Un prélude est un genre de musique instrumentale et sert généralement d'introduction.
Le prélude apparaît dans une grande variété de fonctions et, d'une grande liberté d'écriture ne présente, a priori, pas de forme, caractère ou tempo. Il est isolé, ou forme diptyque avec une autre pièce (prélude et fugue) ou il intègre un genre plus vaste (suite, sonate baroque de Corelli).
Il se présente au cours de la liturgie, une cérémonie publique, une œuvre musicale (fugue, partita, suite de Bach), un concert (Couperin), un chant religieux (choral, cantate) ou profane (chanson, aria, chœur, etc.), un opéra (Wagner, Verdi).
L'œuvre peut également ne préluder à rien, en tant que composition indépendante et se trouve alors souvent organisé en cycle (Chopin, Debussy, Scriabine, Rachmaninov…). Il est généralement bref, mais peut également être plus développé.
Les origines du prélude sont intimement liées au test de l'accord de l'instrument, comme la pratique du tastar de corde des luthistes, l’intonazione et le Choralvorspeil qui donne aux chanteurs le ton ou leur rappelle la mélodie. Il est en outre lié à plusieurs autres genres instrumentaux qui sont : l'improvisation, le ricercare, la toccata, la fantaisie et l'ouverture ; mais également, l'interlude, le postlude et la retirada.
L’étymologie du mot provient du latin : prae, « qui précède », et ludo, -es, -ere, « jouer ». C'est « une pièce instrumentale sans forme particulière, servant d’introduction. »
Histoire
Dès la chanson polyphonique du xve siècle, le prélude se rattache toujours étroitement à l'élément vocale qu'il précède (Guillaume Dufay, Je languis en piteux martire), où les instruments jouent prélude, interlude et postlude.
À l'origine, le prélude consiste en une improvisation de l'artiste pour se préparer à jouer et lui permettre de vérifier l'accord de son instrument — important pour les instruments qui se désaccordent très vite, tels le luth : dès 1508, Joan Ambrosio Dalza compose un tastar de corde, suivi d’un ricercare, prémices du prélude et fugue – ou, dans le cas des clavecinistes et des organistes, d’essayer leur instrument. Les premières Tablature d'orgue d'Adam Ileborgh (1448) livrent cinq préludes, brefs, mais d'une extraordinaire liberté et invention, « héritage probable d'une tradition ancienne ». Seize figurent dans le Buxheimer Orgelbuch (1470).
Ainsi l’écrit François Couperin dans son Art de toucher le clavecin : « non seulement les préludes annoncent agréablement le ton des pièces qu’on va jouer, mais ils servent à dénouer les doigts et souvent à éprouver des claviers sur lesquels on ne s’est point encore exercé. »
Prélude, fugue et suite
Pendant la période baroque, le prélude précède souvent la fugue ou une suite de danses. La structure et l’écriture du prélude sont très diverses : chez Jean-Sébastien Bach, qui fait précéder 48 fois un prélude à une fugue dans les deux cahiers du Clavier bien tempéré, le prélude adopte soit un véritable caractère introductif à la fugue, soit un caractère résolument opposé à ladite fugue. Bach utilise également « le style polyphonique soit sous la forme ancienne du ricercare, soit sous la forme du bicinium, soit encore en imitations à plusieurs voix ».
Prélude non mesuré
Dans la tradition française du xviie siècle, et notamment chez Louis Couperin, ce caractère improvisé est souligné par le fait qu'il est souvent « non mesuré » c'est-à-dire sans que la partition n’indique ni la place des barres de mesure, ni la durée des sons, tous notés par des rondes, des « liaisons » (comme les appelle Monsieur de Saint-Lambert dans son traité « Les principes du clavecin » de 1702) surmontant certaines notes dont le son doit être prolongé. L'interprète dispose donc d'une grande liberté d'exécution qui lui permet de mettre son expressivité et sa sensibilité en valeur. Le premier Prélude pour clavecin de Jean-Philippe Rameau, bien qu'écrit en 1706, comporte encore une première section non mesurée. Les derniers préludes non mesurés semblent avoir été écrits par Nicolas Siret dans son Livre de pièces de clavecin édité à Paris en 1719 où ils ne sont que partiellement non mesurés.
Musique de salon et de concert
Durant la période romantique, se détachent plusieurs constantes. D’une part, l’art de préluder reste une préoccupation, comme en témoignent diverses méthodes : Méthode simple pour apprendre à préluder en peu de temps avec toutes les ressources de l’harmonie (Grétry, 1802) ; Die Kunst des Präludierens in 120 Beispielen, op. 300 (« L’art de préluder en 120 exemples ») publié par Carl Czerny à Vienne en 1833 ; ou encore le Traité d’harmonie du pianiste. Principes rationnels de la modulation pour apprendre à préluder et à improviser de Friedrich Kalkbrenner (1849).
D’autre part, le prélude se libère complètement de ses fonctions antérieures et devient une pièce totalement autonome et souvent très virtuose, notamment chez Tommaso Giordani et Jean-Jacques Beauvarlet Charpentier. Le prélude atteint des sommets chez Frédéric Chopin, qui le traite soit librement, soit sous forme de lied ou de rondeau.
En outre, César Franck l’insère à nouveau en tête d’une série de pièces et lui donne une envergure inédite en France (Prélude, Choral et Fugue, 1884 ; Prélude, Aria et Final, 1887). Alkan en laisse également un recueil.
Prélude, genre indépendant
Au xxe siècle, de nombreux compositeurs nous laissent des préludes devenus célèbres, souvent organisés en cycles : Claude Debussy compose des préludes descriptifs, à la suite, Stephen Heller, Florent Schmitt et Erik Satie. Gabriel Fauré, auteur de neuf préludes, traite la forme de manière très organisée. D’autres compositeurs écrivent des recueils de préludes, tels Scriabine, Rachmaninov, Kabalevski, Szymanowski, Frank Martin, Martinů, Villa-Lobos, Messiaen et Gershwin.
Œuvres
Bach, 48 préludes du Clavier Bien Tempéré (1722 et 1744)
Chopin, 24 préludes (entre 1835 et 1839)
Boëly, Préludes opus 20, opus 22, opus 33 (1805–1857) et de nombreux autres dans divers opus.
Scriabine, Préludes (entre 1889 et 1914)
Schmitt, 3 Préludes, op. 3 (1890–1895) et 10 Préludes, op. 5 (1896)
Jongen, 13 Préludes, Op. 69 (1922) dédiés à Emile Bosquet
Rachmaninov, 24 préludes (1903 et 1910)
Debussy, 24 préludes (entre 1909 et 1913)
Fauré, 9 préludes (entre 1909 et 1910)
Ravel, Prélude (1913)
Vierne, 12 préludes (1914-1915)
Ottorino Respighi, 3 préludes (1921)
Gershwin, Trois préludes (1926)
Messiaen, Huit préludes (entre 1928 et 1929)
Martinů, Huit préludes (1929)
Kabalevski, 24 préludes (entre 1943 et 1944)
Chostakovitch, Vingt-quatre préludes et fugues (1950-1951)