Sources : recherches personnelles, site 'Forum Opéra' et livret du CD EMI "Attila" – Riccardo Muti – Scala
Attila (1846) se situe dans la première partie des opéras écrits par Verdi :
Nabucco (1842) –
Ernani (1844) –
Jérusalem(1847) et est de la même veine : chœurs grandioses, solos de haute voltige et chants à plusieurs voix héroïques. Les voix sont mises à l'honneur tandis que la dramaturgie est peu fouillée. C'est avec
Macbeth (1847) et
Luisa Miller (1849) que Verdi va structurer ses œuvres de manière plus dramatique et donner à l'orchestre un rôle plus prépondérant…
Rigoletto (1851),
Trouvère (1853) et
Traviata (1853) vont définitivement tourner Verdi vers un registre où intrigue dramatique et univers musical ne feront plus qu'un !
L'œuvre de Verdi peut se diviser grosso modo en trois périodes, la première étant ce qu'il a nommé lui-même ses " années de galère ", qui commence avec Oberto en 1839 et se termine avec Stiffelio en 1850.
Galère, galère…c'est un peu vite dit…tout n'est pas rose dans la vie musicale du jeune Verdi, de sa vingt-sixième à sa trente-septième année, il y eut quelques fiascos (un giorno di regno ne tint qu'une soirée), beaucoup de travail (quatorze opéras en dix ans, c'est beaucoup, mais c'est bien moins que la moyenne de la production de Donizetti), mais aussi des succès (deux mois après sa création, Ernani est mis à l'affiche de plus de vingt théâtres), et même des triomphes (Nabucco). Pendant ces années, Verdi devient le plus connu des compositeurs italiens vivants, une figure de l'identité nationale, l'emblème du patriotisme et de l'aspiration à l'unité italienne.
Un certain doute subsiste sur la date à laquelle le musicien a manifesté pour la première fois son intérêt pour cet
Attila. Avril 1844 ou avril 1845, quelque soit la date retenue, tout commence par une lettre de Verdi à Piave. … Ce premier projet n'aura pas de suite et Piave se consacrera au livret de
I due Foscari d'après le drame de Byron.
Attila réapparaît lors d'une commande officielle de la "Présidence du Théâtre de la Fenice qui veut programmer pour le printemps 1846 tout à la fois un nouvel opéra de Verdi et une reprise d'
Ernani dont le succès ne s'est jamais démenti.
Piave cède le pas à Solera qui est resté pour Verdi l'homme de
Nabucco et des premiers succès milanais. Solera ne terminera pas son ouvrage : nommé conseiller intime de la reine Isabelle d'Espagne, il mettra tant de cœur à se nouvelles fonctions qu'il en oubliera les engagements pris auprès de Verdi. C'est à Piave qu'il appartiendra de mettre la dernière main au livret.
… Malgré ces difficultés initiales, le livret d'
Attila présente des qualités réelles : simplicité, découpage précis, personnages dessinés de main ferme. Toutefois, un certain manque d'unité apparaît dans le dessin d'ensemble, conséquence directe du changement de librettiste.
… Parmi les opéras des "années de galère",
Attila mérite une place à part. Opéra à sujet politique, il ne présente pas le caractère glorieusement patriotique du
Nabucco ou des
Lombards. Le chœur, figure idéale du peuple n'y est pas aussi présent ; malgré son enthousiasme pour le texte de Werner (poète allemand, auteur du livret initial), il semble que Verdi ait un moment envisagé de se passer complètement d'un personnage collectif assez encombrant, dont il pensait avoir tiré, dans ses opéras précédents, tout le parti possible. Dans
Attila, le chœur n'est jamais qu'un témoin de l'action ; c'est tout normalement qu'il s'exprime de façon simple et homophonique. Son utilité reste grande, mais elle n'est plus de même nature. Dans la liste de protagonistes, il a perdu la première place qui revient à des personnages individualisés, tels Odabella, Attila ou Ezio. De leur côté, ceux-ci présentent une vitalité et une énergie psychologique qui faisait entièrement défaut aux héros des tout premiers opéras verdiens. … L'œuvre marque un progrès technique certain sur celles qui l'ont précédée. Verdi y continue une démarche qui l'éloigne définitivement du bel-canto à la Donizetti. Arias moins ornés, plus courts et plus tendus, soumis à l'impératif de l'expression dramatique ; suppression des traits inutiles, à l'orchestre comme pour les voix ; le maître cherche sa fortune dans la simplicité.
… A la première représentation,
Attila a été tièdement reçu, faux-semblant d'échec qui marquera au cours des temps de nombreuses premières verdiennes. Dès la seconde représentation, le public a réagi avec passion, faisant au maître une conduite triomphale jusqu'à son hôtel, déchirant Venise endormie du son des fanfares, de la lueur des torches, de vivats et de chants enthousiastes.