En France, l'enseignement de la musique au XVIIIe siècle est dispensé par les maîtrises religieuses et l'enseignement individuel. Or en 1789 les maîtrises sont supprimées, soit environ 120 à 140 écoles en France. Il ne resterait donc que l'enseignement individuel, raison pour laquelle est créé le Conservatoire à Paris. Il fallait former des musiciens pour les orchestres militaires.
Ce que l'on ne dit pas, c'est que les maîtres de musique militaires ont pris le relai des maîtrises dès l'officialisation de leurs orchestres en 1766. Les effectifs étant trop réduits (8 musiciens par régiment en 1788), "la plupart des régiment supprimaient la moitié des tambours pour avoir des musiciens" dès 1783, nous dit le Gal Bardin. Ce qui signifie qu'un enseignement musical était dispensé puisque les tambours ne lisent pas la musique. Instrumentistes d'ordonnance, ils apprennent les batteries à l'imitation et transmettent des ordres sans jouer de musique. La moitié des tambours suivant l'organisation de 1776 reprise en 1791 avec 103 régiments de deux bataillons de 10 compagnies avec 1 tambour par compagnie, cela fait 10 tambours élèves musiciens par régiment. Avec 103 régiments, on retrouve presque les effectifs maîtrisiens disparus en 1789.
Ces effectifs sont largement dépassés avec la levée en masse de 1792, puisque les effectifs de l'armée quadruples, et donc les orchestres. Même si les campagnes avec les déplacements et les combats n'offraient pas toute la sérénité nécessaire à l'enseignement musical, il n'empêche que cet enseignement existait. Le Pr Gumplowicz dans son ouvrage Les Travaux d'Orphée observe que les orchestres militaires sont de véritables "petits conservatoires du peuple".
Cet enseignement musical militaire est règlementé en 1841 par la méthode Wilhem, et confirmé par le règlement en 1861 et 1872.
De plus, on dit rarement que les chefs de musique à la retraite sont souvent à l'origine des conservatoires et des harmonies municipaux, poursuivant leur travail d'enseignement auprès de la population.
On peut considérer qu'Adolphe Sax, inventeur de l'orchestre de plein air, choisit de s'installer en France, déclinant les propositions russes et anglaises, parce qu'il y trouve des musiciens mieux formés qu'ailleurs en Europe. Ce niveau est atteint par l'enseignement dispensé dans les orchestres militaires. Pourtant aucune histoire de la musique et de son enseignement n'évoque cette formation qui perdure au moins jusqu'à la déclaration de guerre en 1914.
Comment se fait-il que cette formation de grande ampleur ne soit jamais prise en compte ?