Pelle GUDMUNDSEN-HOLMGREEN, né en 1932

J'ai découvert la musique de Pelle Gudmundsen-Holmgreen sous l'enthousiasme pour celle d'un autre compositeur danois, Per Norgard, et plus précisément grâce à son oeuvre Symphony-Antiphony qui reçut le Prix  de Musique du Conseil Nordique en 1980. Cette oeuvre a beaucoup contribué à mon appréciation de la musique dite "moderne" et occupe une bonne place dans mon panthéon personnel. Disons qu'elle symbolise une approche contemporaine intelligible et attractive, qu'elle est le genre de pièce moderne que j'aimerais aussi redécouvrir dans l'ambiance d'un concert. Suite à l'effet positif que put avoir sur moi une telle oeuvre, il était compréhensible que je me tourne vers d'autres opus du compositeur, ce que je fis avec For cello and Orchestra (1994-96), Frère Jacques (1964), Concerto Grosso for string quartet and symphonic ensemble (1990), mais, dans aucun des trois, je n'ai trouvé l'heureuse alchimie sonore qui parcourt sa Symphony-Antiphony. Pelle Gudmundsen-Holmgreen est un compositeur danois qui est né le 21 Novembre 1932. Son père, Jørgen Gudmundsen-Holmgreen, était sculpteur. Pendant quelques années, le jeune Pelle travailla au Théâtre Royal en tant que technicien, et plus tard, il deviendra professeur à la "Royal Academy of Music" à Aarhus de 1967 à 1973 , mais autrement, il a vécu sur son revenu de compositeur. A plusieurs reprises, il fut, entre 1974 et 1997, membre de la Fondation des Arts Danois.

Pelle Gudmundsen-Holmgreen a étudié à la "Royal Danish Academy of Music" . Il fit ses débuts comme compositeur en 1955 et ses premières œuvres subirent indubitablement l'influence de compositeurs emblématiques tels que Nielsen , Vagn Holmboe , Bela Bartok et Stravinsky . Depuis environ 1960 , il se sent attiré au même titre que, par exemple, Per Nørgård et Ib Nørholm par le "Darmstadt sériel" de Pierre Boulez , Karlheinz Stockhausen et György Ligeti . Cependant, durant ces mêmes années 1960, il se débarrassa des techniques sérielles en faveur d'une « nouvelle simplicité ». Sa musique se caractérisa alors par la répétition, pas dans une optique réellement minimaliste, mais sous la forme d'un processus répétitif singulier. Je pense que des oeuvres telles que For cello and Orchestra, Concerto Grosso répondent à cette recherche. Parmi les nombreuses influences que l'on peut déceler dans sa musique, il y a la musique baroque , la musique pygmée, le jazz, le chant grégorien , la musique folklorique de la Grèce et de l'Espagne , les sons de la vie quotidienne. Il a aussi été inspiré par l'art américain, la pop art , John Cage et Edgard Varèse, par l'artiste visuel Robert Rauschenberg. Pelle Gudmundsen-Holmgreen s'est défini lui-même un petit joueur dans la musique danoise - un étranger - mais comme en témoignent les nombreux prix qu'il reçut, il est en fait une vedette dans la composition musicale de la seconde moitié du XXème siècle.

Même si les dernières oeuvres écoutées de Gudmundsen-Holmgreen m'ont laissé circonspect ou dubitatif, la réussite de sa SYMPHONY-ANTIPHONY encore en mémoire, je me suis laissé tenter par ses PLATEAUX POUR PIANO ET ORCHESTRE. J'ai hâte de les écouter, désormais.

Les Plateaux pour piano et orchestre m'ont bien emballé lors de cette première écoute. Je ne saurai dire pour l'instant si je vois cette oeuvre comme un grand concerto pour piano et orchestre même si certains éléments m'y font nettement penser. J'ai adoré les contrastes de couleurs et de climats qui la caractérisent; par exemple, le contraste entre certains paysages sonores particulièrement brutaux et corrosifs et d'autres plus clairsemés, plus minimalistes. L'oeuvre se divise en 9 parties, appelons-les Plateaux comme le désigne son titre: I Brut, II Simple - presque rien, III Murmure, IV Brut, V Brut, VI Sombre - simple, VII Murmure dans la boue, VIII Composition, IX En majeur. Le contraste s'effectue déjà par la brutalité et modernité de langage du premier plateau et le tout dernier "En majeur", magnifique celui-là, opposant à lui-seul un piano quasi-mozartien à un complexe harmonique aussi singulier que personnel. Le plateau VIII "Composition" qui est aussi le plus long, est sans doute le sommet de l'oeuvre. A noter un autre met succulent sous le titre de "Sombre - simple" VI qui caractérise bien, selon moi, le concept esthétique de la partition: Le piano, sous les doigts de Juho Pohjonen, dessine une sorte de thème (ou sonate) de forme classique alors que les éléments de l'orchestre, dans les tons graves et menaçants, entourent la douce et imperturbable mélodie de leurs dissonants accords. Cela crée un fabuleux contraste entre l'orchestre menaçant et le piano "inoffensif", un contraste qui offre à cette musique un caractère dramatique et irrésistible.

Une nouvelle écoute des Plateaux pour piano et orchestre de Pelle Gudmundsen-Holmgreen n'a fait que valider le bel enthousiasme qui transpire de mon précédent commentaire, posté juste avant celui-ci. Les passages qui me fascinent le plus sont toujours les mêmes; l'avant-dernier, intitulé "Composition", est magnifique dans ses orchestrations et pour un développement aussi original qu'onirique. Du "Moderne" comme j'aime et ne me lasserai sans (aucun) doute jamais.