Yannick Nézet-Séguin, chef d'orchestre
par Benjamin Ballifh
A 31 ans, le montréalais Yannick Nézet-Séguin ne cesse d'affirmer un tempérament prometteur qui allie force et sensibilité. Travail de la texture et de la transparence, respect des hommes et des partitions en tentant d'exprimer le sens et l'âme des oeuvres, le jeune maître de la baguette poursuit sa démarche d'autant plus passionnante qu'il est en phase de maturité et qu'il se construit un répertoire: de Weil et Saint-Saëns, de Brukner à Mahler, sans omettre l'opéra et surtout Wagner... Portrait du chef de choeur devenu maestro, disciple de Giulini et de Furtwängler. Portrait.
Né à Montréal en 1975, Yannick Nézet-Séguin dirige depuis sept ans (mars 2000) l'Orchestre Métropolitain du Grand Montréal. Il prendra la direction pour la saison 2008/2009, succédant ainsi à Valery Gergiev, du Rotterdam Philharmonic Orchestra.
Le chef le plus prometteur de la jeune génération, avec le vénézuélien Gustavo Dudamel, a commencé de parcourir en tournée, les salles européennes en 2004. Il a dernièrement dirigé le London Philharmonic, le National de France, la Staatskapelle de Dresde, le Capitole de Toulouse... Infatigable, consommateur d'orchestres, - mais avec passion et une délectation communicative-, Yannick Nézet-Séguin dirigera en juillet 2007, la Symphonie n°6 de Mahler à Sydney (Australie).
Choriste à 9 ans
Membre et répétiteur de chorale, il découvre la direction musicale et décide d'être chef d'orchestre. Sa formation, au Conservatoire de musique du Québec à Montréal, est ensuite orientée dans ce sens. Composition, théorie, solfège... et piano, un instrument qu'il continue d'ailleurs de jouer, comme accompagnateur ou en musique de chambre. Yannick Nézet-Séguin apprend à diriger comme chef de choeur à 18 ans à Montréal, sa ville natale.
Après avoir étudier la direction chorale au Westminster Choir College à Princeton (New Jersey), Yannick Nézet-Séguin fonde en 1995, l’ensemble vocal et instrumental La Chapelle de Montréal.
Il a la chance de recevoir les conseils du chef italien Carlo Maria Giulini, entre 1997 et 1998. L'humaniste lui inculque l'amour des hommes et des oeuvres. L'ouverture vers les autres, le sens du partage et de la communion. Le respect des musiciens, surtout, une vision tout à fait opposée à celle d'un Toscanini. Wilhelm Furtwängler est également un modèle vénéré: l'art du souffle et la liberté "subjective" de sa direction l'inspirent aussi. Chercher le sens profond des notes, ne pas simplement jouer le métronome et les indications rythmiques. Le jeune chef canadien aimerait interpréter l'oeuvre du compositeur: Furtwängler a en effet composé plusieurs symphonies.
Opéra
Dans les années à venir, Yannick Nézet-Séguin se prépare pour diriger davantage d'opéras. Lyrique, symphonique: les deux genres découlent du souffle, du chant. Aucune césure entre eux. Pour lui, une symphonie est un opéra instrumental et l'opéra, est souvent très symphonique. Il a été d'ailleurs conseiller musical à l'Opéra de Montréal, entre 2000 et 2002, où il a dirigé L’Elisir d’amore, Turandot, Le Barbier de Séville, La Bohème... En 2007, il dirige l’orchestre du Gran Teatre del Liceu de Barcelone, dans La voix humaine de Poulenc et Le portrait de Manon de Massenet (mai et juin).
Rotterdam
A Rotterdam, tout en respectant le caractère volontaire et sensitif de l'Orchestre Philharmonique, Yannick Nézet-Séguin élargira autour des oeuvres scandinaves, le répertoire de Bach aux symphonistes germaniques, Beethoven, Strauss, Bruckner (dont il vient de publier la 7 ème Symphonie avec l'Orchestre métropolitain du Grand Montréal, Atma. Les deux autres symphonies ultimes, n°8 et n°9 sont également en projet chez le même label) , Mahler dont il a enregistré la Quatrième (également chez Atma).
Sa lecture de la 7 ème Symphonie de Bruckner a révélé la maturité de sa vision et une compréhension profonde de l'orchestre wagnérien dont la 7ème brucknérienne est un hommage. De fait, le chef songe sérieusement à Wagner. A suivre.