Calliope TSOUPAKI, née en 1963

Calliope Tsoupaki (Le Pirée,1963) étudia le piano et le solfège au Conservatoire hellénique d'Athènes, et la composition avec Yannis Ioanithis. Elle suivit des cours d'été avec Iannis Xenakis,Olivier Messiaen et Pierre Boulez. A Darmstadt, elle prit part aux Internationales Ferienkurse ù, en 1986,elle rencontra un an avant sa mort Morton Feldman. Un tournant dans sa vie fut la découverte de la musique de Louis Andriessen, auprès de qui, en 1988,elle étudia au Conservatoire Royal de la Haye. Elle fut diplômée en 1992.

L'oeuvre de Tsoupaki comprend des pièces pour instrument solo,de la musique de chambre, des oeuvres pour ensemble, de la musique chorale et pour orchestre et des projets de musique de théâtre tant pour des troupes discrètes que remarquées:

___ SAPPHO'S TEARS pour violon,flûte à bec et soprano (1990)
___ GUERRE E MORTE, inspiré de Monteverdi, pour choeur, deux violons baroques,gambe et théorbe (1997
___ VIAJE A LA LUNA pour hautbois,violon,alto,violoncelle et guitare (1999).

_______OPERA_______

___HUNTING GUN AND DARK - 2003 - (sur Jeanne d'Arc)
___VITA NOVA (sur la route de Dante) - 2004 opéra de chambre pour solistes,violon baroque,viole de gambe et clavecin

_______MUSIQUE DE CHAMBRE______

___ENIGMA pour alto solo - 1999
___MEDEE pour alto et 3 voix de femmes - 1996 (d'après Euripide)
___QUAND J'AVAIS 27 ANS pour alto et contrebasse - 1990
___MUSIQUE POUR SAXOPHONES  (saxophones Quartet/ SYRINX)
___LOVE SONGS GRECS
___SILVER MOMENTS pour deux pianos et deux percussions - 1987
___NOCTURNAL SOUNDS pour violoncelle et piano - 1988

_______OEUVRES VOCALES______

___ST. LUKE PASSION pour solistes,choeur et ensemble - 2008      
___EPIGRAMMA pour choeur et orchestre - 1995
___THYESTES pour baryton et orchestre - 2005

_______OEUVRES ORCHESTRALES____

___VISIONS OF THE NIGHT pour orchestre de chambre - 1989
___KENTAVROS pour ensemble à vents,contrebasse et piano - 1991
___ECHOING PURPLE pour violon et ensemble - 1992
___SIREN pour orchestre de chambre - 1997 (Nostro II)
___CHORUS pour quintette de cordes et quintette de saxophones - 2001
___DE DAGERAAD pour violon,guitare électrique et ensemble - 2001
___EN PLO pour ensemble à vents,guitare électrique,basse électrique et percussion - 2006
___SOLO pour orchestre de chambre - 2004

<< La Passion selon Saint Luc est une icône, et non une peinture >>, affirme Calliope Tsoupaki. <<Pour peindre une icône, les règles sont strictes. Vous représentez quelque chose de divin, de mystérieux. L'icône doit refléter la force de ce qu'elle représente. Sans être pathétique. Je n'ai rien écrit sans réflexion. J'aime composer tout sous contrôle. Et je n'aime pas faire ma présence perceptible dans ma Passion. >> Il est impératif de savoir comment quelque chose de personnel, qu'elle aimait ainsi dire pour elle-même, pouvait être raconté "aussi sincèrement que possible". Dans le drame de l'épisode christique, il s'agit plus de tragédie religieuse que de drame musical. << Jésus doit arriver de façon dynamique. Je ne voulais pas d'un Jésus se lamentant sur sa croix. Je voulais le montrer comme un roi. Pour moi, il est fort. Il doit l'être.>> Cela ne le rend pas moins tragique reconnaît Tsoupaki. Et son Christ chrétien orthodoxe n'est pas peu redevable à cette autre grande tradition grecque. << Ma Passion doit beaucoup aux tragédies grecques. Elles traitent des frustrations de l'homme, de son profond sentiment d'impuissance. Et elles offrent simultanément un espace de réflexion. Elles sont comme un vase au coeur duquel tous les sentiments sont cristallisés. Dans l'aria, je laisse le Christ, comme une sorte de Cassandre, augurer trois fois de sa fin.>>

  J'adore cette oeuvre divisée en trois parties, les deux premières d'environ treize minutes et la troisième de cinquante minutes. Elle a quelque chose de beau et de puissant à la fois. C'est sans doute les voix que j'ai trouvé particulièrement saisissantes, un ténor, deux voix de femme byzantines, un quatuor vocal (l'Egidius Kwartet), un choeur byzantin, des instruments solistes tels que le ney,le kemence et le qanun, avec le Nieuw Ensemble sous la direction de Spanjaard. J'éprouve beaucoup de plaisir à me plonger dans ce type d'oeuvre qui présente entre autres un chouette solo de ney.      

Quelques mots de Bas van Putten sur La Passion selon St. Luc:

<<Dans la distribution des solistes figurent un Christ "occidental", un évangéliste byzantin et une chanteuse "orientale" dont les glissandos persistants s'appuient sur la tradition du 'miroloi' des chants de lamentation grecs. Cette "Passion selon Saint Luc" est avant tout une confession du coeur, à la fois timide et franche: le travail pleinement religieux d'une compositrice croyante et engagée, qui a dû parcourir un long chemin pour vouloir et pouvoir composer cette musique. L'oeuvre traite de sa foi sans limite en un homme dont les souffrances l'ont touchée comme un enfant, jusqu'aux larmes, et dont le retour salvateur pour l'humanité ne fait à ses yeux aucun doute. "Son" Christ, elle le retrouve sur l'icône qu'elle tient de celui qu'elle appelle son père spirituel, un prêtre grec: "J'ai longtemps et souvent cherché cette image. Vous y voyez deux yeux. L'oeil droit semble austère et énigmatique, l'autre est plein d'amour et d'affection. L'icône contient deux émotions: la joie et la tristesse. Le grec a un mot pour cela: charmolypi. Le premier oeil est celui de Jésus, qui reviendra sur terre pour rendre justice, l'autre est l'oeil de l'homme qui va nous sauver." Ces deux facettes du Christ déterminent selon Tsoupaki la forme de la pièce, qui se divise en deux composantes: "les deux premières parties se rapportent à l'oeil du juge, la dernière à celui de l'amour sans fin.">>



Marcel Beekman: ténor
Ioannis Arvanitis: chanteur byzantin
Raneen Hanna: chanteuse orientale
Membres du "Egidius Kwartet"
Membres du "Choeur byzantin Ioannis Arvanitis"
Harris Labrakis: ney
Neva Ozgen: kémence
Bassem Alkhouri: qanun
"Nieuw Ensemble" sous la direction d'Ed Spanjaard. 2008
J'ai réécouté cette Passion ce matin. J'y ai retrouvé ces moments forts qui me plaisent à plusieurs endroits, seul l'Alleluia final m'est un peu trop anodin. J'aurais préféré une fin plus poignante, mais, sans doute, Calliope Tsoupaki souhaitait un final plus apaisé et proche de la prière. L'oeuvre se divise en trois parties:
Hymnos 12'59
Aria 13'08
Pathos 50'33
Il y a dans la troisième partie un passage plus animé et tendu qui me fascine dans sa construction presque obsessionnelle, et aussi deux moments particuliers: un qui offre au chanteur byzantin un parcours en solitaire et un autre complètement consacré au ney pour un chant tout aussi solitaire, et comme j'adore le son de cet instrument...