Jérôme Ducros est un pianiste et compositeur français né à Avignon le 30 novembre 1974.
Après des études au Conservatoire d’Orléans avec Françoise Thinat, il entre en 1990 au Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris dans la classe de Gérard Frémy et Cyril Huvé. Il y obtient un premier prix de piano à l’unanimité avec félicitations du jury en 1993, puis intègre le cycle de perfectionnement jusqu’en 1995. Il suit les classes de maître de Christian Zacharias, György Sebök et Leon Fleisher. En 1994, il remporte le deuxième prix du Concours international Umberto Micheli à Milan, concours créé par Maurizio Pollini qui siégeait au jury présidé par Luciano Berio. Il y obtient également le Prix spécial pour la meilleure interprétation de l’œuvre contemporaine imposée, Incises de Pierre Boulez.
Il poursuit depuis une carrière de concertiste qui l’amène à jouer dans des salles telles que le théâtre des Champs-Élysées, le théâtre du Châtelet, la salle Pleyel, le Concertgebouw d’Amsterdam, le Wigmore Hall de Londres, le Carnegie Hall de New-York, la Philharmonie de Berlin. Parmi ses partenaires de musique de chambre : Renaud Capuçon, Gautier Capuçon, Paul Meyer, Michel Portal, Nicholas Angelich, Frank Braley, Jérôme Pernoo, Gérard Caussé, le Quatuor Ébène. Il accompagne des chanteurs tels que Dawn Upshaw, Ian Bostridge, Diana Damrau, Angelika Kirchschlager. Depuis 2007, il donne régulièrement des concerts de mélodies françaises avec Philippe Jaroussky. Il crée des œuvres de Pascal Zavaro, Henri Dutilleux, Stéphane Delplace, François Paris, Philippe Leroux, Olivier Greif, Guillaume Connesson, Jérémie Rhorer, Jacques Lenot et Pierre Boulez.
Jérôme Ducros compose depuis ses plus jeunes années, mais n’a rendu publique cette partie de son activité qu’en 2006, à la création de son Trio pour deux violoncelles et piano. En mai 2013 paraît En aparté, première monographie de l'œuvre de Ducros, contenant son Quintette avec piano et son Trio pour violon, violoncelle et piano.
Écrits sur la musique
Jérôme Ducros a publié dans la revue Commentaire n°129, parue au printemps 2010, un texte qui défend le retour de la tonalité en musique. Il y ébauche une histoire de la modernité dans laquelle il dissocie esthétique et attitude modernes, considérant que c'est une erreur de confondre les deux.
"L’attitude moderne (en gros, l’insoumission), est un invariant de l’histoire de l’art, compagne de toutes les révolutions, moteur de tous les changements. L’esthétique moderne, en revanche, n’est que l’esthétique d’une époque : en l’occurrence aujourd’hui celle du xxe siècle. Pour la musique, elle présuppose entre autres l'atonalisme, selon une décision multilatérale vieille d'une centaine d'années environ. [...] Aux grandes heures de la modernité (Stravinsky, Picasso…), attitude et esthétique allaient de pair dans des œuvres souvent saisissantes. Désormais, soit je choisis l’esthétique moderne (et mon attitude sera alors typiquement anti-moderne, puisque je souscrirai aux canons que mes professeurs ou mes prédécesseurs m’auront imposés), soit je choisis l’attitude moderne (qui entraînera de ma part un rejet de l’esthétique imposée, donc de la modernité, dont il sortira une œuvre littéralement anti-moderne). Si l’on admet que la vraie modernité se doit de conjuguer une attitude et une esthétique qui lui soient entièrement soumises, on est forcé de conclure qu’il est impossible aujourd’hui d’être moderne."
Il a publié le 16 avril 2010 dans le journal Libération une tribune libre où il reprend en les résumant les grandes lignes de l’article pré-cité, en y ajoutant qu’après les expériences artistiques extrêmes du xxe siècle, tout acte artistique est inévitablement un retour :
"[…] les contemporains certifiés conformes sont eux-mêmes, après tout, rétrogrades. L’épopée de l’art, si l’on s’en tient à la vision darwinienne qui lui sert d’histoire officielle, est close. Les Modernes emblématiques ont mis un terme à cette grande aventure qui a exhaussé l’homme au-delà de sa condition première, qui a transfiguré l’artisan modeste qui doute de ses mains en artiste génial qui ne doute pas de son talent, qui a offert à nos sens tous les degrés possibles de la contemplation, de Lascaux à la toile blanche, du plain-chant au silence de Cage, de la sculpture antique à l’urinoir. En un mot : de l’œuvre sans signature à la signature sans œuvre. Le summum du moderne ayant été atteint, écrire après, quoiqu’il arrive, c’est "revenir". Comment s’étonner dès lors que l’on plaide pour une remise en cause radicale des dogmes vingtiémistes plutôt que pour leur perpétuation sous une forme édulcorée ? "
De 2012 à 2015 Jérôme Ducros fut l'objet de polémiques relatives à ses prises de positions au Collège de France concernant son opposition à l'atonalisme et le retour inéluctable à la tonalité. (voir l'article sur Wikipedia, qui pourrait faire l'objet d'une discussion sur le forum).