Bernard RANDS, né en 1934

Eléments biographiques:

Grâce à un catalogue de plus d'une centaine d'ouvrages publiés et de nombreux enregistrements, Bernard Rands est présenté comme une figure majeure de la musique contemporaine. Son travail Canti del Sole, créé par Paul Sperry, Zubin Mehta et l'Orchestre philharmonique de New York, a remporté le prix Pulitzer en 1984. Ses grandes suites orchestrales, Le Tambourin, a remporté le "Kennedy Center Award" en 1986 à Friedheim. Son travail Canti d'Amor, enregistré par Chanticleer, a remporté un prix Grammy en 2000. Né à Sheffield, en Angleterre, en 1934, son 80e anniversaire a été marqué sur le plan international par la réalisation d'une centaine de concerts, émissions de radio et de télévision en l'honneur de sa musique. Rands a émigré aux États-Unis en 1975, devenant un citoyen américain en 1983. Il a été intronisé par l'Académie américaine des Arts et Lettres en 2004 et par le Lincoln Académie Illinois en 2014.

les chefs d'orchestre Barenboim, Boulez, Berio, Davis, Eschenbach, Maazel, Marriner, Mehta, Muti, Ozawa, Rilling, Salonen, Sawallisch, Schiff, Schuller, Schwarz, Silverstein, Slatkin, Spano, von Dohnanyi, et Zinman, parmi beaucoup d'autres, ont programmé sa musique. Rands a été compositeur en résidence à l'Orchestre de Philadelphie pendant sept ans. Grâce à cette résidence, Rands, en collaboration avec Riccardo Muti, a apporté une contribution merveilleuse à la musique de notre temps.

De nombreuses commandes provinrent de la salle de concert Suntory de Tokyo, l'Orchestre philharmonique de New York, au Carnegie Hall, l'Orchestre symphonique de Boston, le Cincinnati Symphony, le Los Angeles Philharmonic, l'Orchestre de Philadelphie, le BBC Symphony Orchestra, l'Orchestre symphonique national, l'Internationale Bach Akademie, Eastman Wind Ensemble, Chicago Symphony Orchestra et l'Orchestre de Cleveland. Beaucoup d'œuvres de musique de chambre ont résulté de commissions de grands ensembles et festivals du monde entier. Son opéra de chambre a été commandé par l'Aspen Music Festival and School pour son cinquantième anniversaire en 1999. Son opéra "Vincent", sur un livret de JD McClatchy, a été commandé par l'Indiana University Opera School où il fut produit et acclamé par la critique, en 2012.

La plus récente oeuvre d'importance de Bernard Rands, son Concerto pour Piano et Orchestre, commandé par l'Orchestre symphonique de Boston pour célébrer le 80e anniversaire du compositeur, a reçu ses prestations en grande première à Boston en Avril 2014 avec Jonathan Biss comme soliste et sous la direction de Robert Spano. Les performances de première européenne eurent lieu durant mai 2014, à Leipzig par le Gewandhaus - également Biss - dirigé par Sir Andrew Davis suivies d'une performance aux BBC Proms, Londres en Août 2014, avec le BBC Scottish Orchestra dirigé par Markus Stenz. En Juin 2014, le festival FOCUS, pendant trois jours à la BBC, a été entièrement consacré à la musique de Rands avec de nombreux orchestres et ensembles de chambre: elle fut diffusée dans toute l'Union européenne. Depuis le Concerto pour Piano et Orchestre, Rands a composé des chansons folkloriques, qui ont été commandées par le Festival de Tanglewood où elles reçurent leur première en Juillet 2014.

Bridge Records enregistre et édite, en Décembre 2013, un cd de cinquante ans de musique pour piano de Rands: "Bernard Rands - Piano Music de 1960 à 2010", interprétée par Ursula Oppens et Robert Levin.

En enseignant dévoué et passionné, Rands a été compositeur invité dans de nombreux festivals internationaux et compositeur en résidence dans les festivals de Tanglewood et Aspen. Rands est le Walter Bigelow Rosen professeur émérite de Harvard. Il a reçu des diplômes honorifiques de plusieurs universités américaines et européennes.

Bernard Rands vit à Chicago avec sa femme, le compositeur Augusta Read Thomas.

https://www.youtube.com/watch?v=leKJX5eWP1E

Je connais ce compositeur au travers de son oeuvre symphonique, du moins par le biais de trois d'entre elles que j'ai réécoutées ce soir, avant de m'abandonner dans les bras de Morphée. Il s'agit de Le Tambourin, Suites 1 & 2 pour orchestre, Canti dell'Eclisse pour voix de basse et orchestre puis Ceremonial 3 pour orchestre, le tout interprété par "The Philadelphia Orchestra sous la direction de Riccardo Muti et de Gerard Schwarz, Thomas Paul étant la voix de basse. J'avoue que la première fois que j'ai écouté ces oeuvres intenses et parfois touffues, je n'ai pas vraiment accroché, que le chemin à travers la poétique de cette musique s'est tracé au fil de plusieurs écoutes (jamais successives, bien évidemment, sans forcing), des écoutes espacées dans le temps, parce que l'envie d'y revenir s'est faite sentir à un moment donné. Si ce ne sera sans (aucun) doute jamais mon genre musical de prédilection, c'est un "symphonisme" qui ne m'a à aucun moment irrité par trop d'emphase, de luxuriance ou de lourdeur. Il y a un bel équilibre entre les passages intenses et touffus et les passages plus allégés, clairsemés, dépouillés. Parmi les six mouvements qui constituent Le Tambourin, le cinquième est assez fascinant par le climat obsessionnel et mystérieux qu'il instaure, son développement, son orchestration, etc...A noter aussi, dans chacune de ces trois créations, des trouvailles sonores parfois très attractives au sein d'un tissu harmonique certes complexe mais peu hermétique: j'ai pu aisément (surtout virtuellement ) naviguer parmi des gestes symphoniques tantôt rudes ou abruptes, tantôt souples et hospitaliers. L'oeuvre qui aura cependant le mieux retenu mon attention est Canti dell'Eclisse pour basse et orchestre; une envoûtante évolution de celui-ci et de sa matière sonore autour de la voix m'a définitivement conquis.

A propos de Le Tambourin, Suites 1 & 2 de Bernard Rands par Bernard Jacobson:

<<Le Tambourin est un opéra inachevé sur le peintre hollandais Vincent van Gogh. Son sous-titre est "Vincent", qui est la façon dont l'artiste signe habituellement son travail:

Achevée en octobre 1984, chacune des deux suites qui peuvent être jouées séparément, se compose de trois mouvements courts, notés pour grand orchestre. Le caractère musical de chacun des mouvements individuels a été motivé par des caractéristiques visuelles spécifiques trouvées dans certains tableaux et dessins de Van Gogh. La représentation musicale du sujet des peintures n'était ni une préoccupation ni une considération. La relation se limite plutôt à la technique en matière d'harmonie et de dissonance, de couleur et de lumière, d'énergie et d'intensité du coup de pinceau, de forme, de clarté et de focalisation de l'image, et de leur déploiement structurel global. Néanmoins, Van Gogh a peint et dessiné avec une telle ferveur et passion que souvent les aspects techniques de ce travail sont des traductions simultanées de cette propre agitation intérieure, anxiété, rage, joie, amour et dépression.>>

Bernard Rands est de ces compositeurs américains que j'écoute peu souvent et n'ai pas vraiment cherché à approfondir au fil du temps, au même titre que Joseph Schwantner et Dominick Argento, ayant accordé beaucoup plus d'attention à des figures de la musique savante américaine tels que George Antheil, John Corigliano ou encore Ned Rorem et Richard Danielpour, ce dernier mettant beaucoup d'humanité dans sa musique et qui fut parfois considéré comme quelqu'un qui compose en charentaises, un jugement que je ne partage pas. Certes, il peut paraître moins audacieux qu'un Bernard Rands, moins engagé dans le modernisme qu'un Edgar Varese, mais son oeuvre propose autre chose d'à la fois plus lyrique et de plus tendre, des qualités non négligeables à partir du moment où ce sont des musiques qui m'apportent de vraies émotions. L'approche de Bernard Rands est plus radicale, plus intellectuelle, plus fouillée, sans doute plus recherchée. C'est pourtant sa musique que j'ai souhaité réécouter aujourd'hui, déjà parce qu'elle correspondait au thème de mon cycle actuel, puis parce que je souhaitais retrouver ces moments qui m'avaient séduit lors des précédentes écoutes. Je fus stupéfait de relire cet extrait de mon précédent commentaire qui souligne exactement ce que je viens de ressentir sur le même morceau, je cite: <<Parmi les six mouvements qui constituent Le Tambourin, le cinquième est assez fascinant par le climat obsessionnel et mystérieux qu'il instaure, son développement, son orchestration,>> Et à propos du morceau lui-même selon Bernard Jacobson: <<Danse à Arles: Un complexe de figures dansantes, peintes de couleurs sombres avec les cheveux noirs de jais et les chapeaux des femmes donnant une qualité macabre à la scène sociale.>> J'aime personnellement beaucoup la construction de cette "Danse à Arles", bénéficiant d'une orchestration soyeuse avec une harpe aussi discrète que touchante. Un morceau comme ça, d'une durée de quelques minutes - je ne sais combien au juste - suffit à me rendre un album précieux duquel je ne saurais et ne voudrais me séparer.