Giovanni Sgambati (1841-1914)

jdperdirix a écrit:

Je recommande aussi ses symphonies. La première est disponible chez Naxos (avec l'ouverture de Cola di Rienzo). J'espère que la seconde sera bientôt publiée.

Il existe maintenant un CD CPO avec ses deux symphonies, que je suis en train d'écouter :



Voici la n° 1 en ré majeur par le Wurttemberg Philharmonic Orchestra conducted by Ola Rudner.



https://www.youtube.com/watch?v=mmaRl_Xy9IA

I - Allegro vivace, non troppo: 0:00
II - Andante mesto: 9:27
III - Scherzo. Presto: 19:21
IV - Serenata. Andante: 24:43
V - Finale. Allegro con fuoco: 31:28



La Symphonie n ° 1 de Sgambati a été composée entre 1880 et 1881, et a été créée à Rome le 28 mars 1881, dirigée par le propre compositeur, qui a ensuite été récompensé par le roi avec l'Ordre de la Couronne d'Italie. L'œuvre a été très bien accueillie tant par le public que par la critique, étant jouée plusieurs fois par la suite et considérée comme la première grande symphonie italienne. L'œuvre est exceptionnellement divisée en cinq mouvements, au lieu des quatre habituels.

Le premier mouvement est vaguement structuré en forme de sonate. Il commence par un thème principal rythmique coloré, plein de saveur italienne, culminant dans un tutti fort. Un deuxième thème plus lyrique et solennel, dérivé du thème principal, est présenté par les bois et suivi par les cordes. Il n'y a pas de développement formel car les thèmes et les motifs sont continuellement transformés et retravaillés, montrant l'influence de Liszt. Les thèmes réapparaissent d'une toute autre manière, lançant de nouvelles transformations. On ne retrouve pas la récapitulation habituelle des thèmes. La musique semble s'élever dans un grand apogée, avant de s'éteindre dans un passage doucement lyrique. Une coda paisible termine le mouvement.

Le deuxième mouvement est structuré comme un rondo compliqué (A-B-C-B'-A'-D-A''). Il commence sombrement par une figure aux cordes graves. Le hautbois présente un thème principal lyrique d'une grande sobriété, suivi du reste des bois avec beaucoup de chaleur et de tendresse. Un deuxième thème aux allures d'hymne est brillamment exposé par les vents, plein d'espoir et de vitalité. Un thème fantastique apparaît soudain, suivi de délicats dialogues entre les bois, avec l'appui de la harpe. L'hymne est récapitulé par les vents, menant à un point culminant puissant. Le thème principal est ensuite sombrement récapitulé, suivi de brèves réminiscences des thèmes précédents. Soudain, un thème nostalgique et passionné apparaît, avant qu'il ne disparaisse rapidement. Le thème principal est récapitulé, nous conduisant à une coda résignée.

Le troisième mouvement est un scherzo en forme ternaire. Il ouvre un thème syncopé lumineux de saveur italienne. Les bois ornementent efficacement tout en étant soutenus par les cordes. Ensuite, le thème est inversé et les cuivres inclus, donnant une sensation plus lourde, puis suit une valse fluide. Le trio commence par un thème lyrique présenté par les bois, qui rappelle l'ambiance hymnique du deuxième mouvement. Le thème du scherzo est ensuite récapitulé avec une grande variété. Une coda ferme termine le mouvement.

Le quatrième mouvement est une serenata de forme monothématique. Il commence par une simple idée mélodique aux cordes, soutenue par un motif à deux notes qui introduit du mouvement. Les violons présentent un long thème lyrique de caractère italien, qui se développe ensuite calmement. La musique s'élève dans un point culminant lyrique, suivi d'un passage plus mystérieux. Au lieu d'une coda formelle, le mouvement se termine simplement sans résolution.

Le cinquième mouvement est assez librement écrit, ne ressemblant que légèrement à la forme sonate. Il commence par un thème principal triomphal, plein d'énergie et de vitalité. Le deuxième thème est plus calme et plus mélodique, né du principal. Une section andante interrompt soudainement le flux de la musique, offrant un nouveau matériau musical. Une modulation inquiétante, avec des éléments du thème principal, amorce une sorte de développement. Le thème principal réapparaît plus ou moins dans sa forme originale. D'autres développements suivent avec une polyphonie intéressante, jusqu'à ce qu'un crescendo nous mène à une coda finale triomphale.

Voici encore la symphonie n° 2 en mi bémol majeur par les mêmes interprètes



https://www.youtube.com/watch?v=0gf-igdgD0c


I - Andante sostenuto - Agitato: 0:00
II - Scherzo. Allegro vivace assai: 11:59
III - Andante: 19:44
IV - Allegro: 30:47


La Symphonie n°2 de Sgambati est achevée en 1884, suite au grand succès de la première. L'œuvre fut partiellement interprétée l'année suivante par le compositeur au piano, ainsi que quelques autres instruments. Sa première représentation complète n'aura pas lieu avant son service commémoratif en janvier 1915. La partition est complètement oubliée et se perd pour le reste du XXe siècle. Ce n'est qu'en 2003 que les manuscrits ont été redécouverts à Rome, entamant un processus de reconstruction en plus de trois ans. L'œuvre a été interprétée à nouveau en février 2014 par l'Orchestre Symphonique de Rome dirigé par Francesco La Veccia.

Le premier mouvement est écrit sous forme sonate. Il commence par une introduction longue et substantielle, qui s'ouvre sur trois accords forts séparés par des phrases solennelles des cors. Ce matériau est ensuite transmis aux bois soutenus par les cordes, ce qui conduit subtilement à l'allegro principal. Un thème principal romantique et passionné est présenté, qui utilise des éléments entendus dans l'introduction. Le deuxième thème est lyrique et doux, présenté par la clarinette et suivi par les cordes. Après un point culminant, un développement imaginatif commence, montrant l'influence de Liszt et de la musique allemande de l'époque. La récapitulation commence par la reformulation triomphale du thème principal, mais au lieu du second thème, un passage pastoral inattendu car les bois surgissent de nulle part. Le deuxième thème apparaît enfin au bout d'un moment, qui sert de pont vers une coda finale triomphale.

Le deuxième mouvement est un scherzo en forme ternaire. Il commence par un thème rythmique mystérieux pressé par les cordes en pianissimo. Il se développe de manière plus fantastique, car les bois introduisent de superbes couleurs et floraisons. La musique atteint un point culminant imposant. Le trio s'ouvre sur un thème largement lyrique présenté par la flûte, suivi des cors, qui élève la musique dans des apogées éclatantes. Le thème du scherzo est ensuite récapitulé de manière variée. Une coda discrète termine le mouvement

Le troisième mouvement est structuré en forme ternaire. Il commence par un thème principal lyrique en forme de cavatine, plein de sonorités riches et douces, présenté par le cor anglais et les cordes sur un fond de flûtes « scintillantes ». Un sentiment plus ardent est introduit au fur et à mesure que le mouvement progresse. La section centrale commence par une variation du thème qui, bien qu'elle n'offre pas un grand contraste, est pleine de luxuriance, culminant dans un point culminant solennel et radieux. Le thème principal est ensuite récapitulé de manière variée. Une coda paisible termine le mouvement.

Le quatrième mouvement est structuré en forme sonate. Il s'ouvre sur un thème rythmique vigoureux, contrasté par un deuxième thème plus léger et élégant. Le développement est majestueux, contenant une référence au deuxième mouvement de la Symphonie Dante de Liszt, que Sgambati a créée à Rome. Tout au long du mouvement, les compositeurs utilisent alternativement et simultanément des signatures rythmiques simples et composées. Un passage lyrique avec de douces phrases du bois offre un certain contraste, avant que le thème principal ne réapparaisse à la clarinette, menant à un point culminant brillant. Une magnifique coda termine l'ensemble de l'œuvre.

Sgambati a composé une troisième symphonie en 1888, sous-titrée "Epitalamio". Une édition critique par Francesco Attardi et Lorenzo Casati a été publiée par Suvini Zerboni (Milan 2019).
La première audition a eu lieu à Messine le 16 janvier 2022, dirigée par Francesco Attardi. Le premier mouvement Preludio - Adagio cantabile est visible sur youtube

https://youtu.be/Y0FtHd5ps-Y
Un CD est en préparation (remarquer la quantité de microphones) chez Brilliant, avec l'Ouverture Festive et la 2e symphonie.
Le chef Francesco Attardi parle de ce projet dans une interview en italien https://www.facebook.com/pages/category/Musician-band/Giovanni-Sgambati-276540439211522/

Dans la 2e symphonie, il me semble entendre des échos de Berlioz, en particulier dans les 2e et 3e mouvements, à travers Liszt (ce qui ne serait pas surprenant).

Enfant prodige, Giovanni Sgambati jouait du piano en public à l'âge de 6 ans et commençait à composer peu de temps après.

Sa famille vivait à Trevi dans les années 1850 ; il y poursuit des études musicales avant de retourner à Rome, sa ville natale, en 1860 pour des études supérieures à l'Académie Santa Cecilia (qui lui décerne un diplôme en 1866).

Sgambati rencontra Franz Liszt en 1862 et tomba sous le charme de l'ancien maître, devenant un élève et un ami proche. Liszt, pour sa part, a vu en Sgambati une opportunité de préparer un musicien italien talentueux à une carrière dans la musique instrumentale plutôt que dans l'opéra, qui obsédait la plupart des autres Italiens. De son côté, Sgambati promeut la musique de Liszt et celle d'autres étrangers contemporains, non seulement en tant que pianiste mais aussi en tant que chef d'orchestre ; il a dirigé les premières représentations italiennes de la Symphonie Dante de Liszt et une partie de son Christus.

Pendant tout ce temps, Sgambati se faisait un nom sur le circuit international du piano, profitant des occasions sur la route d'entendre de nouvelles œuvres des compositeurs les plus innovants de l'époque, dont Richard Wagner. Sgambati a finalement rencontré Wagner en 1876, et Wagner a été tellement impressionné qu'il a aidé Sgambati à trouver un éditeur pour ses quintettes avec piano.

Sgambati connaissait Anton Rubinstein depuis 1869 et, en 1881, on lui offrit un poste d'enseignant au Conservatoire de Moscou ; ce qu'il a refusé, préférant faire un travail similaire à Rome. En 1869, il avait établi chez lui une école de musique gratuite pour les élèves pauvres ; en 1877, il devint une institution officielle, finalement connue sous le nom de Conservatoire Santa Cecilia (lié mais pas le même que l'Académie, où Sgambati avait étudié). Sgambati y a enseigné pour le reste de sa vie.

Il est à noter que le public italien n'a entendu la Troisième Symphonie de Beethoven qu'en 1867, et c'est Giovanni Sgambati qui a dirigé cette première, comme il l'a fait les premières représentations italiennes de la Septième de Beethoven en 1870.

Les compositions de Sgambati sont assez difficiles à caractériser, mêlant des mélodies italianisantes et cantabiles à des procédés empruntés à Liszt, Chopin, Mendelssohn et Schumann. Beaucoup de ses compositions pour piano sont charmantes mais ressemblent un peu trop à des pièces de salon pour le confort des pianistes et auditeurs les plus exigeants, et il semble se perdre dans les grandes structures de sa musique de chambre et orchestrale. Néanmoins, son Requiem a longtemps été utilisé lors des funérailles italiennes, son Quatuor à cordes en ut mineur était autrefois assez populaire et chaque génération ou presque un pianiste de premier plan est inspiré pour ressusciter le Concerto pour piano de Sgambati.

Quatuor à cordes en ut dièse mineur, op.17 (vers 1882)



https://www.youtube.com/watch?v=2_s1ysnVMTk

I. Adagio – Vivace ma non troppo [00:00]
II. Prestissimo [12:02]
III. Andante sostenuto [15:31]
IV. Allegro [24:24]

La prise de son n'est hélas pas extraordinaire. Quant au piano, quand j'écoute certains passages, c'est à se demander s'il est accordé ou alors la pianiste ne décolle pas le pied de la pédale 
Etrange "qualité" pour un album Brillant Classics