Ivan KURZ, né en 1947

Eléments biographiques:

Ce que je peux dire sur Ivan Kurz c'est qu'il est un compositeur et professeur tchèque, né le 29 Novembre 1947. Il est l'un des représentants les plus importants de la génération après-guerre des compositeurs tchèques. Il contribue vivement à l'éveil musical du public aussi bien par le biais de la scène qu'en devenant un compositeur de premier plan pour le cinéma et le théâtre. Son langage musical est dominé par l'idéal du postmodernisme, figurant dans la synthèse des dispositifs de composition. Il est l'auteur de nombreux ouvrages de chambre, de compositions vocales et électro-acoustiques. Le principal de son oeuvre réside plus particulièrement dans les partitions pour grandes formations. L'orchestre symphonique est une puissante source d'inspiration pour lui. C'est justement au travers d'oeuvres employant une grande formation symphonique que j'ai abordé ce compositeur, si peu connu dans nos contrées: Inclined Plane (1979), Emergence (1981), Parable (1982) et The Gospel's Folly pour choeur mixte et orchestre (1987-89).

Ses œuvres sont réalisées par les plus grands orchestres symphoniques et orchestres de chambre (Orchestre Philharmonique Tchèque, Prague Radio Symphony Orchestra, Stamic Quartet, Quatuor Dolezal, Choeur d'enfants de Kühn, etc...), dans son pays et à l'étranger. Depuis 1977, il a enseigné à l'Académie des Arts. La prise de conscience du grand public pour son talent de compositeur est venu par la musique qu'il écrivit pour la série TV "Panopticon" et "Cops and Robbers".

A l'écoute de Inclined Plane et Emergence, je me suis demandé s"il ne s'agissait pas dans les deux cas d'un condensé symphonique de deux musiques de film qu'il aurait écrites antérieurement. Pure supposition qui sera sans doute contredite par les faits, mais lorsque je parcours attentivement ces deux partitions pour grand orchestre, je remarque plusieurs étapes, plusieurs épisodes musicaux au sein d'une même oeuvre. Inclined Plane démarre sur des remous de timbales et grosses percussions, rejoints par des cuivres dissonants. On passe alors à un autre épisode, comme celui assez étrange d'un appareil qui tournerait sur lui-même en émettant un son monotone et continu. La musique prend alors une tournure insolite grâce à ce bruit mécanique ininterrompu, auquel vont s'ajouter les effets humoristiques d'une trompette ou d'une clarinette espiègle. Il y a là une forme de dérision que l'on retrouvera aussi dans Emergence, lorsque s'élèvera, contre toute attente, à ce qui s'apparenterait à une scie musicale émergeant de nulle-part, une partition forte en contrastes et où les idées musicales scintillent par leur originalité. La musique peut être vive et massive, violente dans sa conclusion, ou un simple murmure des cordes en trémolo, alors que celles-ci finiront par prendre, sous la forme d'un grand lamento, une tournure bien plus dramatique et solennelle. Une flûte ballade sa solitude entre mystère et mélancolie - elle sera bien plus poétique et volatile dans Inclined Plane - la dérision n'est cependant jamais très loin, tapie derrière l'arrogance d'un cuivre ou autre machin bizarre, comme cet élément électronique de forme sinusoïdale, presque incongru, qui offre une conclusion surréaliste à la première oeuvre mentionnée. Ludique et divertissant.   
 
L'oeuvre de Ivan Kurz que j'ai hâte de réécouter et qui m'avait laissé, jadis, une très belle impression, est The Gospel's Folly pour choeur mixte et orchestre. Ce sera dans un futur imminent, probablement demain.  

Parable pour orchestre symphonique (1982), démarre sur un roulement de grosse caisse suivi par un solo de violon introductif. Surgira alors une espèce de danse à l'allure grotesque à laquelle on ne s'attend pas d'emblée.  Portée par une curieuse mélodie au marimba, elle donne le ton, la cadence, l'humeur de cette musique qui flirte avec la dérision, au risque de perdre son sérieux. Les cuivres y jouent un rôle important, et cela-même si le violon solo occupe une place centrale dans la première partie de l'oeuvre. Le tuba et le trombone s'offrent d'ailleurs, eux aussi, leur moment en solo. La danse espiègle se maintient solidement aux charpentes cuivrées d'un orchestre soudainement plus dramatique. La conjugaison de ces deux pôles contradictoires finissent par créer ce qui est à mon goût le sommet de la composition: une fanfare sinistre et improbable. L'accalmie apportera une toute autre dimension alors que la musique, réduite à une expression plus minimaliste, s'appuie sur un rythme de tic-tac. Une machine à vent produira son souffle lancinant, un orgue s'imposera, puissant, digne, impérial, jamais écrasant, des cuivres le surplomberont de leurs appels haletants. Puis, l'orgue deviendra une douce complainte conclusive, accompagnée par la machine à vent.  

Gospel's Folly pour choeur mixte et orchestre (1987-89) est une oeuvre beaucoup plus sobre et tranquille, très mélodieuse. Ivan Kurz n'est plus l'enfant terrible qui implante dans ses pièces symphoniques un certain délire et sens de la dérision. Cette fois, il développe une prose plus contemplative, plus posée, plus proche du recueillement que de la frénésie. Les choeurs n'interviennent que tardivement dans la pièce, vers les seize minutes environs. Très plaisante à suivre, une belle musique qui trouve son meilleur moment dans sa partie finale.

Ivan Kurz est un compositeur que je suis heureux d'avoir redécouvert alors que je l'avais complètement négligé, ces dernières années.