Musique : les Français encore réticents à payer un service de streamingLe taux de pénétration de l’abonnement payant reste faible en France, à 16 %. Le marché français de la musique enregistrée avoisine 1 milliard d’euros.Du mieux, mais pas encore le nirvana. Le marché français de la musique enregistrée se rapproche du milliard d'euros : il a augmenté de 5,1 % l'an dernier pour s'établir à 968 millions d'euros, selon le bilan annuel établi par le Snep (Syndicat national de l'édition phonographique). En 2022, la croissance était plus forte, à 6,4 %, tout comme en 2021, année de forte reprise après la pandémie (+ 17 %).
Comme les ventes physiques sont en léger recul (- 1 %), ce sont les revenus tirés des exploitations numériques (+ 8,7 %), en particulier du streaming audio, qui ont soutenu le marché l'année dernière. On reste encore loin du record historique de 2002, avant que l'arrivée du numérique ne lamine le secteur : l'année 2023 ne représente que 53 % du niveau de 2002 en euros constants.
Le Snep déplore une croissance trop lente du streaming par abonnement dans l'Hexagone. On compte 12 millions de comptes payants, soit 17 millions d'utilisateurs en incluant les offres duo et famille. À 16 %, le taux de pénétration de l'abonnement payant (Spotify, Deezer, Apple Music…) reste derrière les principaux pays occidentaux. « Ce chiffre montre à quel point nous sommes loin d'avoir atteint la maturité. Nous sommes loin des États-Unis (30 %), du Royaume-Uni (26,5 %) et de l'Allemagne (17,5 %). Tout devrait être mis en œuvre pour favoriser l'adoption du modèle streaming par les Français et soutenir la capacité d'investissement. Pour ce faire, l'utilisation du pass culture pour s'abonner aux services de streaming me paraîtrait beaucoup plus efficace que de la mise en place d'une taxe streaming », estime Alain Veille, président de Warner Music France.
Spotify courroucé par la « taxe streaming »Une référence à la nouvelle contribution qui grève les revenus des plateformes. Le leader mondial du streaming, Spotify, qui reverse 70 % de ses revenus aux ayants droit, paie depuis le début janvier cette taxe qu'il appelle « taxe Centre national de la musique » – car elle aide à son financement – à hauteur de 1,2 % de son chiffre d'affaires en France. L'accusant d'augmenter sensiblement ses coûts, il a annoncé une prochaine hausse du prix des abonnements, après celle de Deezer (abonnement premium passé d'environ 11 euros à 12 euros, et famille, de 18 à 20 euros). Aujourd'hui, l'abonnement premium à la plateforme est d'environ 11 euros en France, en Belgique, en Italie ou en Allemagne. Après l'augmentation, il sera le plus cher d'Europe. Est-ce le prix qui freine les Français de passer au streaming payant ? Les offres encore gratuites avec publicité, comme sur Youtube ? Le téléchargement illégal de morceaux ? Peut-être un peu des trois.
Selon le rapport du Snep, la durée d'écoute hebdomadaire de la musique en France atteint 18 heures, soit 4 h 30 de plus qu'en 2019 et 1 h 10 de plus qu'en 2022. La radio reste la première source de découverte de musique, notamment pour les plus de 55 ans, devant les services de streaming, privilégiés par les consommateurs plus jeunes. Les moins de 20 ans découvrent souvent de nouveaux sons avec les vidéos courtes et notamment TikTok.
TikTok pointé du doigtLe réseau social d'origine chinoise cristallise d'ailleurs les tensions avec les labels de musique. Alors qu'il capte l'attention des jeunes – un jeune Français sur deux l'utilise quotidiennement –, il détourne leur attention des services de streaming, déplorent-ils. « Les revenus générés par TikTok ne correspondent pas à l'usage massif de la musique par ses utilisateurs. Ils sont inférieurs à ceux des autres plateformes de contenus vidéos et se situent aux antipodes des rémunérations versées par les services de streaming audio, de loin principales sources de rémunération pour les artistes et les producteurs », s'agace le Snep.
Le conflit entre Universal Music, la major leader du secteur de la musique enregistrée, et le réseau social qui revendique plus de 1 milliard d'utilisateurs risque de rebattre les cartes. Universal veut améliorer les conditions de rémunération des artistes et se protéger des titres générés par l'IA et inspirés par des artistes physiques.
Air et le succès de l'électro française à l'étrangerEn tournée pour les 25 ans de son premier album Moon Safari, le groupe de la french touch Air a fait salle comble à l'Olympia, la semaine dernière. Son succès dépasse largement le territoire français. « Avec Daft Punk, Phoenix, St Germain, Air cartonne au-delà de nos frontières, par exemple aux États-Unis et au Royaume-Uni. Ils ont vendu 3 millions d'exemplaires de Moon Safari », se réjouit Alain Veille, président de leur label, Warner Music France. Après les ventes physiques lors de la sortie de l'album en 1998, les écoutes ont suivi en streaming, porté l'utilisation de leur musique dans les films, tels que Virgin Suicides de Sofia Coppola, ou dans des publicités. Parmi les autres artistes francophones qui s'exportent bien actuellement, on trouve, selon le bilan du Snep, Fally Ulipa, Aya Nakamura, Ninho ou encore Offenbach. La notoriété d'Aya Nakamura s'est répandue de la France à l'Allemagne puis dans le reste de l'Europe continentale avant de gagner le monde entier. « Le passage de sa chanson “Djaja” dans la série espagnole de Netflix Élite lui a permis d'être connue sur l'ensemble des territoires hispanophones. Aya Nakamura est vue partout dans le monde comme une grande artiste capable de mélanger les genres », précise Alain Veille. La récente polémique sur la possible participation de la chanteuse à la cérémonie des Jeux olympiques devrait encore faire augmenter sa notoriété.
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