Karl Aage RASMUSSEN (né en 1947)

Pénétrer un paysage aussi énigmatique que peut l'être, par exemple, une oeuvre symphonique du compositeur danois Karl Aage Rasmussen est toujours une aventure stimulante - je pensais à la Symphony in Time que je viens d'écouter ce soir-même. Au sein d'une architecture sonore complexe et presque labyrinthique tant j'avais l'impression de me perdre dans les méandres d'une voie à multiples rebondissements, je ressentis quelque élan humoristique ci et là, sous les traits furtifs de citations musicales pré-existantes et virevoltant dans un complexe sonore en perpétuel mouvement: La symphonie semble sous l'emprise du temps, jouit-elle alors d'une tension/intensité constante ou quasi-constante maintenant l'audition dans une attention soutenue et permanente. L'oeuvre est pour ainsi dire un bouillonnement continuel, un bouillonnement des sons, un bouillonnement des formes et des rythmes changeants. L'humour est le fantôme comique qui se cache derrière chaque mesure, chaque agrégat sonore, dont on sent l'infinitésimale présence avant de la "voir" pointer un sourire malicieux dans les moments les plus cocasses de la symphonie. Elle possède, selon moi, un sens indubitable de la dérision, ce qui ne la rend pas moins sérieuse pour autant. Il y a un motif qui intervient au moins deux fois dans le premier mouvement (l'Allegro) et qui réapparaît furtivement, comme si le chemin emprunté repassait par le point de départ, dans le quatrième mouvement (Finale). J'aime beaucoup ce motif de quelques notes qui, sans que je sache exactement pourquoi, me parut familier, un clin d'oeil envers quelque chose de réellement enfoui dans un des nombreux tiroirs de ma mémoire ou quelque chose d'inédit mais qui donne cette impression...l'impression d'avoir toujours existé...J'aime bien cette symphonie moderne....

Karl Aage Rasmussen est un compositeur et écrivain danois né le 13 décembre 1947 à Korling au Danemark. (Compléments biographiques à venir)

Prix obtenus:

1987 Hakon Børresen prize
1991 Carl Nielsen prize
1997 Edition Wilhelm Hansen prize
2003 Danish Academy prize

Eléments biographiques

Karl Aage Rasmussen est un compositeur et écrivain danois né à Kolding au Danemark le 13 Décembre 1947. Le collage, en particulier, a joué un rôle important dans sa musique depuis le début des années 70, mais de plus en plus il a utilisé du matériel musical pré-existant sous de nouvelles connexions et de nouvelles fins, le plus souvent dans un montage densément tissé de petites idiomes qui en elles-mêmes étaient trop petites pour être employées comme des citations, mais ont été mises en place si étroitement afin de créer des modèles entièrement nouveaux. Il a continué à utiliser la même technique de montage, mais l'expression non-directionnelle a été progressivement remplacée par d'autres formes de développement . Cela est évident dans la musique pour la scène et a été plus tard significatif dans des œuvres comme "A Symphony in Time", "Solos et Ombres", ainsi que dans les quatuors à cordes.

"Les mouvements sur une ligne se déplaçant"; la symphonie de chambre marque le début d'une longue période dominée par un intérêt dans le temps et le tempo, ici comme une sorte de temps-Voyage où la même musique semble apparaître et disparaître dans différents tempos. De nouvelles conceptions du temps, en partie liées à l'auto-similarité que l'on étudie dans les mathématiques fractales, a dominé sa musique depuis. Au cours des dernières années plusieurs dimensions psychologiques et dramatiques ont vu le jour dans des œuvres telles que le concerto pour violon, «Scherzo white Bells» et «bandes dans un rêve volé».

Depuis plus de deux décennies Rasmussen a travaillé comme professeur titulaire de la composition à l'Académie de Musique à Aarhus, au Danemark. Parmi ses étudiants, figuerent Louis Aguirre Rovira, Kaj Aune, Peter Bruun , Anders Brødsgaard, Karsten utérine, Michael Nyvang, et Simon Steen-Andersen.

Rasmussen est un auteur prolifique de textes , jusqu'ici recueillis en trois volumes. Ses livres sur Glenn Gould , Robert Schumann et Sviatoslav Richter ont atteint un large public. En outre, il a récemment été engagé dans plusieurs grands projets centrés sur la musique de Franz Schubert . Schubert a laissé son opéra inachevé avec seulement les parties esquissées »Sakontala» pour chanteurs. Rasmussen a achevé et orchestré une version performante de l'opéra, créée à Stuttgart courant 2006. Il a également reconstruit ce qu'il croit être de Schubert la symphonie perdue »Gastein» et une version orchestrale du mélodrame de Schubert "Der Taucher" commandée par le chanteur danois Bo Skovhus .

J'ai réécouté sa Symphony In Time et je retrouve le même ressenti décrit dans mon tout premier commentaire. Cette symphonie moderne et originale dans sa construction est une aventure sonore que je viens de revivre avec un même plaisir.

Comme pour Sunleif Rasmussen, je n'ai, jusqu'à ce jour, abordé la musique de Karl Aage Rasmussen que par le biais d'une seule oeuvre: Symphony in Time en quatre mouvements, "Allegro/Adagio/Scherzo/Finale, par le "Danish Radio Symphony Orchestra" sous la direction de Leif Segerstam. Elle est couplée avec une oeuvre qui m'a toujours fasciné de Pelle Gudmundsen-Holmgreen, Symphony-Antiphony, et  je dois avouer qu'elle a fait de l'ombre à la symphonie de Karl Aage Rasmussen que j'ai eu tendance à négliger, bien que les quelques attentions que je lui ai prêtées ne m'ont jamais été décevantes. J'aime bien son caractère tonitruant, ses cuivres dissonants qui déchirent le silence sur des temps qui semblent suspendus. Certes, le changement fut radical avec les symphonies bien tonales d'Illaramendi, mais ça ne m'a pas décontenancé pour autant. J'étais content de retrouver une autre architecture musicale, fondatrice de cette ambiance chaotique aux exhibitions sonores puissantes et furtives qui la traversent sur tous ses flans. Elle m'est surtout admirable par une riche palette de sonorités souvent vives et lumineuses et des constructions ludiques reproduisant  des fragments tonals qui semblent provenir d'un horizon musical lointain, comme autant de danses surgies des flammes du passé. Le troisième mouvement m'inspire vraiment cette idée de fragments tonals qui veulent s'inscrire dans les chahuts d'un univers en ébullition, apportant au chaos une dimension festive improbable.

<<Des concepts tels que la «musique sur la musique» ou la «musique sur la musique» sont les clés de ses œuvres des années 70, car il a souvent utilisé du matériel musical préexistant dans de nouvelles connexions et à de nouvelles fins, non pas comme collage ou citation, mais dans un montage tissé d'idiomes de langues musicales très différentes. La technique du montage caractérise également la dernière musique de Rasmussen, mais l'expression non directionnelle a été remplacée par un intérêt accru pour la forme et le développement. Ses œuvres musico-dramatiques sont parmi les premières expressions de cet intérêt, qui a ensuite été poursuivi dans des œuvres telles que 'A Symphony in Time' et les quatuors à cordes 'Solos and Shadows' et 'Surrounded by Scales'.>>