Michel PHILIPPOT (1925-1996)

Michel Philippot est né le 2 février 1925 à Verzy,un village près de Reims. Sa première vocation était scientifique. Il rêvait de devenir physicien et,en 1939,ce qu'il avait pu apprendre de la physique nucléaire le remplissait d'enthousiasme. Ses études secondaires étant terminées en 1941,il s'inscrit donc à la Faculté des Sciences de l'Université de Toulouse. Mais dans le même temps,révolté à la fois par la défaite de 1940 et la lâcheté de l'armistice,il avait réussi à rejoindre la Résistance au travers du mouvement "Combat". Il fut arrêté en juin 1942 par la police de Vichy,incarcéré à Toulouse puis à Lyon,acquitté pour avoir agi sans discernement par le tribunal de Lyon (il avait alors moins de 18 ans) et libéré le 3 novembre 1942. Mais la police de Vichy avait complaisamment fourni ses fichiers à la Gestapo. Il restait donc recherché par cette dernière et ne pouvait,en conséquence,demeurer inscrit à quelque université que ce soit. C'est l'une des raisons qui décidèrent de sa vocation musicale,car il commença alors à travailler sérieusement l'harmonie et le contrepoint en prenant des leçons particulières avec Jules Hansen,le directeur du Conservatoire de Rheims. En 1945,année qui suivit la Libération,il entra au Conservatoire National Supérieur de Paris qu'il quitta dès 1947 pour travailler avec René Liebowitz. Il considéra que ce dernier fut son véritable maître.

Au cours de sa carrière,Michel Philippot exerça les professions et fonctions les plus diverses. Après avoir été professeur de solfège et chant choral dans les écoles de la ville de Paris, il entra à la Radiodiffusion Française comme ingénieur du son spécialisé dans la musique. En 1959,il fut l'adjoint de Pierre Schaeffer lorsque ce dernier créait le Service de la Recherche et, à ce titre, fut le premier chef du Groupe de Recherches Musicales (GRM). Après avoir également été adjoint de Henri Barraud (directeur de la chaine France-Culture), il devint en 1964 directeur de la Musique de L'ORTF avant d'en être le conseiller scientifique en 1972. En 1976,
il fut appelé au Brésil pour y créer le département de Musique de l'Université d'Etat de Sao Paulo,puis pour être expert pédagogique à l'Université Fédérale UNIRIO de Rio de Janeiro. De retour en France,il fut directeur de la formation professionnelle pour l'Audiovisuel à l'INA avant d'être conseiller scientifique de ce même organisme. En 1989,il fut chargé d'organiser l'enseignement supérieur aux métiers du son,enseignement qui se dispense au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris,en association avec,notamment,l'Institut National de l'Audiovisuel et le Conservatoire des Arts et Métiers.

 Dès 1960, il s'intéressa à l'informatique et,en 1962,fit un stage chez IBM. Il aime dire: << En cette époque, l'informatique était une chose suffisamment difficile pour qu'elle ne soit pratiquée que par des gens sérieux.>> Mais ses recherches étaient et demeurèrent orientées vers les problèmes de langage musical,vers l'organisation des sons plutôt que vers leur synthèse et l'acoustique. En 1969,il avait reçu la Médaille pour la recherche et l'invention en raison de ses travaux sur la cybernétique (théorie des systèmes) et,en 1987,
le Grand Prix National de la Musique. Il fut aussi président de l'Académie Charles Cros.

 Sa première oeuvre,une Sonate pour piano écrite en 1947, était dodécaphonique sérielle (désolé Joachim ). S"il
prit ensuite bien des libertés avec cette technique (qui,contrairement à ce que l'on croit,est plutôt moins contraignante que celle du contrepoint de la Renaissance),il en conserva un goût pour l'écriture rigoureuse - ce qui chez lui n'exclut en rien le lyrisme. A ce sujet,il aime citer une phrase de Zarlino (le plus grand théoricien du XVIème siècle): << L'expression est la récompense de la perfection.>>

  Michel Philippot s'est éteint le 28 juillet 1996.


Je ne connais que cinq oeuvres du compositeur et ne sais pas trop ce qu'il a composé d'autre ni s"il a beaucoup composé - rien trouvé sur la toile de très précis.

Ces cinq oeuvres qui d'ailleurs ont eu un certain effet sur moi sont

___COMPOSITION N°2 pour orchestre à cordes,piano et harpe - 1973
___COMPOSITION pour double orchestre - 1960
___CARRES MAGIQUES pour ensemble instrumental - 1983
___COMPOSITION N°4 pour orchestre - 1982
___CONCERTO pour violon,alto et orchestre - 1987

Je reviendrai plus en détail sur ces oeuvres lorsque je les aurai réécoutées. Je me souviens de pièces sombres et tourmentées mais dont le caractère sobre et réfléchi non dépourvu d'une pointe contrôlée de lyrisme m'avait séduit.

Comme pour Betsy Jolas (dont tu as repris le topic juste avant celui ci), ce que j'ai écouté de Michel Philippot m'a semblé horrible. Je ne peux même pas te dire ce que j'ai écouté, car, contrairement à mon habitude, je ne prends même pas note de ce qui me déplaît souverainement

Heyyyyyy, qui a osé écrire Reims avec un "h", non, non, j'habite dans le même département et je peux dire que ca s'écrit Reims, :p

Je vais écouter !
J'ai l'impression qu'il y a beaucoup de compositeurs contemporains qui sont très forts en physiques et attirés par les sciences, ils finissent alors par faire des métiers comme ingénieur du son, et composent des musiques très recherchés sur l'analyse, la recherche et la perception du son. Je n'en connais pas énormément, mais du peu que je connaisse, ca me parait fréquent

Je vais donc écouter ses oeuvres,

Ah oui, puis j'adore la citation de Zarlino : "l'expression est la récompense de la perfection"

A Joachim:

Pourtant ce sont des musiques qui ne sont absolument pas en rupture avec les vestiges du passé et que je trouve très abordables,que ce soit pour PHILIPPOT ou pour JOLAS. Maintenant,il est fort possible que tu ais écouté quelque chose de plus expérimental ou radical que j'aurais peut-être trouvé horrible,moi aussi.

Une fois,je me suis laissé tenter par une compilation "Répertoires polychromes 3" qui me permettait d'aborder l'oeuvre de six compositeurs dont je ne connaissais rien: Edith Canat de Chizy,Jean-Christophe Feldhandler,Bruno Giner,Yoshihisa Taïra,Georges Boeuf et Philippe Fénélon. Malheureusement,aucune de six oeuvres n'ont retenu mon attention et je les ai même trouvées plus ou moins chiantes,casse-bonbon... Si bien que j'ai soigneusement contourné ces compositeurs qui ne m'inspiraient rien de bon. Puis,un jour,un ami qui a des goûts assez proches des miens me dit un bien fou d'oeuvres orchestrales de Edith Canat de Chizy. Je me suis alors laissé tenter par un cd comprenant YELL pour orchestre,HALLEL pour trio à cordes,CANCIONES pour douze voix mixtes à cappella et DE NOCHE pour orchestre. Les deux pièces pour orchestre me plaisent beaucoup,comme quoi d'une oeuvre à l'autre,tout peut basculer du meilleur vers le pire ou du pire vers le meilleur. Par exemple,sur le même cd,je me souviens que le TRIO m'avait laissé de marbre même si une réécoute s'impose.

Maintenant,il est vrai que ces compositeurs,PHILIPPOT,DE CHIZY,JOLAS,je ne te les aurais jamais conseillés car je cerne tes goûts et je sais qu'ils ne trouveront de toute façon guère grâce à tes oreilles. Je préfère largement t'orienter vers des sensibilités comme LEMELAND,FLORENTZ et CHAMOUARD qui ont beaucoup plus de chance de te séduire,des compositeurs,je te rappelle,que j'adore aussi.Je vois que Pianoline a de toute évidence une sensibilité et une curiosité qui se prêtent à la musique dite "moderne" et je l'oriente ainsi vers un univers musical qui est donc susceptible de lui plaire et ça marche. Je l'ai orientée sur DUTILLEUX et elle a beaucoup aimé son Concerto pour violoncelle et je pense qu'elle aimerait STANCES de BETSY JOLAS.

Pianoline a écrit:

Heyyyyyy, qui a osé écrire Reims avec un "h", non, non, j'habite dans le même département et je peux dire que ca s'écrit Reims, :p

Je vais écouter !
J'ai l'impression qu'il y a beaucoup de compositeurs contemporains qui sont très forts en physiques et attirés par les sciences, ils finissent alors par faire des métiers comme ingénieur du son, et composent des musiques très recherchés sur l'analyse, la recherche et la perception du son. Je n'en connais pas énormément, mais du peu que je connaisse, ca me parait fréquent

Je vais donc écouter ses oeuvres,

Ah oui, puis j'adore la citation de Zarlino : "l'expression est la récompense de la perfection"

J'adore aussi cette expression et,en revanche,j'ignore où je suis allé chercher ce H à Reims.

ben, Stances, j'ai écouté que un extrait, et je me suis ennuyée,
Bon, je ne devrais pas dire que je n'aime pas car ce n'était qu'une partie, je vais écouter un peu plus, mais disons qu'à première vue, c'est bof,

Oui,mes indications ne seront pas toujours imparables car tu as aussi ta propre sensibilité et perception et c'est tant mieux. Je pensais que tu accrocherais à la construction rythmique de l'oeuvre mais c'est vrai qu'il n'y a sans doute pas cette sensation de "nuage" que tu recherches,de flottement...et j'ignore si la musique de PHILIPPOT te plairait. C'est difficile à dire.

Là je suis en train d'écouter certaines choses expérimentales de PHILIPPOT comme ETUDE,I,II,III,AMBIANCE I & II et ça n'a rien à voir avec ce que je connais de lui. RIEN A VOIR Je ne connaissais pas cette facette de son approche artistique et ce n'est évidemment pas mon truc du tout et ça n'a absolument aucun rapport avec son oeuvre écrite.

Où est-ce que l'on peut écouter des musiques de ce compositeur ?

Je n'ai pas réussi à trouver autre chose que ces Ambiances et Etudes expérimentales très pénibles,hélas! Puis Philippot est un peu dans la même phase,le même concept que Betsy Jolas,même si sa musique reste différente. Pour l'instant,vu que tu as aimé l'approche de DALBAVIE sur COLOR,tu pourrais continuer d'approfondir un peu ce compositeur. Un compositeur te conduira toujours à un autre compositeur, d'une manière ou d'une autre.

Réécoute aujourd'hui des oeuvres que je connais et possède de Michel Philippot:

__COMPOSITION N°2 pour orchestre à cordes,piano et harpe
__CARRES MAGIQUES pour ensemble instrumental
__COMPOSITION pour double orchestre
__COMPOSITION N°4 pour orchestre
__CONCERTO pour violon,alto et orchestre.

J'ai adoré retrouver le caractère tourmenté et dramatique de ces musiques dès la COMPOSITION N°2 avec le duo tendu de la harpe et du piano,puis CARRES MAGIQUES. J'en ai aimé les pulsions de son impulsivité même si ces deux oeuvres-là ne sont pas exactement celles que je préfère. Passé la COMPOSITION pour double orchestre qui se fige dans un sérialisme trop rigide et me parait finalement académique mais que je tolère d'une certaine façon,la COMPOSITION N°4 me transporte totalement mais pas autant encore que son magnifique CONCERTO pour violon,alto et orchestre. J'ai trouvé cette pièce de seize minutes très émouvante et même fascinante, devrait être ressuscitée pour le concert tant elle a l'argument musical pour séduire un auditoire féru de musique contemporaine.

Voici donc le propos-mêmes du compositeur sur ce Concerto:

<< En 1984, le remarquable altiste qu'est Michel Laléouse m'avait demandé d'écrire pour lui un concerto dans lequel il pourrait jouer de l'alto et du violon. Il souhaitait montrer sa virtuosité pour les deux instruments. Je conçus aussitôt après une nouvelle version dans lequel le rôle du violon était augmenté. Cette nouvelle version demande la présence de deux solistes. C'est à eux que l'oeuvre est dédiée: d'abord Jean-Claude Bernède (à qui je rends ici hommage et qui,hélas,devait nous quitter quelques années après) et Michel Laléouse lui-même. La forme de ce Concerto est moins originale que celle de mes Compositions. Sans qu'il s'agisse le moins du monde d'une classique forme sonate,la recherche du "panthématisme" y est moins poussée. Plusieurs motifs mélodico-harmoniques peuvent éventuellement être perçus comme étant des thèmes. L'orchestre n'a pas vraiment un rôle d'accompagnement: on peut le considérer lui aussi comme un soliste - disons un soliste polycéphale...>>