Intégrale des sonates pour piano Beethoven, par Fazil Say

Voilà, je viens d'avoir aujourd'hui son coffret de l'intégrale des 32 sonates pour piano de Beethoven...  
9 albums...! Je suis impressionnée,  j'ouvre cela "presque religieusement"... Je me demande si je vais me précipiter (bêtement) sur toutes celles que je connais... Ou tout simplement prendre "dans l'ordre"...
Je cite ce que Fazil Say nous dit.. :
".... J'ai abordé le jeu dans l'état d'esprit d'un compositeur plutôt que celui d'un interprète.
.... C'est comme un texte sacré.... Je voulais offrir au monde un magnifique cadeau. ..... Présenter ces pages avec un maximum de spontanéité et d'éclat.
Tout au long de ces deux années, Beethoven a été mon idole et mon mentor..."
(évidemment,, ce sont des extraits de son interview , très long et restranscrit dans l'album).

Je vais être très respectueuse, relire attentivement tout ce qu'il nous dit , l'écoute me prendra longtemps et je vous en parlerai de temps en temps , plutôt sur un fil dédié aux "sonates pour piano" de Bethoven...

Ayant écouté de nombreuses versions, il faudra que j'aille écouter la sienne pour avoir une idée. On verra bien

Snoopy a écrit:

Ayant écouté de nombreuses versions, il faudra que j'aille écouter la sienne pour avoir une idée. On verra bien

et quelles sont celles qui t'ont le plus convaincu ?

Mon interprète préféré pour les sonates de Beethoven, reste à ce jour, John Lill. (il a une certaine fougue, presque brutalité dans sa manière de jouer Beethoven que j'aime bien)

Je n'ai pas trouvé de "rivaux" sérieux pendant un long moment. (Je trouve chacun de nos grands noms plutôt spécialisés sur un compositeur. Par exemple, ma référence pour les concertos piano de Mozart c'est Christian Zacharias. Pour Bach, c'est Sviatoslav Richter. Pour Chopin, Liszt, Schubert, etc... d'autres interprètes)

Pour Beethoven la liste s'est un peu allongée ces dernières années via mes découvertes Youtube avec de nouveaux venus. Comme par exemple avec Valentina Lisitsa, Lang Lang (faut l'avouer, il est excellent), chacun apportant sa petite nuance sur un déjà très haut niveau.

Après je fais aussi le distinguo entre ceux qui jouent "mieux" les sonates, d'autres les concertos pour piano, etc... Par exemple pour les concertos piano de Beethoven, j'ai une préférence pour Krystian Zimerman.

Après, beaucoup se valent. La différence reste subjective selon ses goûts des nuances aussi et sa propre interprétation quand on est soi même pianiste.

Merci Snoopy pour ce mail très étayé. Je partage certains de tes avis, j'ai mes préférences aussi.
Mais tu parles pianistes sur des oeuvres en général.
Pour les intégrales des sonates pour piano de Beethoven, j'en connais deux ou trois, mais que je n'ai pas vraiment écoutées en totalité.

Cf. aussi fil sur Fazil Say.

Ce magnifique pianiste a donc enregistré une intégrale des 32 sonates pour piano de Beethoven, entre 2018 et 2020, sur un des deux pianos du "Mozarteum" de Salzbourg, et le coffet des 9 CD est sorti l'automne dernier.
Il avait joué les sonates "les plus connues" sur les scènes internationales (la "Clair de Lune", "L'Appassionnata" etc...)..., mais faire le parcours depuis le début...!! (1795 à 1822).

Fazil Say nous donne dans le livret de l'album (très beau et détaillé), une interview d'une rare vérité, presque comme une confidence , mais bien sûr qui devient un Credo...
Il reconnaît que ce fut très difficile, beaucoup de travail. Quand il était sur le point de laisser tomber, il s'imaginait Beethoven assis en spectateur et l'encourageant... Karajan ou Furtwängler le dirigeant... Il se secouait et continuait à avancer. Il avoue s'être créé plusieurs mondes imaginaires, qui le libéraient de ses propres angoisses...(genre de monde "L'orchestre Beethoven Fazil Say"...).
"Raconter les histoires des sonates et attendre "l'équilibre de l'âme"..."

J'étais très émue de lire ses propos si intimes, mais qu'il souhaite nous donner comme une confession...


Les sonates des deux premiers albums (sonates 1-3), et (4-6), 1795-1798, sont bien sûr fortement influencées par le style de Mozart et celui de Haydn (son professeur de piano). A tel point que l'on pourrait presque s'y tromper...
Fazil Say a donné certains surnoms à des sonates qui n'en avaient pas ... Exemple, la fort jolie et gaie "sonate 2", il l'appelle "la charmante petite princesse"... (etc...)

Les intégrales de ces sonates sont extrêmement nombreuses... , mais ce sera sans doute l'objet d'un autre fil...
Je ne vous livrerai mes impressions que deux ou trois fois au cours de mes écoutes, car je ne suis pas musicologue, et l'exégèse des sonates relève de leur expertise !

Anouchka a écrit:

Il reconnaît que ce fut très difficile, beaucoup de travail. Quand il était sur le point de laisser tomber, il s'imaginait Beethoven assis en spectateur et l'encourageant... Karajan ou Furtwängler le dirigeant... Il se secouait et continuait à avancer. Il avoue s'être créé plusieurs mondes imaginaires, qui le libéraient de ses propres angoisses...(genre de monde "L'orchestre Beethoven Fazil Say"...).
"Raconter les histoires des sonates et attendre "l'équilibre de l'âme"..."

Il a le sens du drama

Oui, c'est même plus que cela ! Il reconnait implicitement que cela fut comme une sorte de psychanalyse...
Dommage que son "interview" soit si longue que je ne puisse tout écrire.
Extrêmement émouvant....
L'une de ses dernières phrases est :
"Je crois être parvenu à un stade où je suis capable de surmonter les problèmes psychologiques inhérents à la lutte solitaire que représente l'enregistrement en studio.
Je ne laisse rien m'atteindre. J'attends calmement et patiemment l'arrivée de l'équilibre, sans paniquer."

Il s'explique beaucoup sur les différentes versions des intégrales.... Une autre fois...

La très célèbre sonate 8 en do mineur opus 13, dite "Pathétique", 1798-99..
(dédicacée au prince Lichnowsky, mécène de LVB depuis son arrivée à Vienne en 1792).

Son nom lui a été donné par le poète Schiller, "pathétique" signifiant à l'époque, éthymologiquement, "d'une grande âme".

Rien de triste... Beethoven commence à innover, car sur les trois mouvements, il commence par un mouvement doux et lent (ce que Haydn et Mozart ne faisaient pas -sauf exception ?-).

Très belle sonate, que Fazil Say interprète très sobrement, sans aucun "pathos"...

Je parviens à la fin de ma longue écoute (32 sonates, 9 CD).
J'ai pris mon temps, en ré-écoutant plusieurs fois le même CD, en lisant les commentaires du livret, bref en m'imprégnant vraiment de ces incroyables et magnifiques compositions.

Bien sûr, c'est toujours émouvant de retrouver sur un CD, les sonates les plus connues et les plus jouées, -la"Clair de Lune" (l'une de mes préférées)-, l' "Appassionata", la "Waldstein", la "Hammerklavier" ...- (cette dernière, la numéro 29 en si bémol majeur opus 106, est extrêmement brillante, longue et difficile, achevée en 1818, elle dure ente 40 et 45 mn .Beethoven la destinait au piano forte "Hammerklavier", d'où son nom. Elle s'achève sur une fugue monumentale    ).Je cite : "comme sur le piano moderne qui succèdera au "Hammerklavier", le son est produit par le son d'un marteau (Hammer) sur la corde. Par son écriture, cette sonate représente une révolution sur un plan instrumental".

Les trois dernières sonates du 9ème et dernier CD, 30 à 32, sont particulièrement émouvantes, quand on sait que Beethoven était sourd. Cette ultime sonate, la N° 32 en ut mineur, opus 111, est dédiée à son élève, ami et mécène l'archiduc Rodolphe. (1821-1822). Je la trouve sublime.

Demain, je vous parlerai de ce que Fazil Say a témoigné de son écoute des "intégrales" avant lui.

https://youtu.be/8LrPUAO3yQo ("Hammerklavier" par François-Frédéric Guy).

A noter que le fil de Wikipédia sur les sonates pour piano de Beethoven est très intéressant.
Les sonates pour piano de Beethoven sont considérées comme le premier cycle de grandes pièces de piano adaptées à l'interprétation en salle de concert. Adaptées à la fois à l'exécution privée et publique, les sonates de Beethoven forment « un pont entre les mondes du salon et de la salle de concert »

L'avis de Fazil Say sur les "intégrales" interprétées par d'autres pianistes :

"Les différences d'interprétation font les délices du compositeur.. -perso, j'ajoute, et de l'auditeur !

Fazil Say s'est beaucoup documenté, a lu en particulier les annotations de Czerny, d'Arthur Schnabel, etc.. Il a énormément annoté lui-même, disant qu'il avait utilisé environ 300 stylos et crayons différents, ré-écrivant parfois la musique en différentes couleurs.
"Certains trouveront peut-être mes tempi trop précipités dans les sections rapides ou trop paresseux dans les sections lentes. Ce n'est pas si grave au regard de l'image globale....."

L'interview est plus longue, il s'est vraiment complètement livré Fazil Say, dans cette "intégrale".

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Mon avis : J'ai adoré son jeu, sobre, sans effet "particulier",  tout en reconnaissant en moi, parfois, une préférence pour une certaine interprétation de telle sonate par Brendel, ou Pollini, ou Schiff..., et surtout Barenboim (dont j'ai écouté l'intégrale mais que je n'ai pas en CD).
Certains sont "plus sobres", d'autres plus "passionnés" (presque trop parfois), et c'est cela qui fait nos délices d'auditeur.....

Qu'en pensez-vous ?

Anouchka a écrit:

Qu'en pensez-vous ?

Qu'il s'est pris la tête pour pas grand chose

Ce n'est pas mon avis, car c'est comme un alpiniste qui grimpe l'Everest (ou genre), il voulait le faire d'abord pour se prouver qu'il pouvait le faire, et mission accomplie (et très bien ).
Il peut être content de lui (son album est très loué), d'autant plus qu'il a passé deux ans à travailler avant et pendant la crise du Covid, cela a dû l'aider à s'équilibrer musicalement...
J'ai bien aimé la façon dont il parle de tout cela dans son livret, dont il en a parlé dans les médias, l'enregistrement en studio pas très simple , etc... (il jouait sur le pianoforte de Mozart du Mozarteum de Salzbourg donc il a fallu faire vite)...
C'est un grand artiste.

Anouchka a écrit:

C'est un grand artiste.

Je suis bien d'accord mais il aime quand même bien se prendre la tête pour rien.

Exemple: Il y a quelques années (je ne sais plus exactement pour quelle oeuvre) il avait voulu enregistrer une oeuvre à deux pianos. Au lieu de le faire en duo avec un autre pianiste, il a préféré joué seul sur chacun des pianos, séparément, puis ensuite les associer au montage. Autant dure que ça a été une sacrée galère pour la synchronicité.

Il avait d'ailleurs été assez ouvertement critiqué pour cela à l'époque. A mon avis, à juste titre.

Il y a peut-être un petit côté mégalo derrière tout ça..
J'ai appris qu'il avait eu beaucoup d'ennuis avec les autorités turques en raison de ses positions politiques très marquées .. C'est clair qu'il a du caractère, cet homme !

Juste pour dire, le fait qu'il ait pu avoir pendant 12 jours le pianoforte de Mozart à Salzbourg pour enregistrer, c'est incroyable.
Je ne sais pas qui a pu obtenir cela, peut-être Barenboim (?), mais pas autant de jours...
L'histoire de l'enregistrement (citée dans le livret), est très intéressante. Il a fallu faire très vite, alors il était presque en direct, Fazil Say, parce qu'il ne lui fallait pas d'états d'âme et on ne pouvait pas faire x.... prises....
J'ai lu une critique musicale qui rejoint un peu la mienne. C'est parfois inégal, mais très travaillé,
et comme je vous le disais plus haut, sa "Clair de Lune" est un chef d'oeuvre (ma préférée d'ailleurs au niveau du toucher, très doux, long..), et  "Hammerklavier" est extraordinaire.
A propos de cette dernière, petite anecdote :
Elle fut déclarée "injouable" pendant longtemps... Et puis un jour, elle fut jouée par un jeune pianiste de 15 ans en concert ..., c'était... : un certain... Franz Liszt !!