Bernard Foccroulle (né en 1953)

Bernard Foccroulle, né le 23 novembre 1953 à Liège, est un organiste, compositeur et directeur d'opéra belge.

Bernard Foccroulle est issu d'une famille mélomane dans laquelle sa mère joue du piano et ses frères et sœurs font également de la musique. Il commence l'orgue à l'âge de 12 ans puis étudie avec Hubert Schoonbroodt au conservatoire de sa ville natale de Liège. D'autres études suivirent avec Xavier Darasse et Gustav Leonhardt.

Il entame une carrière internationale d’organiste dès le milieu des années 1970, interprétant un vaste répertoire allant de la Renaissance à l’époque contemporaine. Il donne plusieurs dizaines de créations mondiales de compositeurs tels que Philippe Boesmans, Brian Ferneyhough, Betsy Jolas, Xavier Darasse, Jonathan Harvey, Pascal Dusapin.
Sa popularité augmente après avoir été invité au festival de Royan. L'enregistrement de l'œuvre complète pour orgue de Jean-Sébastien Bach sur divers orgues historiques sur 18 CD l'a fait connaître au-delà des frontières de son pays d'origine.

Dans les années 1988, il participe au Ricercar Consort et enregistre la Messe pour le Port-Royal H.5 et le Magnificat H.81 de Marc-Antoine Charpentier. il se consacre notamment à la musique baroque allemande. Ces dernières années, il se produit régulièrement en concert avec des chanteurs ainsi qu’avec le virtuose du cornet à bouquin Jean Tubéry.

Plus récemment, il multiplie les projets multidisciplinaires associant l’orgue à la danse (créations chorégraphiques de Jan Fabre et Salvador Sanchis) ou la vidéo (création de Lynette Wallworth en 2014).

Sa discographie en soliste comporte une quarantaine d’enregistrements sur CD. Il a notamment enregistré chez Ricercar l’intégrale de l’œuvre d’orgue de J.S. Bach, de Dietrich Buxtehude, de Nicolas de Grigny et de Mathias Weckmann en sélectionnant soigneusement les plus beaux instruments historiques préservés. Ses enregistrements ont remporté de nombreux prix.

Egalement claveciniste, il enregistre en 1987 avec Henri Ledroit et le Ricercar Consort, Orphée descendant aux enfers H.471, Stances du Cid H.457, H.458, H.459, Tristes déserts H.469, Ah! qu'on est malheureux H.443, Amour vous avez beau redoubler mes alarmes H.445, Rendez moi mes plaisirs H.463, Auprès du feu H.446, Le bavolet H.499a, Epitaphium Carpentarii H.474 de Marc-Antoine Charpentier. Ricercar.

En 1992, il succède à Gerard Mortier au poste de directeur du Théâtre royal de la Monnaie à Bruxelles, fonction qu’il occupe jusqu’en 2007.

Il y invite successivement comme directeur musical Antonio Pappano et Kazushi Ono, aborde un vaste répertoire allant de Monteverdi aux œuvres contemporaines. Il y accueille de grands metteurs en scène (Luc Bondy, Robert Wilson, Klaus Michael Grüber, Robert Lepage, Willy Decker, Richard Jones), commande et crée de nombreux opéras, multiplie les résidences d’artistes (Anne Teresa De Keermaeker, Philippe Boesmans, Fabrizio Cassol) et ouvre l’opéra aux disciplines artistiques les plus diverses et les plus contemporaines.

En janvier 2007, il succède à Stéphane Lissner au poste de directeur général du Festival international d'art lyrique d'Aix-en-Provence.

Il y invite les plus grands metteurs en scène (Patrice Chéreau, Peter Sellars, Robert Carsen, Dimitri Tcherniakov, Katie Mitchell), des chefs d’orchestre de renommée mondiale (Sir Colin Davis, Sir Simon Rattle, William Christie, Esa-Pekka Salonen), les figures montantes de la nouvelle génération (Leonardo Garcìa Alarcón, Jérémie Rohrer, Raphaël Pichon) et de prestigieux ensembles en résidence (Berliner Philharmoniker, London Symphony Orchestra, Freiburger Barock Orchester, Orchestre de Paris).

Il accorde une place privilégiée à la création en donnant régulièrement des premières mondiales, telles que Written on Skin (2012) de George Benjamin et Pinocchio (2017) de Philippe Boesmans.

Il renforce l’ancrage local du Festival en le dotant d’un service éducatif et d’un service socio-artistique qui mènent de nombreuses actions de sensibilisation et de pratiques artistiques auprès des écoles et des associations de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Attaché à la formation et l’accompagnement des jeunes chanteurs, musiciens et créateurs, il développe l’Académie du Festival d’Aix3 et crée en 2011 le réseau européen enoa (European Network of Opera Academies) pour soutenir la formation des jeunes artistes et la circulation des œuvres musicales en Europe.

Il ouvre également le Festival d’Aix à d’autres traditions musicales, notamment celles issues du monde méditerranéen.

En décembre 2015, il annonce son départ du Festival d’Aix à la fin de son mandat actuel, prévue en septembre 2018, pour se consacrer à la composition et à sa carrière d’organiste.

Sous sa direction, le Festival d'Aix est nommé Ambassadeur culturel européen par la Commission européenne en 2013 et reçoit le Prix du Meilleur Festival lors des International Opera Awards de 2014.


Enseignement

De 1976 à 1990, il enseigne l’analyse musicale au Conservatoire de Liège. Durant une décennie, de 2009 à 2019, il est professeur d’orgue au Conservatoire Royal de Musique de Bruxelles.


Engagements

Au cours de sa carrière, Bernard Foccroulle s’est engagé à plusieurs reprises en faveur d’une plus grande accessibilité de tous. En 1993, il fonde l’association Culture et Démocratie qui milite pour la participation du plus grand nombre à la vie culturelle. En 1998, il crée le réseau européen RESEO, voué à la sensibilisation à l’opéra et à la danse.


Œuvres

Ses compositions sont principalement destinées à l’orgue ou à la voix accompagnée de l’orchestre ou d’un ensemble instrumental. Rilke, Verlaine (Quatre mélodies d'après Verlaine), De Luca et Dante ont inspiré plusieurs cycles de mélodies et de pièces instrumentales.


Pièces vocales

Cycle Rilke (2005-2011) :
Am Rande der Nacht I, Sieben Lieder nach Rilke für Sopran, Chor und Orchester, 2007,
Am Rande der Nacht II, Sechs Lieder nach Rilke für Sopran und Orchester, 2010 (éditions Ricordi),
Wer du auch seist, Vier Lieder nach Rilke für Sopran und Klaviertrio, 2009,
Ich soll silbern erzittern, Solo für Altflöte, 2011,
Wie ein Wort das noch im Schweigen reift, Solo für Cello, 2011 ;
Quatre Mélodies d’après Verlaine pour voix (soprano) et piano, 2011 ;
Nigra sum, pour soprano, cornetto et orgue (2012) ;
« Due », Cinq pièces sur des poèmes d’Erri De Luca, pour baryton et ensemble instrumental (2013) ;
E vidi quattro stelle (d’après le Purgatoire de Dante) pour soprano, baryton, cornetto, trois trombones/sacqueboutes, harpe et orgue (2017) (Éditions Henri Lemoine, Paris).
Cassandra, opéra (2023) création à la Monnaie en octobre 2023


Pièces instrumentales

Cinq pièces pour viole de gambe (1982) ;
Deux mouvements pour deux violes de gambe (1984) ;
Gestes, pour 5 percussionnistes et instruments à vent (1985)
Tiento de diversos modes, 1982
Ricercar pour traverso, violon et viole de gambe (1991).


Œuvres pour orgue

Sinfonien pour orgue, cloches et percussions (1984) ;
Capriccio sopra re-fa-mi-sol , 1986 (pour orgue italien ou français) ;
Toccata, 2001 (pour un grand orgue nordique) ;
Spiegel, 2005 (pour orgue de style Renaissance, Éditions Doblinger) ;
Kolorierte Flöten, 2007 (pour orgue baroque de style thuringien) ;
O quam tu pulchra es, 2009 (pour orgue français) ;
E più corusco il sole, 2016 (commande de Radio-France, 2016).

Toutes ces pièces – sauf Spiegel - sont éditées chez Henri Lemoine (Paris)


Autres pièces

Resonance (pour orgue et orgue électronique), 1976
Acousmie (pour orgue et synthétiseur), 1980
Tiento de diversos modes, 1982
Sinforuen (pour orgue, cloches et percussions), 1984
Capriccio, 1986


Ecrits

En avant la musique (1978)
L'Oeuvre de Philippe Boesmans (1983)





https://www.youtube.com/watch?v=WaM2yzlLiY4

Capriccio sopra re-fa-mi-sol

Bernard Foccroulle


« En tant qu'organiste, j'ai bien souvent été frappé par la beauté exceptionnelle des orgues historiques dont la personnalité très prononcée contraste souvent fortement avec les instruments standardisés construits au XXe siècle.

Cependant, certains de ces instruments anciens imposent de telles contraintes (étendue réduite du ou des claviers, orgue à pédales limité ou inexistant, tempérament inégal, composition des jeux assez limitée, etc.) qu'ils n'autorisent qu'un répertoire très spécifique.

La plupart des œuvres composées au XXe siècle sont tout simplement injouables sur ces instruments. C'est pourquoi certains organistes et compositeurs ont commencé, dans les années 1980, à générer une littérature contemporaine prenant en compte les contraintes et les spécificités offrant de splendides témoignages du passé.

Capriccio sopra re-fa-mi-sol fut la première pièce de ce cycle. Par la suite, j’ai écrit d’autres pièces pour instruments historiques, en choisissant presque toujours un compositeur ancien comme point de référence. Dans leur ensemble, ces compositions offrent un regard contemporain sur la musique d’orgue et la facture d’orgues en Europe depuis la Renaissance.

Bernard Focroulle

https://youtu.be/rVd14ER_Gt0?si=688KL_2o_tuyILzl

L'interprétation de Bernard Foccroulle de cette œuvre est considérée comme l'une des plus remarquables. Il est connu pour son style expressif et passionné, qui met en valeur la beauté et la puissance de la musique de Buxtehude.

La création du journal d'Hélène:

Propos de Foccroulle rapportés par Joachim.
« En tant qu'organiste, j'ai bien souvent été frappé par la beauté exceptionnelle des orgues historiques dont la personnalité très prononcée contraste souvent fortement avec les instruments standardisés construits au XXe siècle."


L'orgue du XXe siècle a toujours aujourd'hui et encore mauvaise presse dans le milieu organistique en particulier mais pas seulement. Il est vrai qu'avoir voulu réunir en un seul instrument les caractéristiques sonores de plusieurs siècles de facture (baroque allemand, classique français, romantique, etc.) afin de jouer tous les compositeurs en respectant à la lettre le style propre à chacun relève de la gageure et c'est ce qu'on a voulu faire au XXe siècle. Il a fallu faire cohabiter dans un orgue des éléments de facture tellement contradictoires que leur association tenait du mariage de la carpe et du lapin, au risque inévitable de rogner le caractère propre à chaque jeu (groupe de tuyaux défini par un timbre particulier) afin d'obtenir un ensemble homogène. Résultat: des instruments de fait peu typés et impersonnels, paradigmes de "l'orgue à tout jouer".

Néanmoins, grâce à ce discours (ou plutôt à cause) un peu manichéen malgré tout et relayé par le lobby musicologique, effet de mode oblige pour tenter de façon tout aussi illusoire voire malhonnête de restituer la "vérité historique", on a construit nombre d'instruments à partir de la deuxième moitié du XXe siècle, pâles ersatz et copies d'instruments anciens, afin de pouvoir jouer, par exemple, Jean Sébastien Bach comme on "pouvait l'entendre à l'époque" (sic!). Car, comme le disait ironiquement Jean Guillou, le grand organiste de Saint Eustache décédé en 2019, "Afin de concevoir un orgue baroque à notre époque, il faudrait aussi penser "baroque", manger "baroque", dormir "baroque", etc."   

Il existe, quoi qu'en dise Monsieur Foccroulle, un certain nombre d'instruments magnifiques du XXe siècle (ou relevés au XXe siècle en y intégrant des éléments de facture contemporaine) dont les facteurs ont su habilement concilier des éléments a priori disparates afin de pouvoir interpréter de façon convaincante de nombreux compositeurs de style et époques différents sans chercher à tout prix une authenticité fantasmée. Je citerai en vrac Victor Gonzales pour les orgues de Bailleul (Nord), Oratoire du Louvre (Paris), Saint Gervais-Saint Protais (Soissons), Kleuker-Steinmeyer de la Tonhalle à Zürich (malheureusement déplacé aujourd'hui), Thierry-Cavaillé-Coll-Boisseau à Notre Dame de Paris (avant une restauration calamiteuse de 1992 et celles qui ont suivi), Kleuker (orgue de l'église du Chant d'Oiseau à Bruxelles), Van den Heuvel à Saint-Eustache (Paris), etc, etc.

J'avoue que ces propos énoncés sans nuance aucune, que ce soit par Monsieur Foccroulle et tant d'autres, ont tendance à m'agacer un petit peu!

Bien d'accord avec alucard!

Toujours Bernard Foccroulle:

"Cependant, certains de ces instruments anciens imposent de telles contraintes (étendue réduite du ou des claviers, orgue à pédales limité ou inexistant, tempérament inégal, composition des jeux assez limitée, etc.) qu'ils n'autorisent qu'un répertoire très spécifique"


Ah! quand-même!
Mais il se rattrape bien quand il affirme après:

"La plupart des œuvres composées au XXe siècle sont tout simplement injouables sur ces instruments. C'est pourquoi certains organistes et compositeurs ont commencé, dans les années 1980, à générer une littérature contemporaine prenant en compte les contraintes et les spécificités offrant de splendides témoignages du passé"

En somme, contrairement aux siècles précédents où on a toujours cherché à trouver des moyens d'expression en adéquation avec les innovations technologiques de l'époque - je pense par exemple à Franck, Widor, Vierne qui ont pensé leurs oeuvres en fonction du nouvel "orgue orchestre" de Cavaillé-Coll - là on fait exactement l'inverse! Décidément, on marche sur la tête!

Je ne me permettrais pas de juger cette "littérature contemporaine" dont Foccroulle parle et que je n'ai jamais entendue de toute façon; mais c'est quand-même la démarche qui  pose question.

Dans sa musique propre, Foccroulle a un style "moderne" que je n'aime pas beaucoup.

Les œuvres que j'ai écoutées sur youtube ne m'ont pas plu. Par contre, c'est un bon interprète de J.S. Bach.