Au milieu des années 30,l'Allemagne ne fut plus réellement viable pour le compositeur BERTHOLD GOLDSCHMIDT. Pour survivre,il dût quitter son pays natal pour l'Angleterre. D'un côté,il était satisfait de ne plus se sentir discrédité ni inquiété en tant que Juif et musicien <<dégénéré>>,de l'autre,il devait à l'âge de 32ans recommencer sa vie. Que laissa-t-il derrière lui? Né à Hambourg, GOLSCHMIDT avait dès 1922 suivi les cours de maîtrise de FRANZ SCHREKER à Berlin et devint par la suite un chef d'orchestre apprécié. Une passacaille pour orchestre lui valut de remporter en 1925 le Prix Mendelssohn et lorsque ERICK KLEIBER en fit une interprétation l'année suivante,il gagna une distinction supplémentaire. Le jeune GOLDSCHMIDT présenta ses oeuvres pour orchestre lors des fêtes des musiciens de Chemnitz (1926) et de Schwerin (1928),entre autres. Elles suscitèrent de réels enthousiastes tout en se heurtant aux avis les plus divers. La PARTITA OP 9 semblait par trop 'moderne' aux critiques et auditeurs conservateurs - plus moderne par exemple que la Musique de Chambre n°5 de PAUL HINDEMITH qui avait été particulièrement appréciée par le même public. Il connaîtra un nouveau succès avec son premier opéra DER GEWALTIGE HAHNREI,en début d'année 1932. Fort de ce succès,l'Opéra de la Ville de Berlin mit l'oeuvre au programme de l'année suivante,mais c'était sans compter avec l'arrivée au pouvoir des nationaux-socialistes qui allèrent anéantir dans une logique implacable la percée musicale de BERTHOLD GOLDSCHMIDT en Allemagne (et de bien d'autres compositeurs et artistes). Ce dernier resta encore deux ans à Berlin,aidant de jeunes musiciens à se préparer pour intégrer l'Orchestre de Palestine,écrivant et projetant la composition d'autres oeuvres qui eurent encore parfois l'occasion d'être jouées lors de concerts organisés par "L'Aide aux Artistes juifs". C'est juste à temps qu'il quitta l'Allemagne,et la rupture qui frappa sa vie et sa carrière est symptomatique de celle qui survint alors dans l'histoire de la musique en Europe.
En Angleterre,après un (re)début difficile,BERTHOLD GOLDSCHMIDT redevint un chef d'orchestre et un compositeur appréciés et sollicités.
Dernière édition par Icare le 2011-12-25, 17:22, édité 2 fois
Icare Admin
Nombre de messages : 17536 Age : 60 Date d'inscription : 13/11/2009
Des trois oeuvres que je connais de lui,il y a un CONCERTO POUR VIOLONCELLE datant de 1953,une CIACONNA SINFONICA écrite en 1936 et une CHRONICA pour orchestre,une musique de ballet commencée en 1938 et achevée en 1985. C'est un style de musique très alerte dans laquelle BERTHOLD GOLDSCHMIDT use avec brio des joies de la passacaille,de la chaconne,des compositions avec basse obstinée,des musiques où une suite de notes de base est répétée tout au long de la pièce. C'est une musique qui bouge,qui danse,une musique très expressive et faussement insouciante que quelques éclats d'ironie traversent par moment. C'est aussi une musique qui ne subit pas la perversité d'un dodécaphonisme radical,n'en retient que quelques éléments seulement. Dans sa CIACONNA SINFONICA,il flirta même avec la technique sérielle de l'Autrichien,mais sans l'embrasser totalement et malgré son harmonie librement tonale et certaines divergences fondamentales avec les théories de celui-ci. (Arnold Schoenberg) C'est donc une musique qui s'agite,ne se pose que rarement,ponctuée par un humour et un sens de la fantaisie très agréables et divertissants. Sur ce point,il y manquerait,à mon goût,un poil de profondeur,quelque chose qui,au lieu de me divertir par des combinaisons ludiques et je-ne-sais-quoi d'autre,m'offre une émotion forte,de celle qui arrête le temps et me poserait sur un nuage.
Dernière édition par Icare le 2013-09-07, 20:21, édité 3 fois
joachim Admin
Nombre de messages : 27212 Age : 78 Date d'inscription : 19/08/2006
Conjointement avec Derryck Cooke, il a participé à l'achèvement de la 10ème symphonie de Mahler.
A part ça, j'ai déjà écouté quelque chose de lui, à la radio, mais je ne me souviens plus quoi ni l'impression que j'en ai eue
En tout cas, pour une fois parmi ceux que tu présentes, son nom ne m'est pas inconnu
Si je connaissais BERTHOLD GOLDSCHMIDT de nom depuis quelques années,à force de fouiller les bacs,c'est depuis hier seulement que je connais un peu de sa musique,par les trois oeuvres que j'ai citées dans mon second post. Une nouvelle écoute,ce matin,n'a d'ailleurs pas fait évoluer mon propos au-delà d'un enthousiasme mitigé. C'est plaisant,divertissant,pas ennuyeux dans l'écoute même avec des passages assez fameux,une musique parfois assez ludique et non dénuée d'humour,comme je l'avais déjà mentionné,mais rien de franchement incontournable non plus. Pas une musique qui me donne une réelle envie d'approfondir davantage ce compositeur...peut-être ces deux opéras LE COCU MAGNIFIQUE et BEATRICE CENCI si l'occasion se présente un jour...on verra bien. Il y a surtout des compositeur de sa génération qui m'interpellent davantage et me sont largement prioritaires dans mes recherches.
joachim Admin
Nombre de messages : 27212 Age : 78 Date d'inscription : 19/08/2006
1925 : Orchester-Passacaglia op. 4 (1925) ; 1925 : The Comedy of Errors (titre original), ouverture ; 1927 : Suite op. 5 ; 1927 : Partita op. 9 ; 1932 : Marche Militaire op. 20 (pour grand orchestre ou orchestre d'harmonie, autre version de la pièce éponyme pour piano pré-citée), incluse ultérieurement dans le ballet Chronica mentionné ci-dessous ; 1933 : Der gewaltige Hahnrei (Le Cocu magnifique), suite op. 14a tirée de l'opéra du même nom ; 1936 : Ciaccona sinfonica ; 1940 : Polish Dance Suite ; 1941 : Greek Suite ; 1945 : Sinfonietta 1947 : Awake, the Voice Commands (transcription du choral pour orgue Wachet auf, ruft uns die Stimme de Johann Sebastian Bach) 1949 : Concertino pour harpe et orchestre de chambre ; 1953 : Concerto pour violoncelle ; 1954 : Concerto pour clarinette ; 1955 : Concerto pour violon ; 1985 : Intrada (pour grand orchestre ou orchestre d'harmonie), intégrée au ballet qui suit ; 1985 : Chronica, musique de ballet (commencée en 1938) ; 1995 : Rondeau « Rue du Rocher », avec violon (autre version de la pièce éponyme pour violon et piano sus-visée).
Musique de chambre
1926 : Quatuor à cordes n° 1 op. 8 ; 1935 : Sonate pour violoncelle 1936 : Quatuor à cordes n° 2 ; 1948 : Carols, pour trio à cordes ; 1983 : Quatuor avec clarinette ; 1985 : Trio avec piano ; 1989 : Quatuor à cordes n° 3 ; 1990 : Berceuse, pour violon et alto ; 1991 : Retrospectrum, pour trio à cordes ; 1991 : Fantasy, pour hautbois, violoncelle et harpe ; 1992 : Capriccio, pour violon seul ; 1992 : Quatuor à cordes n° 4 ; 1993 : Dialogue with Cordelia, pour clarinette et violoncelle ; 1993 : Encore, une méditation agitée (titre original), pour violon et piano ; 1993 : To David Matthews, from B (flat) to D : "a birthday greeting postcard", pour violon et piano 1995 : Rondeau « Rue du Rocher » (titre original) pour violon et piano.
Piano :
1926 : Sonate op. 10 ; 1927 : Capriccio op. 11 ; 1932 : Marche Militaire (titre original) op. 20 ; 1934 : Variations sur un chant de berger palestinien op. 32 ; 1957 : Little Legend ; 1957 : From the Ballet ; 1958 : Scherzo.
Œuvres avec chœurs et Opéras
1930 : Der gewaltige Hahnrei (Le Cocu magnifique), opéra (tragi-comédie) en trois actes op. 14 ; 1931 : Letzte Kapitel, pour récitant, chœurs, percussion et piano, op. 15 ; 1950 : Beatrice Cenci, opéra en trois actes ; 1985 : Belsatzar, pour chœurs a cappella.
Œuvres avec voix soliste
1933 : 2 Morgenstern Lieder pour voix et piano (ou trio à cordes) op 27 ; 1934 : 3 chants pour soprano colorature et piano op. 24 ; 1935 : 2 psaumes (120 et 124) pour "voix haute" et orchestre à cordes op. 34 ; 1942 : Der Verflossene, chanson de cabaret pour voix et piano ; 1943 : Time, pour voix et piano (incorporé au 2ème acte de Beatrice Censi en 1950) 1948 : Nicodemus, he was black, pour voix seule ; 1948 : The Noble Little Soldier's Wife, pour baryton et xylophone ; 1949 : Beatrice's Song, pour soprano et piano ; 1950 : Clouds, pour voix et piano (ou orchestre) ; 1952 : The Old Ships, pour voix et piano ; 1958 : Mediterranean Songs, pour ténor et orchestre ; 1994 : Les petits adieux (titre original), pour baryton et orchestre ; 1996 : Deux nocturnes (titre original) : Rondel - Judith, pour soprano et orchestre.
Musiques pour la radio/télévision
1948 : Dream Play 1969 : Les Investigations d'un Chien
Icare Admin
Nombre de messages : 17536 Age : 60 Date d'inscription : 13/11/2009
C'est un bon panorama pour se faire une idée du compositeur, avec ses premières oeuvres, oeuvres médianes et dernières oeuvres.
Pas mal du tout
J'ai aussi un CD avec trois concertos, mais dans l'ensemble j'aime moins. C'est celui pour violoncelle que j'ai préféré, et celui pour clarinette le moins, celui pour violon entre deux.
Icare Admin
Nombre de messages : 17536 Age : 60 Date d'inscription : 13/11/2009
Il aura fallu quatre ans pour que je revienne sur les trois oeuvres de Berthold Goldschmidt que j'ai en ma possession et sur lesquelles j'ai rédigé un commentaire un peu plus haut: Concerto pour violoncelle, Giaconna Sinfonica et sa musique de ballet Chronica. Je pourrais d'ailleurs en dire à peu près la même chose sauf que, cette fois, j'ai mieux apprécié que précédemment. Je me suis laissé distraire par ce symphonique très divertissant et finalement attachant. Surtout le Concerto pour violoncelle qui, sans m'émouvoir comme celui, par exemple, d'Arthur Honegger ni me fasciner autant que celui d'André Jolivet, m'a assez séduit. Je l'ai trouvé d'un beau romantisme et raffiné.
Icare Admin
Nombre de messages : 17536 Age : 60 Date d'inscription : 13/11/2009
J'ai aussi un CD avec trois concertos, mais dans l'ensemble j'aime moins. C'est celui pour violoncelle que j'ai préféré, et celui pour clarinette le moins, celui pour violon entre deux.
Je ne connais pas son concerto pour violon ni celui pour clarinette, seulement son concerto pour violoncelle par David Geringas et le "Magdeburgische Philharmonie" sous la direction de Mathias Husmann que je possède donc dans une autre interprétation et sur un autre album, en complément de deux oeuvres pour orchestre; Ciaconna Sinfonica et Chronica. Je constate que dix ans se sont écoulés depuis que je parle de ce compositeur et que je me suis contenté de ces trois oeuvres. C'est pourtant une musique orchestrale qui, si elle ne me prend pas aux tripes, avec sa dose de fantaisie et de lyrisme, m'apporte autant de plaisir que de réconfort. C'est en partie grâce à une orchestration très aérée, très colorée aussi, avec des instruments, surtout à vent, qui traversent la chaire orchestrale et s'enchevêtrent les uns aux autres dans une humeur assez légère. C'est une musique plutôt vivante, dynamique dans son ensemble sachant aussi bien magner la mélancolie, comme elle le fait avec le violoncelle du concerto, que l'ironie par des notes sautillant d'un instrument à l'autre qui me laissent imaginer des petits papillons multicolores qui virevoltent au-dessus d'un jardin fleuri. C'est une scène poétique purement imaginaire, une métaphore, peut-être parce que cette musique m'inspire la nature, le printemps, la vie tout simplement vue d'une fenêtre, dans ce qu'elle a d'insouciante et d'apaisante. Ainsi est la musique de Berthold Goldschmidt, plus j'y suis attentif plus j'y perçois des éléments d'une fantaisie toujours plus séduisante. Elle peut s'accaparer d'une fanfare, devenir une valse, se transformer sur le rythme d'une chaconne...
<<C'est sans aucun doute le Concerto pour violoncelle qui, des trois concertos pour soliste (violon, violoncelle et clarinette), exerce le rayonnement le plus direct. Comme les deux autres pièces pour orchestre (Ciaccona Sinfonica/Chronica), elle fait partie des créations des "modernistes modérés", ceux qui ont vécu à l'époque d'un plus grand radicalisme, du néo-classicisme et de la "Nouvelle objectivité" et qui ont assimilé ces tendances sans se figer dans des conventions néo-classiques ni retomber dans un romantisme finissant dépassé. C'est la musique d'un compositeur qui s'intéressa aux techniques dodécaphoniques de Schoenberg sans jamais les embrasser avec enthousiasme. La production de Goldschmidt ne fut jamais, ni au début de sa carrière, ni dans les années où il vécut en Angleterre, typiquement "allemande" ou "anglaise" (ou ce que l'on considère comme typique à ces nationalités). Et si on croit découvrir dans sa sémillante première Ouverture pour la "Comédie des Erreurs", dans les Premier et Deuxième quatuors à cordes et dans "Der Gewaltige Hahnrei" des affinité avec Busoni, Prokofiev ou Chostakovitch, il faut y voir non des imitations, mais seulement des parallélismes.>> Michael Struck.
ET01
Nombre de messages : 16 Age : 56 Date d'inscription : 10/02/2024