Dominique PRESCHEZ, né en 1954

Le compositeur Dominique Preschez, né en 1954 à Sainte-Adresse, en Normandie, a poursuivi ses études musicales à la Schola Cantorum, à Paris, dont il est lauréat. Les enseignements reçus entre 1968 et 1972; de Jean Langlais, à l'orgue; de Germaine Tailleferre, en harmonie et au piano ; de Yvonnes Desportes, en contrepoint et fugue, et de Michel Guiomar, en musicologie, l'ont finalement conduit à travailler la composition avec Henri Sauguet. S'étant livré à l'expression littéraire jusqu'à l'âge de 35 ans, il a notamment publié douze ouvrage - romans, poésies, essais et théâtres - Il obtenu alors le Premier Prix Jean-Jouve, pour l'ensemble de son oeuvre. Il est Chevalier des Arts et des Lettres. Depuis 1994, il se consacre à la composition et à l'orgue - titulaire du grand-orgue de Saint-Augustin de Deauville - et a donné en France et ailleurs pas loin de 900 concerts en tant qu'interprète et d'improvisateur.

Son oeuvre de compositeur illustre cette identité, toute française, d'une esthétique lyrique et atypique, rendue fluïde, voire expressionniste, par l'évolution d'artisan solitaire qu'il demeure, imprégné des évolutions contemporaines du langage musical qu'il ne cesse pas de découvrir. Ses préférences vont de Charles Ives, Edgar Varese, Bela Bartok, André Jolivet....Il considère Arthur Honegger et Frank Martin comme de très grands compositeurs.

<<Ces musiques que je crée agissent , à l'échelle de mon quotidien, comme des soleils, mais des soleils nés d'une combustion interne...des soleils charbonneux.>> Dominique Preschez.


INTERVIEW:

Dominique Preschez, qui vous a fait naître à la composition?

__A l'âge de douze ans, au Havre, j'ai découvert la musique d'ARTHUR HONEGGER par la Danse des Morts, et plus tard, toutes les autres collaborations Honegger/Claudel...Ce fut marquant pour moi. Par la suite, au fil des écoutes, je me suis approprié différents héritages; l'héritage helvétique, par exemple, à travers un compositeur que je place au plus haut rang, FRANK MARTIN. Il était un alchimiste (au sens où l'on entendait l'alchimie au temps de Paracelse, dans l'esprit de la quête de la rose primordiale, un peu dans la lignée, littéraire, de Borges et la Bibliothèque de Babel), il a fait partie de ceux qui ont tenté de trouver cette union, cette osmose, cette symbiose entre tous les arts, entre le mot, la musique, la couleur, la forme, qui ont recherché une correspondance et une confusion des arts et des sens. Avec l'esthétique prônée par FRANK MARTIN, grâce à l'extraordinaire rigueur dialectique dont il fait preuve dans l'utilisation de contrepoints, de modes, on est arrivé à un naturel qui, en chaque oeuvre, renouvelle le discours. Je tends vers cette conception, mais, à l'encontre d'ARTHUR HONEGGER et de FRANK MARTIN, j'aime les pièces courtes et inachevées. Aussi, je ne revisite jamais une partition que j'ai écrite: pour cela, je m'inscris davantage, par ma promptitude, dans la production musicale d'un CHARLES IVES, dont mon oreille est farcie depuis que je suis jeune.

__J'aime également me rapprocher de DARIUS MILHAUD, pas le "Milhaud" "ensoleillé" mais celui des premières oeuvres et des quatuors, celui de "L'Homme et son désir" surtout, le "Milhaud" polytonal et polyrythmique. Plus directement, j'ai la chance d'avoir travaillé avec HENRI SAUGUET puis, quelques années plus tard, quelqu'un comme JEAN-LOUIS FLORENTZ m'a ouvert à d'autres compositeurs. Pour exprimer mes goûts, disons que EDGAR VARESE et ANDRE JOLIVET m'enchantent plus que OLIVIER MESSIAEN,
que IGOR STRAVINSKY et BELA BARTOK sont des compositeurs dont j'ai besoin. Beaucoup d'autres compositeurs plus jeunes, récents, surtout étrangers, m'émeuvent. Cela dit, en tant que compositeur, outre ces héritages, je cherche personnellement à anticiper le hasard et à poser, au fil de mes oeuvres, des implants creux, des caisses de résonance annonciatrices d'un "à venir".__

Liste incomplète et provisoire:

___SPONTASMES - Symphonie n°1
___TROIS FABLES EN UNE - Symphonie N°2 pour soprano et orchestre
___DEAUVILLE SYMPHONIE pour orchestre, avec orgue et soprano (N°3)
___L'ABBATIALE DES ANGES - concerto pour piano et orchestre
___LILY CONCERTO pour harpe et cordes (ou orgue)
___QUATUOR A CORDES "Nomade"
___TRIO I
___TRIO II
___QUINTETTE I
___QUINTETTE II
___PASSION A VISAGE D'HOMME pour soprano et orchestre.
___LUNA PARK pour violon et cordes
___SANTA MARIA pour orchestre de chambre
___LE NAUFRAGE DU DEUTSCHLAND pour piano
___3 EAUX FORTES pour 2 hautbois, 2 clarinettes, 2 bassons, 2 cors, harpe et contrebasse
___TUPAC IN MEMORIAM pour récitant et cordes sur un texte de Dominique Preschez
___LA MESSE DES PAROISSES, dite de Saint-Augustin, choeur, solistes, orchestre et orgue
___ADIEU pour douze voix solistes et orgue
___ESCALES ET PAYSAGES pour récitant, piano et orchestre.

( L'oeuvre se divise en neuf parties - quatre sont composées par DOMINIQUE PRESCHEZ; Ouverture marine; Blueslove; D'un sud...l'autre et Paris en noir & blanc. Quatre autres sont composées par THIERRY PELICANT; Comme une scène de bal; Royal Albert-Hall; Bel canto et Moulin Rouge. Le dernier titre; Quatorze juillet...en Abbayes normandes, est co-composé par DOMINIQUE PRESCHEZ et THIERRY PELICANT - L'oeuvre fut enregistrée sur double cd avec et sans récitant.)

Dominique Preschez a également composé trois musiques de films; Le Gâteau, Le Grand Cerf et Un Siècle à Deauville, puis une musique de scène pour La Voix Humaine de JEAN COCTEAU.

J'ai réécouté, ce soir, des oeuvres de Dominique Preschez et certaines employant généreusement les cordes telles que LUNA PARK pour violon et cordes et SANTA MARIA pour orchestre de chambre m'ont agréablement évoqué deux autres compositeurs français que j'apprécie; Antoine Duhamel et Pierre Jansen. C'est un style de cordes que j'aime beaucoup.

Je n'ai rien trouvé sur Youtube qui puisse donner ne serait-ce qu'un aperçu de la musique et du style du compositeur. Ce que je peux dire c'est qu'il fait partie de ces créateurs à cheval entre tradition et modernisme. Je viens d'ailleurs de réécouter ESCALES & PAYSAGES pour piano et orchestre dans sa version sans récitant, et c'est une musique pleine d'éclat et d'exubérance, un jaillissement sonore et lyrique qui respire la vie et l'amour alors que le thème traite de la maladie. L'oeuvre est découpée en neuf parties ou mouvements dont quatre sont composés par le compositeur et chef d'orchestre Thierry Pélicant:

Tu trouveras des informations sur Thierry Pélicant et Frank Martin ici:

https://musiqueclassique.forumpro.fr/t7333-thierry-pelicant?highlight=p%E9licant

https://musiqueclassique.forumpro.fr/t615-frank-martin?highlight=frank+martin

Je viens de découvrir son album No Man's Land qui réunit cinq oeuvres de sa musique de chambre: CIELS pour quintette à cordes, LIGNES DE FUITE pour violon et alto, SONATE DE NEIGE pour piano et violoncelle, D'UN MOUVEMENT D'ARCHERS pour quatuor à cordes et CONCERTO'MINUTES pour orchestre à cordes. C'est plutôt pas mal, d'une belle sensibilité même si ces pièces ne me touchent pas autant que les précédentes que j'ai évoquées sur ce fil. Cependant, j'y reviendrai sûrement plus en détail après de futures écoutes.

Icare a écrit:

Tu trouveras des informations sur Thierry Pélicant et Frank Martin ici:

https://musiqueclassique.forumpro.fr/t7333-thierry-pelicant?highlight=p%E9licant

https://musiqueclassique.forumpro.fr/t615-frank-martin?highlight=frank+martin

merci Icare, c'est intéressant et comme d'habitude d'une découverte on tombe sur une autre et puis ça devient toute une "toile" !

Icare a écrit:

Je viens de découvrir son album No Man's Land qui réunit cinq oeuvres de sa musique de chambre: CIELS pour quintette à cordes, LIGNES DE FUITE pour violon et alto, SONATE DE NEIGE pour piano et violoncelle, D'UN MOUVEMENT D'ARCHERS pour quatuor à cordes et CONCERTO'MINUTES pour orchestre à cordes. C'est plutôt pas mal, d'une belle sensibilité même si ces pièces ne me touchent pas autant que les précédentes que j'ai évoquées sur ce fil. Cependant, j'y reviendrai sûrement plus en détail après de futures écoutes.

Autant dire que mon impression s'est bonifiée lors de cette seconde écoute. J'ai vraiment été séduit par son Quintette à cordes C.I.E.L.S et plus encore par sa SONATE DE NEIGE pour violoncelle et piano qui est vraiment très réussie. Le second mouvement est un régal!  

Icare a écrit:

Icare a écrit:

Je viens de découvrir son album No Man's Land qui réunit cinq oeuvres de sa musique de chambre: CIELS pour quintette à cordes, LIGNES DE FUITE pour violon et alto, SONATE DE NEIGE pour piano et violoncelle, D'UN MOUVEMENT D'ARCHERS pour quatuor à cordes et CONCERTO'MINUTES pour orchestre à cordes. C'est plutôt pas mal, d'une belle sensibilité même si ces pièces ne me touchent pas autant que les précédentes que j'ai évoquées sur ce fil. Cependant, j'y reviendrai sûrement plus en détail après de futures écoutes.

Autant dire que mon impression s'est bonifiée lors de cette seconde écoute. J'ai vraiment été séduit par son Quintette à cordes C.I.E.L.S et plus encore par sa SONATE DE NEIGE pour violoncelle et piano qui est vraiment très réussie. Le second mouvement est un régal!  

Je viens de réécouter aujourd'hui le quintette à cordes C.I.E.L.S et le duo pour alto et violon Lignes de Fuite et, cette fois encore, mon impression se bonifie et se solidifie. Ha! Les cordes et moi, c'est une longue et éternelle histoire d'amour!    

Icare a écrit:

Icare a écrit:

Je viens de découvrir son album No Man's Land qui réunit cinq oeuvres de sa musique de chambre: CIELS pour quintette à cordes, LIGNES DE FUITE pour violon et alto, SONATE DE NEIGE pour piano et violoncelle, D'UN MOUVEMENT D'ARCHERS pour quatuor à cordes et CONCERTO'MINUTES pour orchestre à cordes. C'est plutôt pas mal, d'une belle sensibilité même si ces pièces ne me touchent pas autant que les précédentes que j'ai évoquées sur ce fil. Cependant, j'y reviendrai sûrement plus en détail après de futures écoutes.

Autant dire que mon impression s'est bonifiée lors de cette seconde écoute. J'ai vraiment été séduit par son Quintette à cordes C.I.E.L.S et plus encore par sa SONATE DE NEIGE pour violoncelle et piano qui est vraiment très réussie. Le second mouvement est un régal!  

La Sonate de Neige pour violoncelle et piano est vraiment superbe!! La dernière fois, j'avais surtout focalisé sur le second mouvement, mais cette nouvelle écoute m'a fait prendre conscience de la réussite globale de l'oeuvre et d'un troisième mouvement aussi fameux que le second. Selon moi, cette Sonate de Neige est une pépite!    

___ESCALES ET PAYSAGES pour récitant, piano et orchestre.  

( L'oeuvre se divise en neuf parties - quatre sont composées par DOMINIQUE PRESCHEZ; Ouverture marine; Blueslove; D'un sud...l'autre et Paris en noir & blanc. Quatre autres sont composées par THIERRY PELICANT; Comme une scène de bal; Royal Albert-Hall; Bel canto et Moulin Rouge. Le dernier titre; Quatorze juillet...en Abbayes normandes, est co-composé par DOMINIQUE PRESCHEZ et THIERRY PELICANT - L'oeuvre fut enregistrée sur double cd avec et sans récitant.)

"Escales & Paysages", ainsi se nomme l'évènement musico-théâtral de Dominique Preschez et Thierry Pélicant auquel il eut été inimaginable de ne pas marier la philharmonie en l'accompagnant des cinquante musiciens de l'orchestre symphonique "André Messager" dirigé par Thierry Pélicant auquel s'adjoint le pianiste virtuose Raphaël Drouin. Cette création enchevêtrant la musique et les mots apparaît là comme l'acte testimonial d'une guérison: un vrai témoignage écrit et composé avec le coeur et les tripes comme un étendard de lutte contre l'isolement auquel peut conduire la maladie et la fin de vie, parfois sa conséquence. Goûtons un instant la petite flamme d'une renaissance en écoutant Dominique Preschez nous parler, revivifié de l'improvisation: Celle sûrement qui, inconsciemment, l'a fait revivre dans l'imaginaire et la jouissance créatrice qu'elle exige: "Elle n'est pas un abandon...: il faut qu'elle soit le résumé d'un songe ancien et une ouverture sur l'avenir du langage. Il semble que l'improvisateur, le dormeur éveillé, aille à l'origine du langage musical, à ce point initial où le silence de l'être s'ouvre sur l'humanité du langage.". Y. A. Julien.

Escales & Paysages n'est pas la seule composition musicale qui s'inspire de la maladie, voire de son incurabilité ou au mieux de son éventuelle guérison, puisse-t-elle paraître miraculeuse dans certains cas, même pour les médecins qui estimaient la personne condamnée. De mémoire, dans l'immédiateté du moment où j'écris ces lignes, une autre oeuvre que celle-ci inspirée par la maladie m'est aussitôt revenue à l'esprit - sans doute parce qu'elle m'a marqué et que je lui accorde un intérêt durable - , il s'agit d'une pièce symphonique d'une durée de 74 minutes composée par Alberto Bruni Tedeschi et elle s'intitule Diario - Ultimi Giorni/Journal - Dernières Pages, un récit musical en six épisodes pour orchestre d'une grave maladie de coeur d'issue fatale. pour la petite histoire: une fois l'oeuvre achevée, alors qu'il s'attelait à une autre création plus enjouée, il tomba malade et vécut un an et demi de maladie jusqu'au jour de sa mort, exactement ce qu'il avait prévu dans son ballet; peut-on parler alors d'une oeuvre prémonitoire?

<<Bon courage! Seuls derniers mots du médecin venant à diagnostiquer huit...neuf mois encore à vivre...cependant qu'il referme avec soin la porte de son cabinet, m'adressant ainsi le dernier sourire convenu.>> Il y a de quoi susciter l'imagination de tout compositeur, moi-même redoutant un tel diagnostic, préférant sans doute une mort instantanée à une vie en sursis, même si, parfois, il y a l'espoir que le diagnostic soit mauvais. A quoi pourrait bien ressembler la musique d'un homme qui apprend que ses jours sont désormais comptés, puisse-t-il s'agir de semaines ou de mois? Va-t-elle être triste, désespérée, chargée de fatalité ou, au contraire, joyeuse, tel un grand et beau pied-de-nez offert à la Faucheuse? Sans doute cela depend-il du compositeur, de son état d'esprit, de sa réaction, humaine et artistique, face à cette terrible nouvelle, de son degré de souffrance, s"il perçoit la mort comme une injustice ou comme une délivrance. Dans Escales & Paysages, le titre parle de lui-même: le voyage, l'évasion, vivre chaque émotion à son meilleur niveau, la joie de l'instant, la joie de vivre, la joie de se réveiller chaque matin à un jour nouveau et de se savoir encore vivant...Beaucoup d'impressionnisme dans cette musique, de nostalgie, de choses riantes et lumineuses, radieuses même...des orchestrations très françaises qui m'ont évoqué Arthur Honegger et Maurice Ravel, et, par conséquent, Claude Debussy. Dans le premier extrait, "Ouverture marine", je devine la mer, pas nécessairement La Mer de Debussy, mais pourquoi pas une autre mer, un océan, source d'évasion, aussi bien pour le corps que pour l'esprit, sentiment d'infini, d'au-delà, puis la musique, toujours la musique qui me ferait presque croire que j'ai l'éternité devant moi: une fenêtre sur cet infini et un peu de répit lorsque mon propre temps donne l'illusion de se figer dans le temps... Beaucoup plus loin, je ressens une ambiance de cabaret avec le mythique "Moulin Rouge". Là, j'ai réécouté la version avec récitant, plus tard je réécouterai la version sans le narrateur.

Là, j'ai réécouté la version avec récitant, plus tard je réécouterai la version sans le narrateur.

La version sans récitant permet une totale concentration sur la musique elle-même. J'en oublie les mots, les phrases, les effluves verbales pour n'entendre que des notes de musique, seulement des notes de musique. Sur neuf mouvements:
__Ouverture Marine - Dominique Preschez
__Comme une scène de bal - Thierry Pélicant
__Blueslove - Dominique Preschez
__Royal Albert-Hall - Thierry Pélicant
__D'un sud...l'autre - Dominique Preschez
__Bel canto, pasticchio - Thierry Pélicant
__Paris en noir & blanc - Thierry Pélicant
__Moulin Rouge - Thierry Pélicant
__Quartoze Juillet... en abbayes normandes - Dominique Preschez & Thierry Pélicant



Trois mouvements sont de la composition de Dominique Preschez et cinq de celle de Thierry Pélicant, la dernière étant le résultat d'une co-composition. Il n'y a cependant pas de rupture de style entre les compositions de l'un et de l'autre. Au contraire, j'apprécie une certaine homogénéité dans l'ensemble et vois plutôt cette oeuvre comme un immense concerto pour piano et orchestre, bien qu'en y réfléchissant, je la considère davantage comme une oeuvre pour orchestre avec une grande présence du piano solo qui n'exclut pas la virtuosité. Elle est présente, perceptible, mais sans rudesse et très digeste. Bref, une grande fluidité dans le jeu de Raphaël Drouin favorise un voyage musical plein de vie et d'éclats de vie... Nous sommes vivants! s'entend-il dire, même si c'est parfois aussi discret qu'un murmure, un chuchotement...Ouverture marine... ouverture sur un voyage, sur le voyage de la joie de vivre où "les champs de maïs et les arbres peignent des paysages verts-jaunes de chaque côté du train": C'est la maladie qui doit mourir! Surprise, la musique me semble si différente de la version avec narrateur, alors qu'elle est identique. Brusquement, je l'ai trouvée moins impressionniste mais plus expressionniste, avec un zeste de romantisme...Et il y a les références: que ce soit sous la forme de l'allusion, du pastiche ou de la citation. Je décèle bien une allusion à Ravel dans "D'un sud...à l'autre" et d'autres encore à différents compositeurs. La nostalgie des prestiges musicaux du passé qui habitent tous les grands compositeurs d'aujourd'hui font également partie du voyage et des souvenirs...le fameux piano du grand-père Albert, la Valse de Ravel - D'un sud...l'autre. Dans Escales & Paysages, s'y côtoient la rigueur d'une oeuvre savante, savamment architecturée, et la fantaisie de la musique légère, comme de celle qui peut animer un bal ou le Moulin Rouge. La maladie s'éclipse pendant que la musique sème ses lumières de vie en moi, et comme Dominique Preschez, je me sens vivant, si vivant...

No Man's Land:

__C.I.E.L.S. - trois mouvements pour quintette à cordes, d'après trois peintures:
C.I.E.L.S. I - Le soir: nuage sur le Mont Rigi, vu de Zoug de William Turner (1775-1851)
C.I.E.L.S. II - La plage de Bénerville, marée basse de Eugène Boudin (1824-1898)
C.I.E.L.S. III - La nuit de Caspar David Friedrich (1774-1840)

(Eugène Boudin)

Je ne connaissais aucun de ces trois peintres avant de découvrir cet album de Dominique Preschez. Ces pièces pour quintettes à cordes me sont de plus en plus précieuses, déjà par leur caractère intimiste et passionné. J'y ressens des sentiments, des émotions fragiles, des couleurs en demi-teinte.
Lignes de Fuite - pour violon et alto. Samika Honda & Sylvain Durantel.
Un duo de cordes pas si courant, entre le violon et l'alto, qui me séduit un peu moins que le quintette...mais le jeu subtil en vaut toutefois la chandelle. J'aurais juste voulu toucher la flamme ou l'effleurer. J'ai senti plus de chaleur humaine dans le quintette, comme une braise qui se consume à l'intérieur.
Sonate de Neige, en trois mouvements pour violoncelle et piano, avec Marlène Rivière et Laurent Molines.
C'est l'oeuvre de l'album, sans aucun doute, du moins pour moi. Je l'avais déjà écrit plus en amont: j'en adore les trois mouvements. Sonate de Neige, or c'est un peu le feu sous la neige...un manteau blanc lacéré par les lames acérées d'un feu ardent. La belle expressivité des deux mouvements extrêmes, l'envoûtement par un mouvement central plus lancinant, plus langoureux.
D'un mouvement d'Archets... - troisième quatuor à cordes de Dominique Preschez, composé à la mémoire du violoniste Jean-Pierre Sabouret (1944-2007).
Concerto'Minutes - pour orchestre à cordes. Quelques citations classiques, Paganini, Beethoven..., l'oeuvre divertit, amuse, séduit, visite furtivement diverses esthétiques: clichés romantiques, effets impressionnistes, ponctuations jazziques, fugue sur le Carillon de Wesminster...Une sympathique conclusion pour un album de musique de chambre qui, dans son ensemble, me tient chaud, chaud au coeur...et à l'esprit...un esprit d'ailleurs très français imbibe cette musique. Petite précision pour finir: l'oeuvre qui me reste encore une fois en tête après l'écoute est la Sonate de Neige.

Soleils noirs est l'album par lequel j'avais découvert l'existence de Dominique Preschez et grâce auquel j'ai eu envie d'approfondir son oeuvre. Il faut dire que j'avais aussitôt apprécié son exploration des cordes...Elles me font toujours un peu penser à celles de Pierre Jansen, mais je les trouve plus émouvantes encore chez Preschez. Je pense notamment à Passion à visage d'homme avec la superbe voix de soprano de Caroline Casadesus. Les cordes y sont captivantes et elles ne baissent pas en intensité dramatique dans Luna Park, ni Santa Maria, ni Quatuor nomade qui emploie une formation de cordes bien plus restreinte. Le naufrage du deutschland qui conclut l'album est une pièce pour piano en trois mouvements interprétée par le compositeur lui-même. Je l'aime bien aussi.

Luna Park est un moment d'extase, explique le compositeur, composé en 2005, en mémoire de Pasolini, le Pasolini des derniers instants, celui laissé, gisant, au milieu d'un terrain vague. La musique traduit un décor familier, la foule mais aussi la solitude, puis la pulsation du coeur d'une victime, topos musical, description sonore fascinante qui parcourt l'histoire de la musique depuis la Renaissance.



"Ces musiques que je crée agissent, à l'échelle de mon quotidien, comme des soleils mais des soleils nés d'une combustion interne...des soleils charbonneux." Dominique Preschez

J'ai découvert trois nouvelles oeuvres de Dominique Preschez au travers d'un nouvel album intitulé Mélodies & Concertos:

Concerto da Camera - double concerto de chambre pour guitare, voix, quintette à cordes et timbale. "Adagio/Adagio/Allegro" Sébastien Linéares & Elise Chauvin.
Trois Mélodies - pour soprano et guitare: Elise Chauvin & Sébastien Linéares.
Court-Métrage - Concertino pour accordéon et orchestre: Yannick Rogar, accordéon.
par l'Orchestre André Messager & Ensemble Vinteuil sous une direction de Thierry Pélicant.

Un coup de coeur, sans aucun doute cet album est mon coup de coeur du moment. Il y a eu d'autres beaux moments musicaux durant cette série d'écoutes croisées à trois. Aulis Sallinen et Aubert Lemeland sont aussi de ces compositeurs qui savent composer une musique qui me touche. Mais là, il s'agissait d'inédits qui m'ont fait découvrir une poétique musicale qui m'a beaucoup séduit, ému...

En général, lorsque la musique d'un compositeur que je découvre me plait, je cherche à l'approfondir, dans la mesure où d'autres albums existent sur le marché et que mon intérêt ne s'émousse pas au fil de l'écoute. Il m'arrive parfois de me détourner d'un compositeur sans raison apparente, ou peut-être parce qu'il me surprend moins et que j'ai, pendant ce temps, jeté mon dévolu sur un autre. Souvent c'est pour mieux y revenir plus tard. Que voulez-vous, j'ai mes infidélités!



Ce nouvel album de Dominique Preschez m'a en tout cas donné l'envie de poursuivre l'aventure avec ce compositeur qui aime Frank Martin et Arthur Honegger autant que moi. Quelque-part, il en est un peu l'héritier, non pas que sa musique décalque sur la leur, Preschez a son propre style, sa propre poétique, sa propre personnalité musicale. Que pouvait-il d'ailleurs m'offrir de plus touchant que la combinaison profondément poétique de la guitare et la voix dans son double concerto de chambre, surtout lorsque la soprano ne se met pas au service d'un texte mais, au contraire, se soumet au jeu de la vocalise, est un instrument à part entière. Ca a toujours été dans cet usage-là que j'ai préféré la voix humaine, généralement féminine mais aussi masculine. En revanche, les Trois Mélodies s'appuient sur des textes de Dominique Preschez. J'ai bien aimé aussi. J'étais également heureux de découvrir un nouveau concerto pour accordéon, surtout qu'il m'a beaucoup plu. Il se rajoute brillamment aux quelques autres qui occupent une modeste place sur mes étagères.

Comme je l'avais écrit sur un autre fil, Dominique Preschez fait partie des compositeurs qui, depuis ces dernières années, occupent le plus mes pensées et mes écoutes, et dès qu'un nouvel album apparait, je saisis l'opportunité de découvrir de nouvelles créations sans trop réfléchir, même lorsqu'il s'agit, comme dans le double album Libertate, essentiellement d'improvisations-dédicaces pour orgue seul, seulement quelques-unes pour piano. L'unique interprète est le compositeur lui-même. Bien que l'orgue d'église est un instrument qui me fascine depuis toujours, paradoxalement, j'appréhende les albums entièrement consacrés à cet instrument, surtout non-accompagné comme ici. Même chez J. S. Bach qui est sans aucun doute mon compositeur préféré de tout ce qui est antérieur au vingtième siècle, je me lasse sur la longueur des albums pour orgue seul. Je prenais donc un risque avec un double-album de Dominique Preschez dans lequel l'orgue est omniprésent.

Veni Creator...
Parlando... d'après Gluck
Hymne à la Vierge Marie
Sinfonia en trois mouvements - Comme Gould j'aimerais écrire une fugue - orgue et piano
Poème Symphonique - sur un thème de Thierry Pélicant
Entre le boeuf et l'âne gris - Noël traditionnel
Regina Caeli...
In Paradisum - Plain chant grégorien
Adeste Fideles - Noël traditionnel
Dyptique - d'après Shéhérazade et La Grande Pâque Russe de Rimsky-Korsakov
Vocalise - d'après Rachmaninov
Boléro - d'après Ravel - en trois mouvements - orgue & piano
Choral-Prélude - de J. S. Bach à Debussy - piano



Si j'ai été soumis à quelques moments où j'ai pu trouver l'orgue un peu trop étouffant ou assommant, j'ai globalement été conquis. Ce fut à ma grande surprise car je craignais comme à mon habitude une lassitude sur la longueur, d'autant plus qu'il s'agit d'un double album, qu'il s'agit d'un contemporain qui aurait pu abuser des clusters. Rien de tout cela, j'y ai même découvert, au travers notamment de Parlando, un orgue très mélancolique. Je crois d'ailleurs n'avoir jamais entendu un orgue aussi mélancolique si ce n'est dans certaines musiques de films d'Ennio Morricone. La mélancolie de Parlando m'a même carrément évoqué celle qui domine souvent l'oeuvre d'Astor Piazzolla, c'est pour dire! J'ai adoré ce morceau, ceci-dit, j'ignore pourquoi j'emploie le passé composé: j'adore ce morceau tout simplement. La Sinfonia en trois mouvements, par ses fugues, m'a immédiatement évoqué J. S. Bach et ce n'est que du bonheur pour mon oreille, une musique qui me caresse évidemment dans le sens du poil. De plus, la combinaison orgue & piano qui s'y succèdent fut pour moi une attraction supplémentaire. Je retrouverai cette combinaison piano & Orgue dans une improvisation autour du Boléro de Ravel. Sinon, histoire de citer un autre morceau pour orgue habité d'une douce et touchante mélancolie, il y a Entre le boeuf et l'âne gris; il est la sensible et émouvante conclusion du premier volet. En revanche, c'est le piano qui apportera une conclusion exquise au second volet, entre Bach et Debussy, avec Choral-Prélude.