Lucien Rebatet

Bonjour à tous,

C'est amusant, parce que sur tous les différents forums musicaux que j'ai eu l'occasion de fréquenter, il existait un topic consacré à cet auteur polémique, fil sur lequel la plupart du temps les membres s'écharpaient joyeusement .
Pour ceux ou celles qui l'ignorent, Lucien Rebatet est un écrivain français, par ailleurs excellent si j'en crois la plupart des critiques consacrées à son ouvrage phare Les deux étendards, qu'il est assez difficile de se procurer entre autre parce que son auteur lui-même est sujet à polémiques. Collaborationniste convaincu, Rebatet, même s'il a avoué reconnaître qu'il pensait avoir fait fausse route, n'a jamais regretté un engagement qu'il jugeait à l'époque légitime pour des raisons qui lui sont propres, faisant preuve en ce sens d'une certaine dignité que n'ont pas montré nombre d'artistes prompts à s'auto-flageller et à se chercher des excuses pour leurs sympathies pro-fascistes une fois l'armistice signée.

Ce monsieur, qui vers la fin de sa vie a pu être rattaché à la mouvance "aristocrate libertaire", ce que la lecture de ses œuvres m'a l'air de confirmer, est par ailleurs (d'où mon post), l'auteur d'une Histoire de la musique parue à la fin des années 1960. Livre qui m'a fait découvrir la musique occidentale lorsque je l'ai ouvert il y a quelques années. Livre remarquablement rédigé, à la fois brillant et accessible. Et surtout, livre assez subjectif, ce qui fait tout son intérêt : l'auteur ne se contente pas d'empiler les noms de compositeurs, il critique aussi (parfois très durement, y compris certains musiciens assez populaires sur ces pages) l'œuvre de ceux qu'il évoque. Mais il ne le fait pas gratuitement : on sent bien que c'est un mélomane très au courant, qui étaye ses opinions de l'avis de musicologues fort reconnus. Certes, certains propos semblent parfois dater d'un autre âge (ses fréquentes évocations du "génie d'un peuple", de penchants "propres à la race" des compositeurs qu'il juge impitoyablement). Certes, Rebatet se montre assez élitiste, et j'imagine à peine les piques qu'il aurait pu destiner à Steve Reich ou Philipp Glass s'il avait vécu assez vieux pour les entendre. Certes, cet ouvrage commence à dater, archivistique et musicologie ont fait du chemin depuis, et il a probablement orienté mes goûts, mais il a aussi sans doute aiguisé mon sens critique, plus que ne l'aurait fait une simple encyclopédie musicale par exemple.

Ouvrage ambigu qui invite au débat. Si certains parmi vous l'ont lu, j'aimerais bien qu'ils partagent ici leurs impressions. Même si je connais plus le bonhomme et ses opinions maintenant que lorsque j'ai trouvé son bouquin sur les étagères de mes grands-parents, je sais ce que je lui dois, car sans lui, je ne serais probablement pas en train d'écrire ces lignes.

A part son nom...ton post m'en dit beaucoup que je n'en savais sur lui!

Et moi je ne le connaissais même pas de nom Le premier bouquin sur la musique que j'ai lu, (j'avais 13 ou 14 ans) c'était La grande aventure de la musique, de Kurt Pahlen, dans la collection Marabout. Il a dû être imprimé au début des années 1950...Très bien fait, je l'ai encore

Je connais Rebatet, son role pendant l'occupation et sa condamnation mais je connais aussi ses qualités d'écrivain et ai pu les aprécier dans les deux étendarts, roman auquel je pense souvent, et les décombres, des succès d'avant-guerre. Il faut distinguer. Rebatet était comme Brasillach et Drieu un homme très cultivé. Toute une génération brillante qui s'est fourvoyée. Je ne connais pas l'ouvrage sur la musique mais je devine la justesse des observations de l'auteur. Il faudrait faire un test d'objectivité sur ce qu'il dit de Wagner et de Mendelson par exemple.

C'est assez curieux: lorsque j'ai commencé à lire sur la musique classique, au début des années 80, j'ai ouvert son "Histoire de la musique" sans rien connaître du personnage. Donc je n'ai pas été influencé par son passé. Eh bien, ce bouquin (c'était dans les Bouquins Laffont, à propos) m'a dégoûté dès son introduction. Je ne pourrais plus le citer, il y a trop longtemps, mais je me souviens de son mépris pour toute musique qui n'était pas d'essence occidentale. Je dis "mépris" pour rester objectif...