| | La musique en milieu carcéral | |
| | Auteur | Message |
---|
Snoopy Admin
Nombre de messages : 31857 Age : 49 Date d'inscription : 10/08/2006
| Sujet: La musique en milieu carcéral Ven 20 Sep 2024, 12:45 | |
| Pour rebondir sur le film "Quatre Minutes" présenté par Icare, je me suis intéressé au sujet. A ma grande surprise, ce n'est pas si rare.
Le détenu qui donnait des cours de piano (Source)
Laurent a été incarcéré en juin 2007 dans une prison du Nord. En septembre, ce pianiste professionnel a commencé à donner des cours de piano à ses codétenus, avec l’autorisation de l’administration. Un moyen de s’évader pour les premiers, de pacifier la détention pour la seconde. Laurent raconte cette expérience hors-normes, dans laquelle « chacun a trouvé son compte ».
« Dès les premiers jours d’incarcération, j’ai ressenti le manque, c’était physique. J’ai demandé l’autorisation d’avoir un clavier en cellule. Avant que cela me soit accordé, je jouais sur un clavier en papier que ma fille m’avait dessiné. Il était muet, je frappais mes doigts sur une table, mais dans ma tête, ça sonnait bien ! Les surveillants à l’œilleton devaient se dire : « Mais qu’est-ce qu’il fait ?! ». Quand j’ai reçu mon piano, j’ai pu vraiment m’évader dans ma cellule. Et puis très vite, je me suis dit : pourquoi ne pas en faire profiter les autres ? Je voyais une telle détresse chez les détenus, c’est devenu évident.
J’ai présenté mon projet au directeur en mettant en avant le côté thérapeutique, que ce pouvait être une sorte d’exutoire pour les détenus. Au départ, il n’était pas très réceptif. Son adjoint a pris la peine de venir m’écouter. Et ça a fait tilt.
On m’a dit : « On va d’abord faire un essai dans votre bâtiment avec quelques élèves. » Très rapidement, une psychologue m’a demandé de « m’occuper » de quelques détenus, dont un qui était DPS [détenu particulièrement signalé]. On me présentait surtout des détenus au profil délicat, des « chefs », qui pouvaient être à la tête de tout un bâtiment. Il suffisait qu’ils claquent des doigts pour bloquer la cour de promenade. L’administration devait se dire : « Si on calme le chef, les autres aussi seront calmés. » J’ai bien compris qu’ils y voyaient d’abord leur intérêt. J’ai joué le jeu au début, puis j’ai demandé à pouvoir aussi choisir mes élèves. C’était du cinquante-cinquante. Je proposais des personnes qui étaient très défavorisées, ou dépressives. Je me sentais vraiment privilégié quand je voyais l’état de misère dans lequel étaient certains gars. Je repense par exemple à un détenu indigent : il n’avait pas les moyens de s’offrir une bouilloire pour son café, alors il le saupoudrait sur sa tartine sans beurre.
Pour mes cours, j’avais pu acheter, par l’intermédiaire de ma femme, un piano numérique professionnel. J’avais une housse avec des roulettes pour déplacer mon piano. Il en a fait des kilomètres ! Je descendais les étages pour me rendre dans une petite salle habituellement réservée à la coiffure. Quand l’activité s’est développée, j’ai pu intervenir dans les autres bâtiments, les salles étaient plus grandes.
De temps en temps, il y avait une petite fouille impromptue de mon piano, pour vérifier que je ne faisais pas passer des choses d’un bâtiment à l’autre. Les surveillants me disaient : « Attention, ne vous faites pas solliciter par des détenus pour faire passer du shit. » Mais je tenais trop à cette activité pour faire des conneries.
Mes élèves ont pu cantiner de tous petits synthétiseurs pour 130 €, alors qu’ils en valaient 50. Pourtant, j’avais fait mes recherches pour trouver un piano de qualité le moins cher possible. J’avais proposé mes références, mais ils les ont jetées à la poubelle ! La direction m’avait dit : « Vous vous prenez pour qui ? Vous n’êtes pas à l’extérieur, ce n’est pas vous qui décidez! »
Aucun de mes élèves ne connaissait la musique. A l’extérieur, j’avais déjà eu des élèves en difficulté : autistes, aveugles, sourds… Et pour faciliter l’apprentissage, j’avais inventé une méthode qui permet de jouer sans connaître le solfège. J’utilisais exactement la même méthode en prison. Certains détenus étaient dans un plus piteux état que mes élèves à l’extérieur. L’un d’eux n’avait que quatre doigts. J’ai eu des personnes schizophrènes. Beaucoup n’auraient jamais imaginé jouer un jour du piano.
Très souvent, je proposais aux détenus un thème personnalisé que j’avais composé à partir des lettres du prénom de leur enfant ou de leur épouse, chaque lettre correspondant à une note bien précise. Ce qui fait que chacun pouvait travailler une musique unique, faite spécialement pour sa famille. J’ai encore toutes les partitions. Certains m’ont dit : « Quand je vais sortir, je vais m’acheter un petit synthé et je vais continuer, je vais apprendre à mes enfants. »
Ce n’était pas qu’une activité piano, j’étais aussi là pour être à l’écoute. Parfois je prenais deux personnes à la fois parce qu’elles se connaissaient. Elles en profitaient pour parler, évacuer certaines choses. C’était parfois des marmites prêtes à exploser. Après avoir parlé, on passait à la musique.
En trois ans, j’ai donné des cours à près de 500 détenus. Mon emploi du temps est devenu très chargé, je n’arrêtais pas ! J’essayais quand même de garder un peu de temps pour moi, pour le sport, etc. Je tiens à dire que je n’ai jamais été rémunéré pour quoi que ce soit. On avait trouvé un arrangement avec l’administration pénitentiaire : en compensation, j’avais la télé et le frigo gratuit.
J’ai aussi organisé des après-midi musicales durant lesquelles les élèves se produisaient devant des juges de l’application des peines (JAP) en admiration. J’avais dû faire tout un travail pour les convaincre de jouer : ils avaient « peur »… Alors je leur disais : « Non mais tu vois dans quoi tu te trouves ? Ta situation ne pourrait pas être plus terrible, ça devrait te libérer ! Allez, on se fait plaisir ! » Après ça, ils évacuaient le trac et ils jouaient très bien ! Avec un codétenu, on a joué à quatre mains le thème de Midnight Express. Devant les JAP ! C’était super !
L’administration ne m’a jamais demandé de comptes : les résultats étaient là. Avec les surveillants non plus, je n’ai jamais eu trop de difficultés, sauf avec un, qui m’a dit un jour : « Je ne vois pas pourquoi on apprendrait aux détenus à faire du piano. Mes enfants n’en font pas, eux. » Souvent, il n’appelait pas les détenus.
Globalement, ça marchait plutôt bien. La pénitentiaire y trouvait son compte, parce que les détenus étaient plus calmes. J’y trouvais le mien, les détenus aussi. Certains commençaient à parler plus, à s’ouvrir. Je me souviens d’un jeune de 20 ans qui ne sortait plus de cellule. Il préférait rester cloîtré que d’aller en promenade et se retrouver face à des gens qui risquaient de l’influencer, de peut-être l’inciter à retomber dans la drogue, etc. Il se protégeait comme ça. Finalement, grâce au piano, il a recommencé à sortir, à aller au sport… Il a repris des forces. La musique, c’est vraiment magique ! Le piano a sauvé la vie de deux personnes. Elles m’ont dit : « Si vous ne m’aviez pas appelé, je me serais suicidé. » Rien que pour ça, je me dis que je ne suis pas allé en prison pour rien !
Quand je suis sorti, en 2010, j’ai proposé de continuer, mais de façon rémunérée. Ils ont dit non pour des raisons de sécurité : je connaissais les lieux, etc. C’était aussi certainement une question d’argent. Ils m’ont dit aussi : « Monsieur, vous avez autre chose à faire que de replonger dans ce lieu qui vous a torturé pendant trois ans. » Ils n’avaient pas totalement tort, ça m’aurait demandé un gros effort de retourner là-bas. Finalement je me suis concentré sur ma réinsertion. J’ai tout à reconstruire, j’en ai encore pour des années. »
Recueilli par Anne Chereul
Cet article est issu de la revue trimestrielle Dedans-Dehors, éditée par l'Observatoire intertional des prisons. Pour le citer : Observatoire international des prisons, "Activités en prison : le désoeuvrement", Dedans-Dehors, n°91, avril 2016, pp.34-35
|
| | | Snoopy Admin
Nombre de messages : 31857 Age : 49 Date d'inscription : 10/08/2006
| Sujet: Re: La musique en milieu carcéral Ven 20 Sep 2024, 12:47 | |
| TÉMOIGNAGE. « J’ai appris à jouer du piano en prison sans instrument » (Source)
Sans instrument à disposition, Chontay Smith a appris à jouer du piano seul en prison. Plus de dix ans après avoir été incarcéré, l’homme a ressenti le virus de la musique. Ne pouvant compter que sur lui-même, il s’est débrouillé avec ce qu’il avait.
Sa cellule, pas plus grande qu’une place de parking, était loin de pouvoir contenir un instrument. D’autant que, même si cela avait été possible, personne au centre correctionnel de Green Haven, dans le nord de l'État de New York, ne lui aurait accordé ce droit.
Aussi, pour assouvir son envie d’apprendre le piano, Chontay Smith s’est débrouillé comme il le pouvait. Purgeant une peine de vingt-quatre ans, l’homme a fait preuve d’une créativité sans bornes.
L’envie d’apprendre un instrument
Né dans le Bronx d’une mère célibataire, Chontay a passé la plus grande partie de son enfant dans un foyer pour enfants. Sa grand-mère, qui aidait à son éducation, lui a fait découvrir la musique. A ses côtés, il écoutait BB King et James Brown. Adolescent, Chontay commence à travailler pour subvenir aux besoins de la famille. « J’ai dû grandir vite » confiait-il au NY Post. Un jour, Chontay est arrêté pour un crime lié à la drogue qu’il refuse de détailler. Incarcéré pour vingt-quatre ans, il ressent, au bout d’une décennie d’enfermement, l’envie d’apprendre à jouer d’un instrument. Ce sera le piano.
Un instrument de papier
Pour cela, l’homme dessine sur plusieurs feuilles, un clavier. Sur ce piano de fortune, Chontay s’entraîne à imiter les mouvements de la main du pianiste lors des offices à la chapelle de la prison. « Je me demandais : « Quelle est la différence entre les touches blanches et les noires ? » » expliquait-il. « Je me suis dit que j’allais venir au service tous les dimanches et mémoriser la musique » poursuivait-il. Chontay se lie ensuite avec un autre détenu qui, lui, sait jouer du piano. Il lui vend son clavier pour seulement 10 euros. Il promet également de lui apprendre à jouer.
Le début d’un parcours musical
Chontay découvre alors les accords de « Lean on Me » de Bill Withers. Finalement, il progresse parfois en écoutant simplement des morceaux. Libéré pendant l’hiver pandémique de 2020 à 2021, Chontay sollicite l’aide de la Fortune Society du Bronx, une organisation à but non lucratif aidant à l’éducation, au logement et à l’emploi des anciens détenus. Il commence à travailler comme stagiaire lorsqu’il fait la connaissance de Mikell Grand, coordinateur pour Music on the Inside, une autre organisation à but non lucratif mettant en relation des jeunes et des adultes touchés par l’incarcération avec des musiciens professionnels. |
| | | Snoopy Admin
Nombre de messages : 31857 Age : 49 Date d'inscription : 10/08/2006
| Sujet: Re: La musique en milieu carcéral Ven 20 Sep 2024, 12:49 | |
| La magnifique partition d'une pianiste de l'Opéra de Marseille en prison (Source)
Fabienne Di Landro, pianiste à l'Opéra de Marseille, anime un atelier de formation musicale au centre de détention de Salon. Une expérience généreuse et riche, pour les détenus comme pour elle
Fabienne Di Landro, 56 ans, est pianiste chef de chant à l'Opéra de Marseille. Elle anime bénévolement depuis quatre ans un atelier de formation musicale au centre de détention de Salon.
En quoi consistent ces ateliers ?
Fabienne Di Landro : Pendant trois heures, une fois par semaine, je propose une formation musicale. Les détenus font du solfège et, depuis l'an dernier, du piano. Je projette aussi de leur enseigner l'histoire de la musique. Une petite dizaine de détenus, volontaires, y participent. J'ai une base d'irréductibles qui sont là depuis trois ans, mais il y a aussi des nouveaux...
Pourquoi reviennent-ils ?
Fabienne Di Landro : Ils apprécient d'apprendre et de découvrir qu'ils peuvent se débrouiller avec une partition. Au chant, ils se régalent, même si j'avais quelques appréhensions au début. Au piano, ils sont ravis, d'autant plus que c'est une demande de leur part. Et puis, je crois que ça va au-delà de la musique. Il y a un rapport social presque normal qui se recrée - car n'oublions pas que nous restons dans un contexte de détention. Ils sont reconnaissants de savoir que le lundi, pendant mon jour de repos, je le passe avec eux. Il y a du respect de leur part. Je n'ai d'ailleurs jamais eu à subir un problème de comportement.
Ils font des concerts aussi ?
Fabienne Di Landro : Oui, histoire de mettre en pratique le solfège, sinon ce n'est pas intéressant. L'année dernière, ils ont chanté et joué du piano pour les détenus.
On n'imagine pas forcément des hommes qui purgent de longues peines chanter et faire du piano...
Fabienne Di Landro : Moi la première ! Le chant lyrique, en effet, est peut-être moins accessible que la variété. Et pourtant ! Après j'essaie de faire des choses qui correspondent aux détenus, en termes d'âge et de goût. On a chanté du Aznavour, de la chanson française ancienne, mais aussi des choeurs d'opéra. J'y tiens. Et ils adorent ça.
Ça ne les dérange pas de chanter de l'opéra devant leurs codétenus ?
Fabienne Di Landro : Pas du tout ! Je crois même qu'ils en chantent dans les coursives ! J'ai une anecdote qui illustre leur motivation : quand je les ai en atelier, ils ont accès au piano, mais le reste de la semaine ils ne peuvent pas s'entraîner. Certains ont alors fabriqué dans leur cellule un clavier en découpant des morceaux de carton. Ils ont même mesuré la taille des touches pour les reproduire fidèlement. Cela leur permet de travailler leur partition en cellule, tous les jours.
Qu'est-ce que peut leur apporter la musique, dans un contexte de détention ?
Fabienne Di Landro : Pour reprendre l'anecdote précédente, au lieu de penser à autre chose et à ruminer entre quatre murs, ils pensent à la musique. Ça veut dire qu'ils veulent avancer, qu'ils pensent pouvoir le faire. C'est énorme. Il y a une ouverture d'esprit qui se crée pour quelque chose qu'ils n'ont généralement pas côtoyé jusque-là. Je pense par exemple à un détenu qui ne s'intéressait pas à la musique avant l'atelier. Quelque temps après sa sortie de prison, je l'ai croisé aux portes ouvertes de l'Opéra de Marseille. Il y est resté la journée entière, de 9 h à 18 h. Il a même écouté un quatuor de trompettes qui se produisait à la fin. Il faut quand même avoir envie (rires) !
Je ne vais pas changer l'histoire, je sais très bien qu'apprendre à lire une partition ne va pas empêcher la récidive chez un détenu. Mais certains sont arrivés aux ateliers en disant qu'ils étaient incapables de faire quoi que ce soit et aujourd'hui ils font finalement partie de ceux qui se débrouillent le mieux en musique.
Ça les a revalorisés, à leurs yeux et aux yeux des autres. À mon avis, tout ce qui permet d'appuyer sur le positif est le bienvenu. Et il y a toujours du positif.
Qu'est-ce qui vous a amenée à faire ces ateliers ?
Fabienne Di Landro : Je faisais partie d'une association lyrique qui a fait quelques concerts au centre de détention. L'univers carcéral est un virus. Très vite, je me suis sentie à l'aise et j'ai eu envie d'y faire quelque chose. J'ai rencontré Georges Vialan qui fait énormément de choses pour le centre de détention. Il m'a donné encore plus envie de participer. Je ne savais pas trop comment au début. Ce sont les détenus qui ont demandé à faire de la musique. J'ai commencé, eux ont accroché. Et moi aussi.
Qu'est-ce que ça vous apporte, personnellement ?
Fabienne Di Landro : Ohlala ! Beaucoup de choses (rires). Déjà on se découvre des facettes qu'on n'aurait pas soupçonnées. On apprend à totalement faire abstraction de la raison pour laquelle les détenus sont là. Si je croisais le même individu dans la rue, en sachant ce qu'il a fait, je n'aurais sans doute pas la même vision de lui. On la met de côté. On se découvre une vraie ouverture d'esprit. J'ai l'impression, parfois, d'être dans un univers parallèle. Après, il y a aussi les retours : les détenus qui se découvrent des capacités, qui se dépassent. Je pense à un en particulier, très timide, qui ne voulait pas faire de concert. Je l'ai poussé pour qu'il en fasse au moins un. Maintenant, il les fait tous. Et plus derrière, devant ! Il a découvert le plaisir d'être apprécié par les autres.
Sur le plan humain, on découvre des choses sur soi-même et sur les autres. C'est important de travailler sur le positif. C'est dommage, dans le système carcéral actuel, de ne pas appuyer davantage sur ce positif, pour aider le détenu à se développer.
Vous portez un regard critique sur le système carcéral...
Fabienne Di Landro : Il y a beaucoup de choses à améliorer. On pourrait par exemple diminuer la surpopulation en imaginant d'autres peines pour ceux qui ont fait des choses de moindre importance.
Je pense par exemple aux travaux d'intérêt général. La détention a un coût faramineux pour la société. Et puis, l'enfermement n'est pas anodin. Il faut se dire qu'après la détention d'un détenu, la société le récupère. Et la société n'a pas intérêt à ce que le détenu soit plus amoché qu'avant. |
| | | Snoopy Admin
Nombre de messages : 31857 Age : 49 Date d'inscription : 10/08/2006
| Sujet: Re: La musique en milieu carcéral Ven 20 Sep 2024, 12:50 | |
| La musique classique peut-elle changer la prison ?
Un podcast à écouter ICI |
| | | Snoopy Admin
Nombre de messages : 31857 Age : 49 Date d'inscription : 10/08/2006
| Sujet: Re: La musique en milieu carcéral Ven 20 Sep 2024, 12:53 | |
| Au Portugal, des détenus initiés à l’opéra pour prévenir la récidive (Source)
Dans la prison pour jeunes de Leiria, le projet “Opéra en prison” permet aux détenus de découvrir l’art et la musique pour faciliter leur réinsertion.
La récidive criminelle est un problème persistant dans plusieurs pays. Dans de nombreux cas, les personnes qui ont purgé leur peine et qui ont été libérées finissent par réintégrer le système carcéral. En Europe, le taux peut varier de 21 à 63 % en fonction des pays et du mode de mesure, selon les statistiques du site World Population Review.
Face à ce problème structurel, de nombreuses études mettent en évidence les bienfaits de la musique. D’où la création de “Opéra en prison”, mené par la Musical Artistic Society of Pousos (SAMP, Société artistique musicale de Pousos) dans la prison pour jeunes de Leiria, au Portugal, qui accueille des détenus âgés de 16 à 21 ans. Cette “prison-école”, créée dans le but de favoriser la rééducation et la réinsertion sociale des jeunes afin d’éviter qu’ils ne retombent dans le système carcéral, est unique en son genre dans le pays.
Monter des représentations d’œuvres d’opéra en milieu carcéral : l’idée peut paraître originale, voire utopique. L’action menée par la SAMP depuis 2004 démontre pourtant que cela est non seulement réalisable, mais aussi vertueux pour les détenus, qui en ressentent encore l’impact bien après la fin des applaudissements et le baisser de rideau.
João* y contribue depuis 2019. “J’avais l’habitude de faire du beatbox dans la rue, mais quand je suis arrivé ici et que j’ai vu des micros, des enceintes, cela m’a tout de suite plu”, confie-t-il. Au fil des ans, il a participé à différentes représentations. Il se souvient de l’émotion ressentie en voyant sa photo imprimée sur une chemise, ce qui a provoqué la fierté de sa famille et lui a procuré un sentiment d’appartenance. “C’est une bonne expérience. J’ai beaucoup évolué, j’ai beaucoup appris aussi.” Il explique que ce projet lui a permis de surmonter sa timidité, de développer des compétences et de gagner en confiance. “J’ai appris à apprécier les petites choses.”
Pedro* et Rui* ont tous deux rejoint le mouvement, mais pour des raisons différentes. Lors de son incarcération, Pedro a suivi à distance le cours de musique et de numérique de l’Institut polytechnique de Leiria. Il a intégré “Opéra en prison” en tant que stagiaire, y voyant l’opportunité d’acquérir l’expérience professionnelle nécessaire à l’obtention de son diplôme. “Ce projet m’a permis d’évoluer professionnellement, en tant que technicien du son, d’acquérir des compétences en matière de communication et d’apprendre à travailler en groupe.” Une initiative qui lui a également fait prendre confiance en lui. Il souligne que la transformation de la salle, le Pavillon Mozart, en auditorium, lui a donné l’impression de se trouver “dans un vrai théâtre”.
Rui, quant à lui, s’est inscrit il y a un an et son intérêt n’a cessé de croître. Il a notamment pu réaliser son “rêve”. “J’ai chanté avec ma sœur sur scène, c’était un moment d’une intensité et d’une émotion rares. J’ai ressenti beaucoup de gratitude.” Il a aussi appris à connaître et respecter les différentes cultures présentes en prison. “Interagir avec des personnalités différentes est précieux dans le cadre du projet de réinsertion.”
Contrôler ses impulsions
La promotion de l’éducation, de la formation professionnelle et de l’accès aux offres d’emploi joue un rôle essentiel dans la prévention du risque de récidive et dans la réinsertion des jeunes dans la société. Utiliser l’opéra est donc logique. Deux fois par semaine, David Ramy, membre de la SAMP et coordinateur d’“Opéra en prison” sur le terrain, invite les détenus à chanter avec lui, en adoptant une approche passionnée et sans préjugés.
Il travaille non seulement directement avec les détenus, par le biais de l’enseignement musical, mais également avec leurs familles. “Ce projet se déroule à 40% ici et à 60% à Amadora, à Sintra, leurs villes d’origine, la plupart étant issus des quartiers”, explique David Ramy. Pour lui, l’opéra permet d’apprendre à “contrôler ses impulsions”. Depuis trois ans, l’initiative permet aux participants d’apprendre à chanter et à réfléchir avant d’agir.
“La figure clé est la main du chef d’orchestre. Il apprend à chanter et à respirer avant la note. On ne chante pas quand on veut. On respire, on pense à la note et on émet le son. C’est ce qu’on appelle le contrôle des impulsions. Nous partons du principe que 95% des jeunes de 16 à 23 ans qui se trouvent ici ne savent pas contrôler leurs impulsions. Pendant trois ans, à raison de deux fois par semaine, ils s’entraînent. Ensuite, lors d’une situation désagréable, avant de chanter la note, ils se rappellent de la nécessité de garder le contrôle.”
Les groupes se sont déjà produits sur différentes scènes. Une quarantaine de jeunes ont présenté leur adaptation de l’opéra de Mozart Così fan tutte.
Selon David Ramy, la SAMP tente de combler le fossé entre les détenus libérés et les offres d’emploi dans le secteur de la musique. “Nous sommes la source. La musique vient d’ici, la danse également, nous faisons venir des chanteurs, des peintres, des metteurs en scène, et nous faisons le pont. Nous travaillons avec de nombreux orchestres et professeurs. Ces intervenants forment un réseau de contacts qui aide les détenus.”
La participation à “Opéra en prison” est bénévole. Joel Henriques, coordinateur de l’éducation et de la formation au sein de la prison, y prend part depuis 2016 et le décrit comme “une expérience très enrichissante, à la fois pour la communauté carcérale et pour les jeunes qui font partie du projet. Ils commencent à comprendre qu’ils bénéficient de certains avantages, non seulement personnellement, puisqu’ils développent de nouvelles compétences, mais aussi de manière plus globale, puisque cela permet à la société de les considérer autrement.”
Les répétitions et les représentations ont lieu dans le Pavillon Mozart. Le bâtiment de la prison a été réhabilité grâce au financement de l’Union européenne, dans le cadre du programme d’innovation sociale du Portugal en 2021. La salle de répétition et de représentation est désormais équipée d’une scène, de fauteuils, d’un ordinateur et de divers instruments tels qu’une batterie, un piano et une guitare.
“Ce pavillon, qui était en ruines, a pu être reconstruit grâce à cet argent. La contribution financière de l’Union européenne est précieuse”, poursuit Joel Henriques. Mais “lorsqu’un individu ou un collectif est déterminé à réaliser un projet, celui-ci finit par se concrétiser d’une manière ou d’une autre, indépendamment des questions de financement”. Selon le coordinateur, il est également viable à long terme car “nous disposons déjà du matériel et de l’espace nécessaires. Le reste se joue à l’échelle humaine, à notre échelle.”
Au cœur du Pavillon Mozart, un groupe est en train de se former pour commencer la préparation d’un nouveau spectacle. Pendant trois ans, ses membres vont acquérir des compétences en chant, en respiration, en théâtre et en montage son et lumière. Les années précédentes, les groupes se sont déjà produits sur différentes scènes, dont celle du Grand Auditorium de la Fondation Calouste-Gulbenkian, à Lisbonne. Une quarantaine de jeunes y ont présenté leur adaptation de l’opéra de Mozart Così fan tutte à un public ému et enthousiaste.
Selon David Ramy, “Opéra en prison” se fonde sur une approche de confiance et sur la création d’un environnement égalitaire afin de mettre tout le monde au même niveau, participants comme intervenants. Les progrès sont évalués en fonction des prestations réalisées, des changements de comportement observés et des attitudes adoptées à l’égard de la musique et de la vie en dehors de la prison.
Bien qu’il n’ait pas été possible de contacter les anciens détenus ayant participé au projet, David Ramy rapporte que certains d’entre eux restent attachés à la musique, puisqu’ils estiment qu’elle a joué un rôle capital dans leur réinsertion au sein de la société. C’est le cas de Diogo qui, depuis sa libération, “occupe un poste de technicien en chef au sein de la fondation Gulbenkian”.
L’impact sur la réinsertion
Joel Henriques souligne les changements observés chez les participants. Ils apprennent “à travailler en équipe, une compétence qui leur fait souvent défaut” et à “se maîtriser, puisqu’ils ont plusieurs séances et doivent respecter des consignes. Lors des représentations, ils se métamorphosent et semblent beaucoup plus impliqués. Ils prennent conscience qu’ils sont capables de réaliser des actions sans mettre en danger les autres. Ils acquièrent cette notion qu’ils peuvent endosser un rôle à l’extérieur tout en étant dans la confiance, l’estime de soi et le respect des autres. Ces conditions permettent aux jeunes de sortir de prison sans récidiver et d’entretenir des relations plus saines avec les autres.” Joel Henriques précise également que “cet espace et ce projet leur apportent de la liberté dans un environnement où ils sont constamment sous surveillance et sous contrôle”.
Pour lui, cette expérience artistique facilite la réinsertion des détenus dans la société. “Je ne pense pas que cela s’applique à tout le monde, mais chez certaines personnes, les compétences acquises, le fait de savoir comment se comporter, comment écouter, de devoir travailler pour atteindre un objectif, perdurent. La participation à de grands spectacles, en particulier, constitue une expérience marquante qui peut être transposée à d’autres aspects de la vie, dans le domaine relationnel comme professionnel. Je suis toujours en contact avec des personnes qui sont sorties de prison, et je constate qu’il y a eu une évolution.”
Ancien participant, António* assure qu’il a trouvé une nouvelle perspective à sa vie grâce à “Opéra en prison”. Pendant deux ans, il a eu l’occasion de se produire sur scène tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la prison. Il fait part de l’émotion procurée par la présence de membres de sa famille lors d’une représentation à la Fondation Calouste-Gulbenkian. “J’ai vu l’émotion de ma mère, de mon frère, qui comprenaient que j’essayais de changer. Cela nous donne l’occasion de leur faire savoir que nous changeons et que nous empruntons un chemin de vie différent. Je me sens libre ici, à l’opéra.” Ce qui lui sera le plus utile une fois sorti de prison, c’est le “respect des autres”, assure-t-il.
La stigmatisation des anciens détenus est un facteur clé qui contribue à la hausse du taux de récidive chez les jeunes. C’est précisément sur ce point que les actions menées à l’intérieur et à l’extérieur de la prison peuvent faire la différence. Si, au départ, António voyait le projet comme une manière de passer le temps, il a ensuite réalisé qu’il l’aidait à changer la perception qu’il avait de lui-même et de la société, car les spectateurs assistent à la représentation “sans préjugés” et comprennent que “la prison peut aussi permettre d’aider les individus, en essayant de les remettre sur le droit chemin. Le public assiste directement à une forme de réinsertion sociale.”
Selon David Ramy, la musique permet de “changer la vie, pour le meilleur. Elle change tous les individus qui pénètrent dans cette prison.” Le coordinateur l’assure : l’opéra et les représentations permettent de déconstruire les stéréotypes et de refaçonner les relations entre les détenus et leurs familles qui ont “perdu espoir”.
Joel Henriques reconnaît également l’importance de ces représentations dans la société. “L’accueil a été surprenant. [Le public] ne s’attendait pas à ce que ces jeunes, à qui l’on attribue souvent des comportements déviants, se produisent sur scène et performent de la sorte.” Ces représentations favorisent en outre une meilleure relation entre les détenus et “notamment les surveillants pénitentiaires qui exercent plus de contrôle sur eux. La musique leur offre une autre vision des choses, ils comprennent mieux le point de vue de l’autre et gagnent en empathie.”
David Ramy, lui aussi, note cette évolution : “Leur façon d’interagir avec les gardiens est fondamentalement différente. Lorsqu’ils viennent pour annoncer “la séance est terminée, tout le monde sort”, les détenus ne réagissent pas de la même manière que l’année précédente. Ils respirent, contrôlent leurs impulsions, plaisantent, demandent une minute de plus. C’est complètement différent.”
Les défis de l’opéra
Malgré tout, “Opéra en prison” rencontre également des limites. Le manque de programmes de réinsertion et de soutien à la réinsertion sociale constituent deux facteurs de récidive criminelle que ni la musique ni l’initiative ne peuvent permettre de surmonter.
Selon David Ramy, le plus grand obstacle réside dans le manque de suivi après la sortie : “Nous devrions pouvoir proposer un projet qui perdure au-delà de la prison, qui puisse s’intégrer dans les difficultés de la vie. Lorsque ces personnes sont libérées, elles disposent de peu de temps. Le temps qu’elles ont, elles le consacrent à trouver un travail, de l’argent, une maison, une voiture, à organiser leur avenir. Il faudrait leur laisser le temps de trouver un projet social que nous pourrions superviser.”
Le manque de suivi de la part de l’établissement pénitentiaire, et plus largement au Portugal, crée d’autres difficultés. Il n’existe pas de données sur le taux réel de récidive criminelle, confie Joel Henriques : “Nous ne disposons pas de données précises, mais compte tenu de leur âge, en cas de récidive, ils ne reviendront pas dans cette prison car ils seront considérés comme des adultes. Je sais que certains récidivistes ne sont jamais revenus ici.”
En ce qui concerne les détenus qui ont participé à “Opéra en prison” et qui ont déjà été libérés, “aucun n’est revenu”. La prison ne garde pas contact avec eux après leur libération. “S’ils sont en liberté conditionnelle, ils restent en contact avec le système. Nous prenons contact avec eux, ainsi qu’avec leur famille et les personnes qui les accompagnent à l’extérieur. S’ils sont libérés sans condition, la prise de contact dépend uniquement de leur volonté.”
Joel reconnaît que le manque de ressources et les restrictions internes empêchent parfois certaines séances de se tenir. Un dernier obstacle réside dans le manque de temps alloué aux répétitions, du fait des obligations de la vie carcérale. Chaque répétition ne dure que deux heures, à raison de deux fois par semaine.
Un échange de solutions
David Ramy tire les conclusions suivantes : “Il existe des pratiques transversales. L’enseignement de la respiration et de la maîtrise de soi. La perméabilité, le multiculturalisme, toujours à partir de leur travail et en adoptant un esprit de cocréation.”
Cependant, “les établissements pénitentiaires doivent consacrer plus de temps à la formation de ces jeunes. Il leur faut agir davantage sur le levier du changement, et moins sur le levier du contrôle. Nous devons prendre le risque de les rapprocher de leurs familles. Nous devons veiller à ce qu’ils ne passent pas de mains en mains comme des objets. Les détenus doivent pouvoir passer davantage de temps en dehors de leur cellule, en participant à diverses activités.”
Même si le taux exact de récidive criminelle reste inconnu, une certitude demeure : aucun des détenus libérés ayant participé au projet n’est retourné à la prison pour mineurs de Leiria. Si l’opéra ne permet pas d’éradiquer entièrement le taux de récidive criminelle, il peut toutefois sérieusement y contribuer.
Cet article a été réalisé dans le cadre du projet The Newsroom 27, qui a reçu le soutien financier de l’Union européenne. L’article reflète le point de vue de son auteur et la Commission européenne ne peut être tenue responsable de son contenu ou usage. |
| | | Snoopy Admin
Nombre de messages : 31857 Age : 49 Date d'inscription : 10/08/2006
| Sujet: Re: La musique en milieu carcéral Ven 20 Sep 2024, 12:55 | |
| Fresnes : Des détenus jouent les sopranos et s’accordent un moment de liberté (Source)
PRISON BREAK•Une quinzaine de détenus de la prison de Fresnes (Val-de-Marne) participent depuis décembre à un atelier d’initiation à la musique classique avec un concert prévu le 5 avril à la prison, avant une diffusion sur les ondes de Radio France
«On inspire et on relâche les épaules. » La soprano Johanne Cassar détaille l’échauffement à une douzaine de jeunes hommes perchés sur des gradins. Sur l’estrade, en face, des instruments de musique, des percussions et un piano droit dont a pris possession Emmanuel Christien. L’auditorium, une grande salle rectangulaire aux hautes fenêtres obturées par de lourds rideaux noirs, n’est éclairé que par des néons fatigués et blafards, créant une lumière digne d’un centre pénitentiaire. Ce qui tombe bien puisqu’il s’agit de l’ancienne chapelle de la prison de Fresnes (Val-de-Marne) et que les apprentis chanteurs sont aussi des détenus. « Maintenant, on fait trois "ch" courts et "un" ch long », demande Johanne Cassar.
C’est la soprano qui est à l’origine de ce projet intitulé Empreinte musicale. « J’ai déjà mené un projet similaire à la prison pour femmes de Fleury-Mérogis, raconte-t-elle C’était une super expérience qu’on a voulu reconduire avec des hommes à Fresnes. » Ce projet atypique est donc porté par l’association Coloratura, dont la soprano est la directrice artistique, et par l’orchestre philharmonique de Radio France, qui dépêche à chaque session un musicien différent. Enfin, Empreinte musicale bénéficie du soutien de la fondation Art explora et bien sûr de celui de l’administration pénitentiaire qui a la haute main sur les multiples autorisations nécessaires. Lancé en décembre dernier avec un trou d’air en janvier pour cause de Covid-19, le projet consiste en un atelier hebdomadaire d’environ deux heures avec pour objectif un concert à Fresnes le 5 avril et un enregistrement deux jours plus tard.
Et ce lundi après-midi, à 15 jours du concert, la répétition bat son plein. Sous l’autorité naturelle de Johanne, les apprentis chanteurs entonnent le fameux Va Pensiero de Giuseppe Verdi, accompagnés par Emmanuel au piano. « Oui je sais que ce n’est pas facile, car ce n’est pas votre langue », les encourage la soprano. Même si tout n’est pas parfait, le chœur prend forme et l’émotion se transmet progressivement. L’ambiance n’en reste pas moins détendue, avec pas mal de rigolades. « C’était un peu le bazar au début », concède Johanne. « Ils réagissaient à chaud, en direct, pendant qu’on jouait, alors qu’on a plus l’habitude que ce soit à la fin », ajoute Jérémie Maillard, violoncelliste à l’orchestre de Radio France et en charge d’organiser la venue des collègues. C’était aussi le but de ce projet : « Faire se rencontrer deux mondes qui ne se connaissaient pas du tout, la détention et la musique classique », précise la chanteuse.
« Soyez pro les gars »
Et c’est sûr que parmi les participants, bien peu avaient été au contact de la musique classique. « Avant de venir ici, je ne connaissais pas du tout », témoigne Walid, amateur de musiques urbaines et grand fan de Jul. « Je n’écoute jamais de musique classique », confirme A., bonnet noir vissé sur la tête. La plupart des jeunes hommes présents ont atterri là car ils ont écrit aux services pénitentiaires d’insertion et de probation (SPIP) pour participer aux activités culturelles, sans savoir exactement de quoi il en retournait.
« C’était drôle, c’était une découverte », confirme A., tandis que Max, grand bonhomme à la dent en or, avoue avoir été « choqué » : « On a pas l’habitude mais c’était marrant ». « Quand je suis arrivé, je me suis demandé ce que je foutais là, enchérit Walid. J’étais sceptique. En plus moi, j’ai la voix cassée, mais je suis venu une deuxième fois et ça s’est enchaîné. » Au point de devenir un des leaders vocaux du groupe et de mettre de l’ordre quand celui-ci se dissipe. « Soyez pro les gars », réclame-t-il quand les chanteurs en formation montent sur scène, avant de les inciter à se mettre debout plutôt qu’assis.
« On sent une évolution au fur et à mesure des ateliers, l’ouverture à la musique classique se fait progressivement, note Johanne. Par exemple, A. faisait partie des plus retors au début, mais maintenant il connaît tous les textes par cœur et ferme les yeux quand il chante. » « J’ai la même approche avec eux qu’avec ceux à qui j’enseigne en conservatoire », explique Jérémie qui chercher avant tout à « intéresser les détenus ». Et ça marche puisque les jeunes l’interrogent sur son violoncelle puis lui demandent de se déplacer pour mieux l’écouter : « On peut vous entendre jouer ? Nous, on ne vous a pas entendu. »
Sortir du quotidien carcéral
Mais, Jérémie espère que ces ateliers puissent apporter aux détenus autre chose que le simple apprentissage du chant : « Le challenge, c’est aussi de leur montrer que la sensibilité, c’est un plus alors même que le monde de la prison est réputé dur. J’ai moi-même cherché ma liberté avec la musique et j’ai envie de partager ça avec ceux qui en sont privés. » Cet atelier est aussi une respiration pour les détenus. « Ça fait partie des rares portes de sorties, concède Camille du SPIP. Avec cet atelier, ils sont ensemble, pas ou peu surveillé, c’est un espace où l’intime a encore sa place. » « C’est un moment hors de la cellule, assez joyeux, on a l’impression d’être dans une situation normale », complète Emmanuel.
« Je voulais sortir de ma cellule », explique A. qui participait déjà à l’activité théâtre. Même écho du côté de Djibril et de Karim. Ce dernier n’en peut plus de « rester enfermé 22 heures/24 dans moins de 9 m²». «Il n’y a pas de douche, pas de frigo, des punaises de lit », dénonce-t-il et assure que « sans ces activités, on deviendrait fou ». Selon l’observatoire international des prisons, la densité carcérale atteignait au 1er janvier 135,6 % chez les hommes à Fresnes. Malgré cela, Max se concentre sur le chant et « espère assurer sa place » pour le concert. Walid lui est confiant : « On ne va pas se ridiculiser en vrai. » |
| | | Snoopy Admin
Nombre de messages : 31857 Age : 49 Date d'inscription : 10/08/2006
| Sujet: Re: La musique en milieu carcéral Ven 20 Sep 2024, 12:58 | |
| Voilà quelques exemples donc. Il y a pas mal d'articles sur le net. Je vous laisse chercher pour ceux qui s'intéressent au sujet. |
| | | Icare Admin
Nombre de messages : 17861 Age : 60 Date d'inscription : 13/11/2009
| Sujet: Re: La musique en milieu carcéral Ven 20 Sep 2024, 15:17 | |
| Intéressant. Je lirai plus attentivement tout ça. |
| | | joachim Admin
Nombre de messages : 27767 Age : 78 Date d'inscription : 19/08/2006
| | | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: La musique en milieu carcéral | |
| |
| | | | La musique en milieu carcéral | |
|
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |