Catherine Kintzler: "Poétique de l'Opéra Français"

par Adrien De Vries

Se poser la question de "l'Opéra classique" au XVII ème et XVIII ème, de 1659 à 1774, de "La pastorale d'Issy" de Perrin et Cambert, à la première Iphigénie parisienne de Gluck, "Iphigénie en Aulide", est le sujet de cet essai passionnant.

Voici la deuxième édition d'un texte fondamental, paru en 1991 et qui bénéficie dans sa nouvelle édition, de textes réactualisés.
Se poser la question de "l'Opéra classique" au XVII ème et XVIII ème, de 1659 à 1774, de "La pastorale d'Issy" de Perrin et Cambert, à la première Iphigénie parisienne de Gluck, "Iphigénie en Aulide", est le sujet de cet essai passionnant.

L'intérêt du texte vient du profil de son auteur: Catherine Kintzler est philosophe. C'est donc d'un point de vue philosophique que le genre opéra est ici analysé, dans sa période d'éclosion, de maturation, d'évolution à l'époque baroque.

Aborder la scène lyrique revient à définir une catégorie poétique et philosophique pour un genre majeur de l'expression artistique. En souhaitant croiser esthétique et philosophie, l'auteur apporte un éclairage raisonné, personnel qui propose une méthodologie d'approche nouvelle. Catherine Kintzler traite son sujet en dévoilant comment se "pensait" l'opéra au moment de ses manifestations, au travers des innombrables créations qui ont incarné le goût officiel et politique, suscitant débats esthétiques, querelles musicales, commentaires et discussions, surtout "préfaces" des compositeurs, soucieux d'apporter leurs propres intentions et définitions pour l'essor du théâtre lyrique français.

Au final, aucun des aspects "manifestes" du genre n'est omis dans une recension rigoureuse qui a défini ses propres méthodes d'investigation. Il en résulte trois parties. Dans la première, l'opéra est analysé comme objet poétique dont les "normes" et les codes formels se sont construits en rapport avec le théâtre classique, celui de Corneille et de Racine. Dans la deuxième partie, le genre théâtral et musical est approché en tant que tel: portrait pour "construire un théâtre lyrique", c'est un "laboratoire poétique" où les concepts prennent forme: tragique, macabre, merveilleux. La part du "ballet", phénomène spécifiquement français, est étudiée, comme la part de la musique, désormais prédominante, en particulier avec Rameau. Enfin, avec le concept d'esthémè, Catherine Kintzler opère une mise à nu de l'esthétique classique, démontant les rapports intrinsèques de la machine lyrique: imitation/retournement, musique/langue... Il s'agit en définitive d'apporter les éléments d'un dossier encore en chantier et qui attend sa validation définitive dont la question principale serait: qu'apporte de significatif l'analyse d'une production esthétique (ici, l'opéra) que l'examen particulier de ses conditions philosophiques, rend "pensable"? A défaut d'obtenir une conclusion porteuse d'éléments aussi concrets qu'éloquents, "l'instruction" a le mérite de dévoiler la diversité des approches possibles en relation avec la diversité des éléments en présence. Par opéra, il faudrait parler de "constellation", plutôt que d'un corps homogène. Passionnant.

Prof de philo, la dame possède aussi son blog :

http://www.mezetulle.net/

un peu austère mais à signaler...

kfigaro a écrit:

un peu austère mais à signaler...

Normal quand on est prof de philo...