L'amour des trois oranges est à la fois un opéra (op. 33) et une suite (op. 33a), cette dernière étant incontestablement plus connue que l’œuvre originelle. Ces deux œuvres correspondent à la période «américaine» de Sergueï Prokofiev.
L'opéra op.33
L’ouvrage est structuré en un prologue et quatre actes composé en 1919 sur un livret écrit à partir du drame L'amore delle tre melarance que Carlo Gozzi a écrit en 1761. Le livret existe en deux versions: une en russe et une en français, traduite du russe par Prokofiev lui-même.
Le drame lui-même est basé sur le conte fantastique « L'Amour des Trois Oranges » de Giambattista Basile. L'Amour des trois oranges est l'opéra le plus représenté de Prokofiev. Le célèbre et révolutionnaire metteur en scène Vsevolod Meyerhold avait découvert la pièce de Gozzi grâce à Apollinaire, et en avait fait le titre de sa revue d'avant-garde. C'est Meyerhold qui a fait découvrir à Prokofiev la pièce de Gozzi.
L'opéra a été créé le 30 décembre 1921 à l'Opéra lyrique de Chicago sous la direction du compositeur lui-même et grâce au soutien de la nouvelle directrice, Mary Garden, la créatrice de Pelléas et Mélisande et de Louise. Le succès public fut grand, mais la critique acerbe, reprochait l'absence de mélodie. L'opéra fut ensuite représenté à Cologne (1925), Berlin, Leningrad (1926), et Moscou (1927). La France dut attendre 1956 pour voir la première représentation de L'Amour des trois oranges.
La Suite op. 33 bis
Réalisée en 1924, soit cinq ans après la composition de l'opéra, cette Suite fut jouée pour la première fois à Paris le 29 novembre 1925, sans grand succès. Mais elle est aujourd'hui célèbre et plus fréquemment représentée au concert que ne l'est l'opéra dans les théâtres lyriques.
L’oeuvre comporte six numéros dont la durée totale d'exécution excède rarement 15 minutes. L’exposé qui suit en propose une description agrémentée d’extraits audio.
1. LES RIDICULES (The Clowns) : début du Prologue de l’opéra, avec son remue-ménage désopilant.
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2. SCÈNE INFERNALE (The Magician and the Witch play cards) : extraite du premier acte. C'est le moment où le magicien Tchelio et la maléfique Fata Morgana jouent aux cartes, entourés d'un essaim de petits diables qui gambadent et gesticulent. Un climat de «magie noire», au début, s'estompe bientôt devant les aspects grotesques de la scène.
http://media.putfile.com/Scene-Infernale
3. MARCHE (March) : en dépit de sa brièveté (1:36), il s'agit du fragment le plus connu de l'opéra. Il sert d'intermède entre les deux tableaux du premier acte, lorsque le Prince malade est amené pour assister aux divertissements qui devraient le guérir. Le rythme est marqué avec une régularité et une sécheresse métronomiques, les timbres des bois et de la trompette prédominent. L’extrait ci-dessous reproduit la partie centrale de la Marche.
http://media.putfile.com/Marche-38
4. SCHERZO (Scherzo) : encore plus bref (1:20), vif et tournoyant, il sépare, au second acte, deux péripéties du voyage du Prince à la recherche des trois Oranges.
http://media.putfile.com/Scherzo
5. LE PRINCE ET LA PRINCESSE (The Prince and the Princess) : c'est l'unique mais magnifique page lyrique de l'opéra, au troisième acte, - où le Prince a trouvé Ninette, l'élue de son cœur. C'est aussi le numéro le plus important de la Suite. Un chef-d'œuvre de tendresse caressante, traduite notamment par les sonorités étoffées des cordes munies de sourdines ainsi que le montre l’extrait ci-dessous.
http://media.putfile.com/PrincePrincesse
6. LA FUITE (The Flight) : dénouement du quatrième acte, tandis que les Méchants sont confondus et s'enfuient, avant de disparaître sous terre; finale enlevé avec énergie et humour. L’extrait ci-dessous révèle un thème très virtuose, notamment au niveau des pupitres de cordes.
http://media.putfile.com/La-Fuite