beaucoup de plaisir : L'Auberge du Cheval Blanc, dans la version donnée par l'Opéra de Lausanne. C'est une opérette en trois actes de Ralph Benatzky, créée à Vienne en 1930. La distribution de la production de l'Opéra de Lausanne en 2021 était composée de chanteurs et musiciens de renommée internationale.  Jean-Yves Ossonce, chef d'orchestre, a su faire ressortir la vivacité et la légèreté de la musique de Benatzky .  Fabienne Conrad, dans le rôle de Josépha, a su capturer la joie de vivre et l'énergie de cette chanteuse d'opéra ambitieuse. Mathias Vidal , dans le rôle de Léopold, a apporté une touche d'humour et de sensibilité.  Julien Dran, dans le rôle de Maître Guy Florès, a offert une performance solide et pleine de caractère.
J'apprécie certains musicaux qui ont été créés par d'autres compositeurs. Voici quelques exemples : Dans l'acte I, la chanson ". On a le béguin" est une adaptation de la chanson populaire française ". A la claire fontaine". Dans l'acte II, la chanson ". Au Joyeux Tyrol" est une adaptation de la chanson folklorique tyrolienne " Ich bin ein armer Musikant". Dans l'acte III, la chanson ", Pour être un jour aimé de toi" est une adaptation de la chanson classique " La vie est belle" de Franz Schubert. Ainsi qu'un extrait de la symphonie de. Richard Strauss,  (ainsi parlait Zarathoustra), de quoi charmer les plus difficiles.


https://youtu.be/zxcZ0c4a88A?si=E4LxKOJ8HLuIC4Pr

Un petit retour sur l'opéra Un Tramway nommé Désir/A Streetcar named Desire d'André Previn:

LOTFI MANSOURI,directeur général de l'opéra de San Francisco rêvait depuis qu'il était étudiant de faire un opéra d'UN TRAMWAY NOMME DESIR de TENNESSEE WILLIAMS dont la pièce et le film l'avaient complètement subjugué. Au fil du temps,le projet mûrit et c'est en voyant le film de Richard Brooks, ELMER GANTRY,et surtout en découvrant la musique de PREVIN qu'il sut qu'il serait,sauf refus de sa part,le compositeur de ce projet ambitieux. De son côté,ANDRE PREVIN reçut une autre proposition d'opéra où tous les protagonistes étaient vêtus de toges et chaussés de sandales et qui,n'arrivant pas à s'identifier à des personnages attifés de cette façon,déclina l'offre quitte à se voir passer pour un philistin. Mais, lorsque MANSOURI lui proposa de mettre en opéra la mythique pièce de TENNESSEE WILLIAMS,il accepta aussitôt de relever le défi.



Ce que j'apprécie dans l'opéra du vingtième siècle c'est lorsqu'il traite un sujet qui lui est contemporain où du moins qui appartient au même siècle, plutôt que d'aller rechercher les sempiternelles tragédies anciennes qui ont déjà été, pour beaucoup d'entre elles, transposées en opéras par les illustres compositeurs des siècles passés. Bon, j'adore malgré tout les opéras de Mikis Theodorakis qui traitent justement des tragédies anciennes, Médée, Electra, Antigone, etc..., je les évoquerai d'ailleurs immanquablement sur ce topic - néanmoins, ce n'est peut-être pas un hasard si les opéras qui me touchent le plus transposent des sujets plus "vingtième siècle", ce qui se ressent aussi dans la musique et les orchestrations, favorisant des formes moins classiques. Les années américaines 1940/1950 transpirent de la musique d'André Previn pour Un Tramway nommé Désir. C'est toute une atmosphère sonore qui respire la vie urbaine dans les Etats-Unis d'une certaine époque, sur laquelle plane l'âme du jazz et l'esprit du Septième Art. Je me sens bien moins impliqué - émotionnellement parlant - par les opéras des siècles passés, qu'ils aient été écrits par Mozart, Verdi, Rameau, Rossini et même Offenbach, que je suis en mesure d'apprécier mais ne me touchent pas aussi viscéralement que Un Tramway nommé Désir, par exemple, ni même que La Noche Triste, bien que cet opéra de Prodromidès traite d'un sujet bien antérieur au vingtième siècle, mais comme il le traite par le prisme de la folie, l'auteur n'hésite pas à employer un langage propre à son époque. L'opéra de Previn n'a cependant pas que cet attrait. Outre une magnifique prestation à Renée Fleming à laquelle il offre de magnifiques soliloques, il ne manque pas de lyrisme ni d'intensité dramatique, sans compter une obsédante et superbe conclusion qui me fait fondre à chaque nouvelle écoute.

El Gato con Botas/Le Chat Botté de Xavier Montsalvatge:

Xavier Montsalvatge a composé trois opéras et, ce soir, j'ai réécouté Il Gato con Botas. Mercredi dernier, j'avais réécouté Una Voce in Off. l'un comme l'autre font partie de ces nombreux opéras que je ne connais que par l'oreille et dont je ne peux suivre le récit puisque chanté dans une langue étrangère, en l'occurrence l'Espagnol. J'ai été une nouvelle fois séduit par la vitalité de Il Gato con Botas, la qualité de ses chants, les belles envolées orchestrales, parfois proches de la fanfare. Je ne m'y suis pas ennuyé une minute. L'opéra avoisine les 65 minutes et ce fut pour moi un enchantement du début à la fin...Du lyrisme, de la vigueur, de l'intensité, du romantisme, de l'émotion, de la beauté. Xavier Montsalvatge y déploie un sens de la fantaisie et des couleurs qui, dans l'esprit, m'évoque un compositeur français, de façon assez significative, sauf que je ne suis pas sûr de qui il s'agit...peut-être Maurice Ravel, genre L'enfant et les Sortilèges ou Ma Mère l'Oye...?...C'est voluptueux, parfois il y a de belles emballées, un superbe solo de hautbois et les voix, surtout les voix. A vrai dire, il y a sûrement d'autres influences, voire d'autres références...



Xavier Montsalvatge, qui est l’un des compositeurs espagnols les plus féconds et importants du XXe siècle, s’inspire dans cet opéra du conte de l’écrivain français Charles Perrault, « Le Chat botté ».Il s’agit de l’une des principales compositions appartenant à la période de jeunesse du Catalan Xavier Montsalvatge. Conçue comme un « opéra de magie et de mystère », et reposant sur une partition en cinq tableaux et à cinq voix (mezzo-soprano, soprano, ténor, baryton et basse), l’œuvre a été jouée pour la première fois le 10 janvier 1948 au Gran Teatre del Liceu de Barcelone. Bien qu’il s’agisse d’un conte pour enfants et que les représentations scéniques, colorées et teintées d’un grand sens de l’humour, soient parfaitement adaptées à un jeune public, Montsalvatge investit dans cette composition l’ensemble de son savoir musical. La partition, loin d’abandonner l’orthodoxie de la tradition du genre de l’opéra, est un véritable enchantement de raffinement, d’harmonie et de beauté, agrémenté de fortes doses d’ironie.

Réécoute de trois opéras que j'aime beaucoup:

1) Maximilien Kolbe de Dominique Probst

le livret de cet opéra a été écrit par l’académicien Francais Eugène Ionesco, auteur entre autres de «La cantatrice chauve» et «Le roi se meurt». La musique est de Dominique Probst et la mise en scène de Krzisztof Zanussi. Le Père Maximilien Kolbe, canonisé par Jean-Paul II en 1982, est mort le 14 août 1941 à l’âge de 47 ans, au camp de concentration d’Auschwitz, ou il a offert sa vie pour sauver celle d’un père de famille. Eugène Ionesco reconnaît qu’il a trop longtemps ignoré l’histoire du Père Maximilien Kolbe. «A vrai dire, je ne l’ai connue qu’en 1980, quand le Père Carré, mon collègue à l’Academie Francaise, m’en a parlé. J’ai été fasciné par l’amour, par le sacrifice et par l’immense charité du Père Kolbe, qui a mérité, à juste titre, d’être honoré par l’Eglise, qui l’a canonisé». «C’est le musicien Dominique Probst, lui aussi sous l’influence du Père Carré, qui a voulu faire un opéra, explique encore Eugène Ionesco.



J'aime personnellement beaucoup cet opéra. Il me bouleverse à chaque fois que je l'écoute. Je l'ai seulement en cd. Outre les parties chantées, j'adore l'apport orchestral dramatique de Dominique Probst. La musique est viscérale, presque métallique par moment. L'orchestre y déploie un son très particulier, souvent glacé dans les moments forts et poignants du récit, parfaitement en phase avec le drame qui se noue. J'adore les parties instrumentales, bien que les voix sont parfaites, j'en adore surtout les orchestrations, les sonorités corrosives, acides, les percussions, l'emploi soigné de l'électronique...

Deuxième opéra: Segismundo de Tomas Marco:



Un opéra chanté en français qui me fascine autant par sa musique, ses chants et son histoire est, par exemple, celui que je viens d'évoquer ci-dessus; Maximilien Kolbe de Dominique Probst. L'opéra Segismundo de Thomas Marco est entièrement chanté en langue espagnole et comporte même des parties narratives, ce qui me le rend un peu moins fascinant dans sa globalité que celui de Probst. Ces parties narratives que je ne comprends bien sûr pas ne me sont cependant pas pénibles dans la mesure où la musique ne s'éclipse pas pendant l'intervention du récitant et que celle-ci a une réelle présence, notamment par des combinaisons sonores inhabituelles. Effectivement, l'habillage sonore de cet opéra n'est pas conventionnel, en grande partie géré par des injections assez marquées d'éléments électroniques. C'est surtout cet aspect purement instrumental qui me rend cet opéra attrayant. Dès le départ, j'en aime beaucoup les sonorités, les climats et les couleurs qu'elles instaurent, sans omettre la construction rythmique, le tout conférant à cette introduction atypique un caractère fortement ludique qui n'est pas pour me déplaire. Ces combinaisons sonores et rythmiques reviendront pour mon bonheur vers la fin. J'avais écrit antérieurement: De cette nouvelle écoute, il en ressort encore une appréciation purement abstraite et donc exclusivement musicale, contrairement, par exemple, à l'opéra La Mouche d'Howard Shore que j'avais découvert au Châtelet et en garde un souvenir à la fois visuel et sonore, et avec une bonne connaissance de l'histoire qui avait déjà été le sujet d'un film de David Cronenberg, opéra que j'avais d'ailleurs moyennement aimé alors que celui de Tomas Marco m'enchante malgré l'appréciation abstraite que j'en ai... C'est toujours vrai.

Troisième opéra:

Eurydice et les marionnettes de Charon, opéra en un acte pour mezzo-soprano, baryton, marionnettes et orchestre de chambre:

<<L'opéra Eurydice, fondé sur le mythe d'Orphée et Eurydice, transpose la légende au monde actuel: Sophie, jeune et célèbre chanteuse d'opéra, voit sa vie bouleversée lorsqu'elle apprend qu'elle souffre d'une maladie incurable. Oscar, son compagnon, musicologue et directeur d'orchestre, n'accepte pas la fatalité qui les accable. L'oeuvre entremêle deux genres très différents, l'opéra et les marionnettes, afin que musique savante et musique populaire dialoguent dans un opéra également adapté au public infantile.>>

__Claudia Schneider: mezzo-soprano (Sophie)
__Marc Canturri: baryton (Oscar)
__Toni Rumbau: voix des marionnettes

___BARCELONA 216___
-Jordi Maso: piano
-Ma José Aznar Botella: violon
-Mark Friedhoff: violoncelle
-Guillermo Prats: contrebasse
-Carlos Morera: bandonéon
Direction: Joan Albert Amargos



A l'époque, j'avais d'emblée été attiré par le concept de cet oeuvre mariant le théâtre des marionnettes et l'opéra dans sa plus pure tradition, une combinaison équilibrée de la musique savante et du modèle d'expression populaire au service d'une tragédie semi-moderne et prisée aussi bien par un public adulte que par un public bien plus jeune. Je n'étais certes, à l'époque, pas sûr du résultat, mais plutôt confiant car Amargos m'intéressait déjà dans d'autres genres musicaux, je pense notamment à un très attachant concerto pour flûte à bec. Voilà une acquisition que je ne regrette absolument pas et cette oeuvre fait déjà partie de mes opéras préférés et c'est d'ailleurs pour cette raison que je l'ai inclus dans ce cycle. Il se distingue, lui aussi, par un caractère ludique qui me fut immédiatement séduisant, mais d'une manière très différente du Segusmundo de Tomas Marco. La musique est plutôt tonale et avenante, ne sombre jamais dans le pathos alors que l'histoire pouvait éventuellement s'y prêter. J'ai bien ressenti une pointe de mélancolie dans le jeu du piano, un vague élan romantique dans les cordes, le chant chaud d'un bandonéon, quelques élans jazzy bien disséminés, sans outrance toutefois. Puis il y a ce petit accessoire, la Lengüeta, qui se positionne dans la bouche du marionnettiste, lui permet de déformer sa voix afin de créer la propre voix de la marionnette, très aigüe, métallique, quelque peu insolite. Le contraste avec les voix "normales" a son charme.

Trois autres opéras que j'aime beaucoup:

Le premier est un opéra italien que je connais depuis fort longtemps, avant La Noche triste de Prodromidès que je considère comme étant l'opéra-déclic, c'est-à-dire l'opéra qui m'a fait aimer l'opéra. Je ne sais pas pourquoi ce ne fut pas Il Cordovano de Goffredo Petrassi qui m'a toujours séduit: Ma réécoute de son opéra IL CORDOVANNO ne fait que confirmer l'amour que je porte à sa musique depuis le jour où je l'ai découverte. Il est plein d'énergie, de verve, de couleur et d'insolence, d'une belle italianité! Un opéra moderne que j'adore écouter et que j'aimerais bien découvrir en concert, car l'opéra, dans la logique des choses, c'est autant pour l'oreille que pour l'oeil. Il y a ce chant final, harmonieux et optimiste qui pourrait être un clin d'oeil volontaire à Giuseppe Verdi.



1) Distribution de l'opéra Il cordovano de Goffredo Petrassi:

Opéra en un acte et d'une durée de 49 mn 47

Révision définitive en 1958.

Sur un texte de Miguel de Cervantes Saavedra, traduit de l'Espagnol par Eugenio Montalo (italien)

Orchestra Sinfonica e coro di Roma della Rai sous la direction de Marcello Panni.
Maître des choeurs: Ine Meisters.

__Siavka Taskova Paoletti: Soprano
__Susanna Rigacci: Soprano
__Nucci Condo: Mezzo-soprano
__Giancarlo Luccardi: Basse
__Paolo Barbacini: Ténor
__Paolo Orecchia: Baryton

Le second opéra que j'ai réécouté avec plaisir est allemand. Dans un premier temps, en écoutant Paysages avec parents éloignés de Heiner Goebbels, je n'avais pas l'impression d'écouter un opéra mais une oeuvre lyrique inclassable et assez étrange dans l'ensemble. Il y a des passages en français, en allemand et en anglais, ce qui m'a permis d'entrevoir l'argument. D'un point de vue purement musical, comme souvent chez ce compositeur au style résolument moderne tout en conservant un "langage" intelligible, j'ai été happé par les atmosphères, les combinaisons instrumentales et les tournures vocales: l'usage des percussions, des sons électroniques, une flûte chinoise en bambou, des clarinettes employées dans une tonalité orientale, la brève intervention d'un clavecin, les voix; baryton, soprano, alto...puis le ngra, le daf, des ambiances sonores qui mutent d'un passage à un autre, des cadences qui me font chavirer. La musique de Heiner Goebbels ne ressemble à aucune autre même si elle puise son inspiration chez des maîtres tels que Kurt Weill et Hanns Eisler. De part sa modernité et le caractère corrosif et acide de ses combinaisons instrumentales, Paysages avec parents éloignés est un opéra que je rapproche volontiers de Segismundo de Tomas Marco et Maximilien Kolbe de Dominique Probst qui, de ce point de vue, m'est le plus jouissif.



Distribution de Paysages avec parents éloignés/Landschaft mit entfernten Verwandten de Heiner Goebbels (2007):

David Bennent: voix
Georg Nigl: baryton
Ensemble Modern
Deutscher Kammerchor
Direction: Franck Ollu[/b][/b]

Pas de narration dans cet opéra, mais des tableaux - le titre choisi est une référence à Nicolas Poussin - en transformations incessantes, des Ménines de Velasquez à la Cene de Léonard de Vinci, animés par les musiciens de l’Ensemble Modern de Francfort. Comme dans les précédents spectacles de Heiner Goebbels (Eislermaterial, Ou bien le débarquement désastreux...), cet opéra oscille entre théâtre et musique et tire sa force de la rencontre de textes, musiques, mouvements et images que le spectateur peut associer librement.

Le troisième opéra que j'ai réécouté avec toujours autant de plaisir est portugais:

Os Dias Levantados/Les Jours ressuscités par le compositeur Antonio Pinho Vargas:

Prologue:

« après plusieurs années de doutes et de perplexités, je crois avoir réalisé que l'essence de ma musique réside dans son impureté (…) La pureté stylistique m'est complètement étrangère » « Le 25 avril a été illégal, indiscipliné, incohérent, injuste
. insuffisant, parfois ridicule, mais merveilleux et inoubliable.

Ces extraits du texte que j'ai écrit pour le programme du Théâtre São Carlos lors de la première de l'opéra Os Dias Levantados en 1998 énonce une déclaration personnelle de mémoire, d'affection et de principes importants : la défense de l'impureté et de la liberté dans le processus créatif. Cette déclaration de principes tente de définir ma position par rapport aux champs de possibles toujours présents au début de la composition – une théorie-avant – et une attitude ontologique face à l’acte de créer : ce qui n’est pas encore, mais qui deviendra quelque chose, l'hypothèse du travail artistique comme un processus, soumis à des forces, des irruptions, des accidents.

Ce texte pourrait être un guide de l'opéra. Il ne s'agit pas d'expliquer le livret ou la musique, mais simplement de montrer comment j'ai composé la musique à partir du texte, avec le texte, malgré le texte ou contre lui, avec un effort pour comprendre le drame de ses implications et de sa présence. de nos souvenirs des événements que nous avons vécus. J'ai presque entièrement respecté la structure formelle du livret de Manuel Gusmão (les numéros d'index du CD correspondent à la structure formelle de la pièce), mais le texte, s'il organise pour moi la forme, ne compose pas à lui seul la musique. Elle le détermine de diverses manières, le contextualise, lui donne tout son sens. Mais il était souhaitable que la musique prolonge aussi son sens, restitue les significations poétiques ou émotionnelles qui y étaient contenues, de mon point de vue musical. Dans ce cas, j'ai utilisé des matériaux arbitraires issus de lettres et de chiffres, comme j'essaierai de l'expliquer plus tard, mais je tiens à préciser que je considère les paroles du livret comme partie intégrante de la musique de l'opéra. Quand « il n’y a pas de musique », quand les chanteurs « seulement » parlent, c’est la musique que j’ai composée. Les mots sont là, écrits par moi sous forme de musique.



Distribution:

Ana Ester Neves
Ana Paula Russo
Carlos Guilherme
Elvira Ferreira
Jorge vaz de Carvalho
Luis Rodrigues
Nicolau Domingues
Paulo Ferreira

Orquestra Sinfonica Portuguesa do TNSC
Coro do Teatro Nacional de Sao Carlos
Direction: Joao Paulo Santos

En réécoutant l'opéra Os dias levantados, je retrouvai de percutantes approches instrumentales ainsi que des sonorités métalliques qui lui confèrent une dimension bien sûr dramatique mais aussi futuriste. Les cordes y sont souvent tranchantes et obsessionnelles, sur un ton grave et déterminé qui me touche d'emblée. Je suis toujours autant ému par le chant final qui est vraiment très beau, poignant, intense.

Mare Nostro de Lorenzo Ferrero

Icare a écrit:

__Mare Nostro (1991)- opéra-bouffe en deux actes sur un texte de Marco Ravasini - Orchestra e Coro del Conservatorio di Musica "F. Venezze" di Rovigo/Gianfranco
  
Un opéra qui me donne envie de chanter, de bouger, dont les thèmes mélodiques et la qualité des chants me rendent heureux! Encore une musique de Ferrero qui possède un charme fou! C'est un opéra hors du temps et comme je viens de le dire, beaucoup de ses thèmes mélodiques me donnent envie de chanter avec la soprano ou le ténor, quelque chose de très communicatif, de très musical mais surtout de très vivant, une qualité verdienne peut-être...ou simplement italienne...

J'adore cet opéra-bouffe de Lorenzo Ferrero que je viens de réécouter une nouvelle fois à l'occasion de mon cycle autour de mes opéras préférés. C'est d'ailleurs Mare Nostro qui m'a donné l'idée de ce cycle. Je l'adore pour sa grande inspiration thématique, son caractère baroquisant et faisant de francs clins d'oeil stylistiques à la pop. Il en ressort une personnalité musicale attrayante que je reconnaîtrais entre mille: un style néoclassique perverti par des éléments rythmiques puisés dans la variété. Ainsi, rigueur savante et  (fausse) nonchalance d'une certaine musique populaire immédiatement séduisante, de par la confusion qu'elles imposent méticuleusement à l'auditeur même averti, brouillent les pistes, amalgament les genres au service d'un monde sonore atypique, ici plus souvent vocal qu'instrumental. Pas pour les puristes ni les esprits bouléziens qui détesteront probablement. A contrario, mais sans une volonté d'arborer une position opposée, c'est sans aucun doute l'opéra que j'écoute le plus souvent, toutes périodes confondues. Ce n'est pas l'opéra qui m'impressionne le plus, esthétiquement parlant, mais c'est l'opéra que j'aime le plus écouter. Je ne l'aime pas forcément plus que, par exemple, Maximilien Kolbe de Dominique Probst ou Les Jours ressuscités d'Antonio Pinho Vargas qui, émotionnellement parlant, me sont plus viscéraux, mais c'est une oeuvre que j'ai souvent envie d'écouter.

 Amelia Felle
  Eleonora Jankovic
Danilo Rigosa
 Claudio Di Segni
Alfonso Antoniozzi
Danilo Serraiocco
Sonia Visentin

Petite question, est-ce que ce sont les éléments de la musique baroque, de la musique classique et de la musique pop qui t'ont attiré ?

Kool a écrit:

Petite question, est-ce que ce sont les éléments de la musique baroque, de la musique classique et de la musique pop qui t'ont attiré ?

Je répondrais la combinaison des trois au service de thèmes mélodiques qui me touchent beaucoup.

4 opéras de Mikis Theodorakis:

ELECTRA:

Je ne pouvais pas aborder un cycle sur "mes opéras préférés" sans évoquer les quatre opéras de Mikis Theodorakis que je connais et qui font justement partie de mes préférés. Il y a bien sûr le Grec qui est une langue qui a toujours flatté mon oreille, tout comme le Russe et l'Italien, même si je ne la comprends pas, surtout bien sûr lorsque celle-ci est chantée, plus encore lorsqu'elle est chantée, devrais-je préciser. Je suis généralement amoureux de la voix grecque, aussi bien féminine que masculine, mais je pense l'avoir déjà écrit sur ce même fil, à propos de l'opéra méconnu de Thanos Mikroutsikos, Le Retour d'Hélène. J'ai donc réécouté Electra, opéra en deux actes basé sur la tragédie éponyme de Sophocles. Meurtres, vengeances, c'est le lot de toutes tragédies grecques. Puissance, lyrisme,, intensité dramatique, lorsque l'on connaît la personnalité musicale de Mikis Theodorakis, il n'y a rien de surprenant à ce qu'il soit autant à l'aise dans le genre opératique. Il y aurait beaucoup à dire sur Electra, mais il y a ce thème principal de fort caractère qui traverse l'oeuvre de part en part pour se retrouver jusque dans sa conclusion. J'adore ce thème presque diabolique: sorte de romantisme morbide - l'amour et la mort s'y côtoient dans un esprit fataliste et sous tension permanente.

Au sujet d'Electra:

<<L'opéra "Electra" a été composé entre 1991 et 1994. La première mondiale a eu lieu le 2 mai 1995 au Théâtre de la Ville de l'ancienne Ville Culturelle Européenne de Luxembourg. La première grecque a suivi le 30 juillet 1996 au Théâtre Hérode-Attikus dans le cadre du Festival d'été d'Athènes. En novembre 1998, "Electra" a finalement été joué en concert à la Maison de Concert d'Athènes. Ce style d'interprétation est préféré par le compositeur, car il permet de représenter «les parties les plus intimes du corps de la musique», représentées par le chœur et l'orchestre, au-delà du «visage» de la pièce incarnée, à savoir les chanteurs.>> Guy Wagner.



L'argument: Cette tragédie grecque s'inscrit dans le cycle mythologique des Atrides. Elle débute après que le roi de Mycènes, Agamemnon, a été assassiné par son épouse Clytemnestre et l'amant de celle-ci, Égisthe, qui règnent désormais tous deux sur la cité. Électre, fille d'Agamemnon, connaît depuis une existence misérable au palais de Mycènes. Contrairement à sa sœur plus timorée, Chrysothémis, elle, ne se prive pas de dénoncer sa mère et Égisthe. Elle espère ardemment le retour de son frère, Oreste, pour venger le meurtre de leur père.

Les solistes:
__Galina Dolbonos: Electra
__Wladimir Feljaer: Orestes
__Emilia Titarenko: Chrysothemis
__Daria Rybakova: Clytemnestra
__Peter Migounov: Pedagogue
__Eugeni Witshnewski: Aegisthus
__Sergei Leonwitch: Pylades
"St. Petersburg State Academic Capella Orchestra & Choir" sous la direction de l'auteur.

Toujours dans mon cycle: "mes opéras préférés, toutes périodes confondues".

Médée de Mikis Theodorakis; une tragédie en cinq actes de Pierre Corneille, représentée pour la première fois en 1635:

La pièce se situe à Corinthe. L'héroïne de la pièce, la magicienne Médée, est répudiée par Jason après lui avoir donné deux enfants et est condamnée à l'exil par Créon, roi de Corinthe. Ce dernier, père de Créuse consent au mariage de sa fille avec Jason. Folle de rage, Médée accomplit sa vengeance en brûlant Créuse et Créon à l'aide d'une robe enchantée, et en égorgeant ses propres enfants. Le dernier acte se termine sur la fuite de Médée sur un char tiré par deux dragons et sur le suicide de Jason.



J'ai réécouté Médée que j'ai toujours plus ou moins considéré comme étant mon opéra préféré de Mikis Theodorakis. Ce n'est pas si simple de tricher et le maître grec est un excellent mélodiste, même si bien sûr ce n'est pas là son unique qualité, loin de là. Le compositeur est complet et sait émouvoir de plusieurs manières.  Il me reste encore à réécouter Antigone et The Metamorphoses of Dionysus qui, lui aussi, avait été mon préféré pendant toute une période. Ce que j'adore dans les opéras de Mikis Theodorakis, c'est un grand souffle dramatique qui m'étreint sur toute sa durée, une forte dimension humaine qui m'enivre littéralement, des chants magnifiques, des thèmes mélodiques pénétrants, des "moments d'action" galvanisants, en fait, autant d'éléments qui m'émeuvent et me fascinent que je retrouve dans ses symphonies et autres oeuvres vocales et religieuses... peut-être un peu moins dans son Requiem d'un style plus retenu et austère, plus propice au recueillement. Dans Médée, il y a toute cette puissante expressivité qui jaillit d'un ballet mortel et destructeur, celui-ci s'articulant autour de la vengeance terriblement meurtrière et infanticide de la magicienne.

__Emila Titarenko: Médée
__Nikolai Ostrofsky: Jason
__Peter Migounov: Créuse
__Wladimir Feljaer: Créon
__Irina Liogkaja: Nurse
__Eugeni Witshnewski: Messager
__Daria Rybakova: Coryphée
__Juri Worobiow: Pedagogue
"St. Petersburg State Academic Capella Orchestra & Choir" sous la direction du compositeur.

Ces opéras de Theodorakis, tu les as en CD ou en DVD ?

Chez les grecs, connais-tu les opéras de Manolis Kalomiris ? Notamment l'Anneau de la Mère, qui est magnifique - du moins pour moi.

joachim a écrit:

1) Ces opéras de Theodorakis, tu les as en CD ou en DVD ?

2) Chez les grecs, connais-tu les opéras de Manolis Kalomiris ? Notamment l'Anneau de la Mère, qui est magnifique - du moins pour moi.

1) - Je ne les possède qu'en cd. Les seuls opéras que je possède en DVD ou Blu Ray sont:

La Flûte enchantée de W. A. Mozart

Frühlings Erwachen de Benoît Mernier

Tea - A Mirror of Soul de Tan Dun

O.P.A. Mia - My Tender Bid de Denis Levaillant

La Tectonique des Nuages, un opéra-jazz de Laurent Cugny

J'ai l'intention de les revoir à nouveau, mais j'ignore quand...

2). Je ne connais encore aucun opéra de Manolis Kalomiris, seulement sa première symphonie que je n'avais pas aimée immédiatement mais que j'aime beaucoup désormais.

Antigone - opéra en deux actes de Mikis Theodorakis:

Antigone, l'argument:

Antigone est la fille incestueuse d'Oedipe, roi de Thèbes et de la reine Jocaste (qui est aussi sa grand-mère). Après le suicide de Jocaste, honteuse de son inceste involontaire, Oedipe, qui s'est crevé les yeux, s'exile à Colone sous la conduite d'Antigone. Sa soeur Ismène les y rejoint. Les Thébains essaieront en vain de les enlever. Le poète Ducis met ces mots dans la bouche d'Oedipe s'adressant à sa fille qui a su si bien s'occuper de lui. Oui, tu seras toujours chez la race nouvelle De l'amour filial le plus parfait modèle; Tant qu'il existera des pères malheureux Ton nom consolateur sera sacré pour eux: Il peindra la vertu , la pitié vive et tendre. Jamais sans tressaillir ils ne pourront l'entendre! Après la mort d'Oedipe, les jeunes filles reviendront volontairement à Thèbes où le roi Créon, leur oncle, avait promis de marier Antigone à son fils Haemon ou Hémon. Au cours de la guerre des Sept Chefs, ses frères Etéocle et Polynice s'entre-tuèrent. Créon, frère de Jocaste, alors au pouvoir fit donner à Etéocle une sépulture décente, mais il ordonna que le corps de Polynice, qu'il considérait comme un traître à sa patrie, restât sans sépulture à l'endroit où il était tombé. Antigone, convaincue que la loi divine devait l'emporter sur les décrets humains, décida de rendre les honneurs funèbres à son frère. Surprise par les gardes elle fut amenée devant le roi. Pour ne pas se souiller, Créon la condamna à être enfermée vivante dans le tombeau des Labdacides où elle devait mourir de faim. Ismène voulut partager son sort mais sa soeur refusa car elle n'avait pas eu, en son temps, le courage de s'opposer à Créon. Le devin Tirésias rapporta à Créon ces paroles à peine obscures où il devait sous peine de malédiction "enterrer les morts et de déterrer les vivants". Créon comprit et se précipita au tombeau pour le faire ouvrir mais il était déjà trop tard. Antigone s'était pendue avec sa ceinture et son amant éploré, Haemon, chercha d'abord à tuer son père et en le maudissant il se suicida à son tour suivi dans son acte par sa mère, Eurydice, la femme de Créon qui se trancha la gorge. La noble résignation et la mort d'Antigone ont fourni matière à plusieurs tragédies.

__yorgos Papas: basse - Oedipe
__Tzeni Drivala: soprano - Antigone
__Dimitris Kasioumis: baryton - Créon
__Pavlos Sampsakis: baryton basse - Corypheus
__Zachos Terzakis: ténor - Hémon
__Dafne Evagelatou: mezzo-soprano - Jocaste
__Panayiotis Athanasopoulos: baryton - Etéocle
__Tasis Christogianopoulos: ténor - Polynice
"Athens State Orchestra" & "National Opera Choir" sous la direction de Loukas Karytinos



J'ai réécouté Antigone. La tragédie de Sophocle contient son lot de meurtres et de suicides, de douleurs et de haines. La musique de Mikis Theodorakis illustre toute la dimension dramatique de l'argument, et l'auteur se montre, comme à chaque fois, particulièrement doué et inspiré pour accompagner ces déchirements humains et ces fleuves de sang qui se déversent jusqu'à la note finale, jusqu'au suicide d'Eurydice par égorgement. En matière de belles voix grecques, je suis également servi. Les interprètes sont talentueux et parfaits pour interpréter des thèmes mélodiques caractéristiques du compositeur. Puis, il y a des instants chipés par-ci, par-là, qui me furent très émouvants: je me souviens d'une plainte un peu trop courte avec violoncelle solo - lorsque l'émotion, la belle émotion est là, c'est toujours trop court - puis d'une clarinette dont la douceur m'a profondément attendri. Elle m'offrit une belle proximité émotionnelle, de celles que je recherche en permanence dans la musique. La seconde partie de cet opéra a toute ma préférence.

The Metamorphoses of Dionysus de Mikis Theodorakis:

Cet opéra de Mikis Theodorakis est d'une physionomie instrumentale très différente de ses autres opéras tels que Antigone et Médée. L'instrumentarium se constitue d'une trompette, d'un trombone, une flûte, piano, percussions, violoncelle et plusieurs saxophones. Tous ces instruments sont très bien mis en scène tout au long de l'opéra, m'offrant des couleurs et des ambiances sonores qui en font une oeuvre distincte, infiniment contemporaine et aisément reconnaissable. Dans ces autres opéras, excepté Lysistrata que je ne connais pas encore, je suis surtout ému par de grandes formes lyriques et classiques, même si toute la personnalité musicale de Theodorakis y transpire, bien qu'il y ait aussi, comme dans Electre, des moments d'action qui me sont exaltants, dans Les Métamorphoses de Dionysos, il y a de cela aussi bien sûr, mais dans un contexte musical le plus souvent pulsatif et aux tournures sonores originales, en tout cas qui me paraissent originales ou atypiques, je pense par exemple au jeu des saxophones mais pas seulement. C'est toute une texture instrumentale et un complexe rythmique qui s'articulent autour des solistes et des choeurs qui m'en font un opéra qui se démarque des suivants et me fascine différemment, à la manière d'une oeuvre plus contemporaine que classique.



Przemyslaw Neumann: baryton dans le rôle du Poète,
Beata Kosko-Kreft: alto dans le rôle de Romiosini,
Joanna Sperska: soprano dans le rôle de Phaèdre,
Marcin Tlalka: basse dans le rôle de Dionysus,
Kostas Dinos: ténor dans le rôle du Journaliste,
Jakub Jarmula: ténor dans le rôle de Punentes

et également:

Jocelyn B. Smith: soprano dans le rôle de la Reine,
Marcin Tomczak: ténor dans le rôle du Roi Otto,
Hagen Matzeit: baryton dans le rôle de l'Officier,
Grzegorz Zieba: ténor dans le rôle du Roi Paul,
Marek Wieclawek: ténor dans le rôle de Angel.

Henning Schmiedt: piano
Volker Schlott: saxophone soprano et flûte
Orchestra di Musica Difficile, Gdansk - Chor Concentus sous la direction de Marcin Tomczak
Mikis Theodorakis: composition, livret, direction.

Je n'ai pas encore eu l'occasion d'écouter cette œuvre, mais j'ai été très impressionné par la description que tu en fait. L'instrumentarium inhabituel, le caractère contemporain de la musique et le sens de l'humour du compositeur m'intriguent et me donnent envie de découvrir cette œuvre.