Forum sur la musique classique
 
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 Lorsque les cinéastes parlent de musique.

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Icare
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MessageSujet: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2019-01-01, 20:16

<<Un film est (ou devrait-être) beaucoup plus proche de la musique que du roman. Il doit être une suite de sentiments et d'atmosphères. Le thème et tout ce qui est à l'arrière-plan des émotions qu'il charrie, la signification de l'oeuvre, tout cela doit venir plus tard. Vous quittez la salle et, peut-être le lendemain, peut-être une semaine plus tard, peut-être sans que vous vous en rendiez compte, vous acquérez quelque chose qui est ce que le cinéaste s'est efforcé de vous dire.>>

Syanley Kubrick.1964.

J'ai décidé d'ouvrir ce sujet afin de réunir des témoignages ou des propos de différents cinéastes sur la musique, puisse-t-il s'agir de leurs goûts ou choix musicaux, de leur relation avec un compositeur ou de la manière d'intégrer de la musique sur les images de leurs films. J'ai également estimé que cette délicieuse pensée de Stanley Kubrick pouvait être une judicieuse introduction. Ceci étant, il ne faudrait pas en déduire trop hâtivement que je cautionne tous les choix musicaux de Kubrick dans ses films ni tous ses partis-pris. Par exemple, je n'aime pas du tout la bande originale de Wendy Carlos sur Orange Mécanique, mais il faut dire que je n'ai pas aimé le film non plus, que, d'un point-de-vue aussi bien visuel que sonore, tout m'a paru criard et mal-vieilli. Ce n'est pas le sujet qui m'a déplu ou mis mal à l'aise, c'est le traitement visuel et musical qui en a été donné. De toute façon, côté musique, rares sont les partitions entièrement synthétiques (électroniques) qui trouvent grâce à mon oreille. Mais, dans ce cas précis, j'avoue que c'est un tout que je rejette. Shining fut une expérience inverse. Voilà un opus de Kubrick que j'adore mais qui aurait mérité, selon moi, un "score" entièrement pensé et écrit pour le film. Au générique-début, il y a bien un morceau sur une vue d'avion qui semble avoir été spécialement composé pour. Il me semble qu'il est aussi de Wendy Carlos en collaboration avec Rachel Elkind-Tourre et basé sur la Symphonie Fantastique de Berlioz. J'ai toujours trouvé ce morceau creux, incapable de me faire entrer dans le film. Lors des scènes d'angoisse, on y entend des musiques pré-existantes - Penderecki, Bartok, Ligeti -, souvent ça fonctionne bien, parfois non. Ayant conscience que cette musique n'a pas été écrite pour l'image car inappropriée sur certaines séquences, elle me sort du film. En revanche, je suis très satisfait des emplois et traitements musicaux sur Barry Lyndon et 2001, l'Odyssée de l'Espace et Spartacus a permis à Alex North de composer l'une de ses plus belles partitions pour le Septième Art.

https://www.youtube.com/watch?v=TdSx-mBrXfg


Dernière édition par Icare le 2020-04-07, 07:24, édité 1 fois
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Kristian



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MessageSujet: Re: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2019-01-02, 01:06

Tavernier parlant de musique de cinéma :

« J'essaie de choisir un compositeur très tôt, bien souvent avant même l'écriture du scénario, ce qui permet de parler, d'écouter de la musique ensemble avant même qu'il y ait la moindre image, de trouver un climat, d'évoquer des idées, quitte à les retenir ou pas...  »

«Philippe Sarde aime les défis. Dans COUP DE TORCHON, on ne savait pas du tout comment les choses pouvaient évoluer, et dans L 627 (1992) c'était la même chose. Je voulais dans ces deux films des musiques aux inflexions jazzistiques mais qui ne soient jamais binaires, qui intègrent dans une musique percussive des influences de tango (Carla Bley). Dans L 627, il y a un mélange de musique religieuse et de musiques de bal comme Nino Rota le faisait dans les films de Fellini. Ce n'est pas un hasard si dans les deux films il y a des accordéons et bandonéons. On mélange des instruments qui en principe ne sont pas faits pour jouer ensemble. On a tous les deux cette passion-là. Il y avait des musiciens baroques, un luth, une viole de gambe, des batteries rock, des saxo, des Célesta, des vibraphones... une composition qui n'est pas avec des orchestres habituels de musique de film. On s'amuse beaucoup avec Philippe là-dessus.»


Je ne suis pas assez fou de cinéma pour suivre Icare pas à pas dans son nouveau cycle. Mais j'adore Tavernier, et j'adore la musique de ses films. De plus il a le grand mérite (à mon goût  Lorsque les cinéastes parlent de musique. 699201 ) d'être fou de Fauré, qu'il utilise admirablement dans l'un de ses chef-d'œuvres : Un dimanche à la campagne. Lorsque les cinéastes parlent de musique. 333455  Lorsque les cinéastes parlent de musique. 333455  Lorsque les cinéastes parlent de musique. 333455

Les amateurs trouverons ci-dessous un lien les conduisant à une interview passionnante de Tavernier sur la musique de ses films. :

https://www.cinezik.org/infos/affinfo.php?titre0=20120628031714

Ci-dessous encore la bande annonce de Un dimanche à la campagne, sur le  l'admirable quintette avec piano n°2 plus éperdu que jamais  Lorsque les cinéastes parlent de musique. 185465 – de Gabriel Fauré. Si vous n'avez pas vu ce film, précipitez-vous ! C'est l'un des chef-d'œuvres absolus du cinéma français. Lorsque les cinéastes parlent de musique. 395622


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MessageSujet: Re: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2019-01-02, 23:49

Il y a deux films de Bertrand Tavernier dont j'apprécie particulièrement les apports musicaux et leur emploi; La vie et rien d'autre et Capitaine Conan, deux films relatant des événements ayant eu lieu à l'époque de la Première Guerre Mondiale. Les musiques ont été imaginées et conçues par un compositeur beaucoup plus rare que Philippe Sarde; Oswald d'Andrea, avec des partitions mélangeant des "imitations" de musiques populaires spécialement composées pour les films et de morceaux plus illustratifs et de forme classique. Ce sont deux films de Tavernier que j'ai adoré et que je reverrai dans un avenir relativement proche. J'en parlerai dans le fil approprié.

<< On n’est pas obligé de comprendre pour aimer. Ce qu’il faut, c’est rêver. >> C’est pourquoi le réalisateur culte fait figure de résistant aujourd’hui. Il refuse toujours de fournir des explications à ses films et de se plier aux injonctions sociétales du « faire sens ». Il préfère parler de ressenti, comme pour la musique, formulant une analogie entre les deux : << Le cinéma ressemble beaucoup à la musique. Il peut être très abstrait, mais les gens ont tendance à toujours vouloir le ramener au plan de l’intellect, le transposer immédiatement en mots. Et quand ils ne peuvent pas le faire, ils se sentent frustrés. Pourtant ils peuvent trouver en eux une explication, il suffit qu’ils se l’autorisent. >>

David Lynch.

Je partage complètement l'approche de David Lynch sur ce sujet: "il n'est pas indispensable de comprendre pour aimer (...) Le cinéma ressemble beaucoup à la musique", cela expliquant sûrement, du moins en partie, pourquoi je suis souvent très sensible au choix musicaux de David Lynch dans ses films; John Morris/Samuel Barber sur Elephant Man, Angelo Badalamenti sur Blue Velvet, Twin Peaks, Toto sur Dune...Pour moi aussi, le cinéma ressemble beaucoup à la musique, surtout le cinéma que j'aime. Je le ressens d'abord musicalement, comme un concerto, un quintette ou une symphonie qui le traverse. C'est justement mon expérience personnelle du cinéma de David Lynch: il m'est très musical, certes musical d'un point-de-vue sonore mais aussi d'un point-de-vue visuel. Twin Peaks m'est profondément abstrait et musical, par exemple. L'histoire tragique d'Elephant Man a quelque-chose de lyrique et résonne en moi comme un opéra. Pas étonnant d'ailleurs que Laurent Petitgirard en ait écrit un!
Ce soir, j'ai réécouté la très touchante musique écrite par Angelo Badalamenti pour Une histoire vraie/The straight story de David Lynch. Demain, c'est le film lui-même qui m'apportera sa propre musique.

https://www.youtube.com/watch?v=xw9bpuJRoyU&index=5&list=PLFyALcmg6wfZFFqB5rcaOaE-UnI457zeP
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MessageSujet: Re: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2019-01-03, 19:00

Barbet Schroeder:

<<La musique a une fonction narrative. C'est-à-dire qu'elle raconte quelque chose que la voix off ne peut pas raconter, que les images ne peuvent pas raconter, comme quelque chose de mystérieux, d'émotif, quelque chose qui a à voir parfois avec les personnages. Ce sont très souvent des commentaires sur les personnages. La musique correspond à un personnage. Par exemple, dans "L'avocat de la Terreur" (2007), la musique correspond à Djamila Bouhared, une femme qui plane au-dessus du film. On n'a jamais pu l'interviewer, mais c'est un personnage très important à chaque fois qu'elle est évoquée. Il y a donc un thème spécifique pour elle, avec des violons. Le thème accentue sa présence au-dessus du film, telle une présence mystérieuse alors qu'on ne la voit jamais.>>

Toujours Barbet Schroeder à propos de "La Vierge des Tueurs" et du compositeur chilien Jorge Arriagada:

<<Dans la partie du film ancrée dans la réalité de Medellin, les seules musiques sont des morceaux d'ambiance, des musiques qu'on entend dans la rue: des salsas, des boléros, des tangos, toutes les musiques populaires colombiennes que j'aime beaucoup. Il y a, par ailleurs, une partie irréaliste du film dont le côté fantasmatique ou hallucinatoire est souligné par l'usage de la musique du film proprement dite. Elle est d'un compositeur qui a une sensibilité latine, a composé pour le cinéma de Raoul Ruiz: Jorge Arriagada. Il a écrit une musique symphonique qui a apporté beaucoup d'émotion. La collaboration avec lui a été passionnante. Ce film raconte l'histoire de quelqu'un qui arrive dans une ville pour y mourir, qui découvre l'amour, la vie et une douleur intense qui est bien pire que la mort qu'il recherchait au début en ironisant. Cette douleur, c'est cette musique symphonique qui la fait sentir. A travers Fernando c'est aussi la douleur d'une ville et de tout un pays que l'on découvre.>>

Vidéo verrouillée

La musique symphonique de Jorge Arriagada pour ce film, surtout l'adagio principal, par son caractère obsessionnel et résigné, me bouleverse complètement. Il n'illustre pas la douleur, il en est l'incarnation. Il est cette chose invisible que les images ne peuvent montrer, cette chose qui vibre dans les regards et les coeurs, dans les esprits brisés qui ont embrassé la mort du bout de leurs lèvres meurtries et n'hésitant pas à mettre leur corps dans la position de la prière et de la prosternation devant la Vierge Marie. Cette musique est aussi propice au recueillement, est la dimension philosophique de la douleur et la mort, absorbe les cris des blessures qui saignent sur l'asphalte et les transforment en un adagio d'où s'élève une vague lueur d'espoir et d'apaisement.


Dernière édition par Icare le 2021-03-26, 17:45, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2019-01-04, 19:16


Arnaud Desplechin:

<<J'écoute de la musique tout le temps lorsque j'écris, tout le temps sur le plateau pour les mises en place. La musique est pour moi essentielle dans ma façon de réinventer le film au montage. C'est une façon de comprendre le film, et de prendre le spectateur par la main. Comme j'ai tendance à raconter des histoires où tout est imbriqué, j'ai besoin à un moment que le film soit accessible pour le public, et pour que le film puisse délivrer des sentiments j'ai besoin de la musique. J'aime le cinéma populaire et je trouve qu'il y a dans la musique une adresse pour le spectateur, une façon de le prendre par la main, de l'accompagner dans la scène, ce qui est très important pour moi. Un deuxième narrateur qui n'est pas le metteur en scène, c'est le compositeur de musique de film.>>

J'aime cette idée d'une musique qui me prend par la main et m'emmène dans l'univers cinématographique du cinéaste. En tant que spectateur, j'ai toujours fonctionné ainsi, avec une sensibilité comme décuplée lorsque la musique intervient dans un film...à condition bien sûr que son esthétique me plaise...Dans le cas contraire, elle va me laisser indifférent tout en l'acceptant dans son contexte, au pire elle va gâcher mon appréciation du film! Mais si l'adhésion a lieu, mon oreille se tend le plus possible, en saisit toutes les couleurs et leurs nuances que les images ne montrent pas. Je ne saurais dire s"il y a des films que j'aime surtout grâce à la musique ou si la musique m'a fait aimer des films que je n'aurais pas aimés autrement. Je ne pense pas car on dit toujours qu'une bonne musique ne sauvera jamais un mauvais film, et il se trouve que je partage cet avis, un avis plus que sensé...Peut-être que dans certains cas bien spécifiques, une musique que j'adore peut me rendre indulgent sur l'appréciation d'un film; oui, ça je le crois, tout comme je crois le témoignage de ceux qui aiment avoir la bande originale d'un film qu'ils ont adoré, pas nécessairement parce qu'ils trouvent celle-ci exceptionnelle mais pour revivre le film à travers elle, en revivre l'ambiance.

Le cinéaste Arnaud Desplechin a collaboré plusieurs fois avec Grégoire Hetzel et c'est justement une de ses musiques que j'ai réécoutée aujourd'hui, bien qu'elle fut composée pour le film d'un autre réalisateur, Le Secret de la Chambre noire de Kiyoshi Kurosawa. Je suis désormais moins curieux de ce qui se crée actuellement en matière de musique de film, en France ou ailleurs, et mes acquisitions dans ce domaine se font de plus en plus rares. Je crois qu'en musique pour l'image, cette année 2018 se résuma en quatre choix, L'isola d'Ennio Morricone, Paul Apostle of Christ de Jan A.P. Kaczmarek, La Légende des Sciences d'Eric Demarsan et Le Secret de la Chambre noire de Grégoire Hetzel. Ces quatre acquisitions correspondent à mes goûts musicaux et furent donc de bons choix. Je ne connais pas encore le film de Kiyoshi Kurosawa, mais la partition pour orchestre de Hetzel, même si elle perpétue une certaine tradition de la musique de cinéma - un ton quasi-herrmannien, avec peut-être une petite pointe duhamelienne, parcourt cette B.O. d'un bout à l'autre - est d'une finesse d'écriture exquise et d'une très belle sensibilité dans le choix des timbres et les développements des thèmes: un romantisme sombre et pointilleux, peint d'une fine couche de mystère. Forcément, dans le titre il y a le mot "secret".

https://www.youtube.com/watch?v=01qLfkhFKNs
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MessageSujet: Re: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2019-01-06, 19:31

Guillaume Nicloux:

<<Je reçois de la musique, je réagis de manière spontanée, il y a quelque chose qui se passe. Il y a une découverte quand j'entends la musique, je me dis qu'il y a un univers qui va dynamiter le film. Ce que j'attends, c'est que le film mute. J'aime l'idée d'être dépossédé des images pour que la musique donne une empreinte véritable. Je n'aime pas les musiques illustratives, pour mes films du moins. J'aime que la musique dénature, amplifie, ou au contraire trace une direction qui n'est pas forcément celle qu'on attendrait, mais en aucun cas qu'elle soit simplement un support qui vient rajouter ou amplifier quelque chose. J'aime quelle mute, qu'il y ait quelque chose qui surpasse l'image, qui donne une amplitude qui n'est pas du tout prévue.>>

Eric Demarsan a composé de la très bonne musique pour le cinéma de Guillaume Nicloux. Il y eut d'abord Une Affaire privée, puis Cette Femme-là. C'est visiblement le cinéma de Jean-Pierre Melville, L'Armée des Ombres et Le Cercle rouge qui l'incita à choisir ce compositeur. Effectivement, ces deux films de Melville furent mis en musique par Eric Demarsan. Je suppose que Nicloux a été aussitôt séduit par l'atmosphère de ces musiques dans leur contexte qui ne sont jamais purement illustratives comme elles le sont souvent à l'intérieur du cinéma hollywoodien. Pour Cette Femme-là, il y aurait eu deux indices principaux sur l'orientation souhaitée par le réalisateur; Pärt et Vivaldi. Il y a bien un aspect baroque dans le thème d'ouverture, mais un "baroque" perverti par des harmonies modernes qui m'évoque davantage Purcell que Vivaldi. J'adore ce morceau et la touche d'orgue dans sa seconde partie. Comme Melville sut réinventer Bourvil dans Le Cercle rouge, Nicloux sut réinventer Thierry Lhermitte dans Une Affaire privée et Josiane Balasko dans Cette Femme-là. Pour ce dernier film, c'est une structure labyrinthique qui oscille entre cauchemar et réalité. En fait, on ne sait jamais vraiment si on est dans la vraie vie ou dans l'imaginaire du personnage principal; un petit côté David Lynch sans doute...La musique symphonique de Demarsan est, comme il le dit lui-même, la photographie de son paysage mental, sa dimension onirique, ce qui s'échappe de la réalité.

https://www.youtube.com/watch?v=XFIhdGVvgwc
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MessageSujet: Re: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2019-01-06, 23:05


Bergman a lui-même souvent exprimé son profond attachement à la musique. Lors d’un entretien relativement récent, il remarquait que s’il n’était pas devenu réalisateur, il aurait aussi bien pu devenir chef d’orchestre. La musique, a-t-il souvent déclaré – et naturellement il désigne la musique classique – a été une compagne tout au long de sa vie. Son œuvre en témoigne. La musique en est rarement absente. Mais elle est toujours utilisée avec retenue. Bergman a souvent exprimé son admiration pour la précision de l’écriture d’une partition comparée à celle d’un scénario. L’imprécision du scénario, reconnaît-il, le forçait à être un réalisateur extrêmement rigoureux, sinon le produit fini, le film sur l’écran, aurait été chaotique.

Ingmar Bergman:

<<Je voudrais dire qu’il n’existe pas d’art qui ait plus en commun avec le cinéma que la musique. Les deux affectent directement nos émotions, sans passer par l’intellect. Et un film est essentiellement un rythme, inspiration et expiration dans une séquence continue. Toujours depuis mon enfance, la musique a été ma grande source de récréation et de stimulation, et souvent j’éprouve un film ou une pièce musicalement.>>

Je ne pense pas avoir vu en entier un seul film d'Ingmar Bergman, seulement des extraits. En revanche, j'ai toujours été - peut-être est-ce un paradoxe - curieux de savoir quelle musique il employait dans ses films. Dans mon esprit, et sans doute faute de certaines informations imprécises que j'avais reçues, je pensais que Bergman n'utilisait que des pièces musicales préexistantes issues du répertoire classique, ce qui s'avéra être vrai à une période de sa vie de cinéaste. Le chef d'orchestre Adriano a eu l'excellente idée de mettre à jour cette collaboration méconnue et rarement citée en référence que constitue l'étroite relation artistique qui unissait Ingmar Bergman à Erik Nordgren. L'un des meilleurs fruits de leur collaboration - peut-être est-ce tout simplement le meilleur? - est selon moi la délicieuse partition qu'il composa au profit de Women's Waiting - L'Attente des Femmes (1952), aux orchestrations transparentes et raffinées, dans un romantisme un brin sophistiqué qui flirte avec l'impressionnisme. Je suis plus mitigé avec la suite proposée de Smiles of a Summer Night - Sourires d'une Nuit d'Eté (1955) qui vaut surtout pour sa partie dramatique et notamment le premier extrait "Chaste Love", un morceau assez touchant. J'aime moins les morceaux de circonstance, genre "Marche, Galop, Menuet, Gavotte" que j'estime, pour ma part, plus anecdotiques. Avec Wild Strawberries - Fraises Sauvages (1957) on retrouve un peu le raffinement de Women's Waiting, un très jolie musique. On change complètement d'ambiance et de style avec le premier extrait "Swindle and Deceit" issu de The Face - Le Visage (1958), d'une construction plus particulière et originale, minimaliste et quelque peu énigmatique. En revanche, on retombe dans une certaine banalité avec la Marche et le Galop qui suivent. The Garden of Eden - Le Jardin d'Eden (1961) qui fut la dernière collaboration entre Bergman et Nordgren, propose en deux extraits relativement courts, une jolie conclusion de forme classique.

Parmi les dix-sept partitions composées pour des films de Bergman; L'Attente des femmes, Sourires d'une nuit d'été, Le Septième Sceau et Fraises Sauvages, peuvent être considérées les plus achevées. Les relations étroites entre Nordgren et Bergman, comparables à celle entre Eisenstein et Prokofiev, Hitchock et Herrmann, Fellini et Rota ou encore Cocteau et Auric, étaient basées sur l'amitié et sur la réalisation de la part de Nordgren de la nécessité de compromis en matière de musique cinématographique. Une rupture est survenue lorsque Bergman, après un mariage avec la pianiste estonienne Kabi Laretei, se trouvait quotidiennement face à la musique, et ce, d'une manière totalement différente qu'auparavant. A la même époque Bergman s'est intéressé à l'opéra en tant qu'assistant directeur et a complètement révisé sa conception de la musique, utilisant par la suite principalement la musique instrumentale de Bach, Mozart et Chopin. Seuls trois de ses derniers films emploient des partitions originales. Elles furent composées par Rolf Wilhelm et Daniel Bell, ce qui veut dire que le dernier film avec la musique de Nordgren est Le Jardin d'Eden (1961).
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MessageSujet: Re: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2019-01-07, 20:14


Renaud Fély & Arnaud Louvet sur Grégoire Hetzel:

<<Le travail avec Grégoire Hetzel a duré pendant une grande partie du montage de L'AMI. Nous ressentions la nécessité d'accompagner le film par un thème puissant, mais nos premiers tâtonnements allaient tous vers une mélancolie trop directe, liée au motif narratif central du film qui combine la perte d'un ami avec le risque de voir une utopie se disperser. A un moment, l'idée d'une flûte est apparue, heureuse et salutaire. Elle évoquait très simplement la dimension pastorale de la vie de frères de François d'Assise, un certain dénuement et aussi une forme d'enchantement. Dès qu'elle a commencé à entrer en piste, plusieurs thèmes de bois et cordes sont venus lui répondre et Grégoire s'est mis à composer des pièces très inspirées, tirant ici ou là vers la musique savante, mais toujours au plus près de la ligne des sentiments. A l'arrivée, la musique de Grégoire accentue le tracé romanesque du film. Elle fait un pont entre ces hommes lointains et nous.>>

La musique m'aura doté d'une conviction très profonde, qui ne se remettra jamais en question par une expérience qui, au contraire, la renforce: être curieux. Avoir toujours la curiosité de découvrir une oeuvre nouvelle, un nouveau compositeur. Ne jamais cesser d'être curieux. Je dis ça parce que dans le domaine de la musique pour l'image, je suis devenu beaucoup moins aventurier et curieux qu'avant. Il est vrai que j'ai l'impression, après quelques décennies d'exploration, d'avoir fait le tour et d'être de moins en moins surpris, de moins en moins épaté. Ce n'est pas une impression totalement infondée mais ce n'est pas suffisant pour fermer mes esgourdes sur un "genre" qui m'a tellement apporté et ouvert sur les autres domaines musicaux comme le classique, le contemporain ou encore le jazz et les musiques du monde. Mon oreille s'est quand même tendue sur quelques compositeurs actuels semblant faire carrière au service de l'image; je pense par exemple à Pascal Gaigne et plus récemment encore à Grégoire Hetzel. Parmi les nouveaux noms qui se sont plus ou moins affirmés, ces dernières années, peu ont su m'épater. Gaigne a su et lorsqu'un compositeur m'intéresse autant je m'empresse d'approfondir. C'est avec Le Secret de la Chambre noire que je découvris la musique de Grégoire Hetzel. C'est une musique qui me plait de plus en plus et que je trouve superbement écrite et orchestrée. J'avais donc l'idée de faire une autre tentative le concernant. L'occasion s'est produite avec l'acquisition de sa B.O. pour L'Ami de Renaud Fély & Arnaud Louvet. L'émotion est même montée d'un cran car il s'agit-là d'un véritable coup de coeur.

Grégoire Hetzel:

<<Il est assez difficile d'écrire la musique d'un film dont le sujet et l'essence sont religieux. Autant le silence, les chants grégoriens, une musique classique de haute tenue me semblent naturellement légitimes aux abords de Dieu, autant une musique de film peut gâcher ou banaliser le propos si elle ne prend pas elle-même une certaine hauteur. Car il s'agit d'incarner des affects séculaires tels que la peur, l'effroi, la joie, la tristesse ou l'amour humains, plus faciles à <<traiter>> musicalement. Avec Renaud Fély et Arnaud Louvet, nous avons énormément cherché, essayé, souvent renoncé, avant de trouver le ton juste, concluant du reste le plus souvent par du silence.>>

J'adore cette superbe composition de Grégoire Hetzel et n'hésite même pas à la considérer comme légitime aux abords de Dieu. Very Happy
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MessageSujet: Re: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2019-01-10, 00:01

https://www.youtube.com/watch?v=2f_l9CN_b9w


En réécoutant Les Saisons de Bruno Coulais, je me suis fait cette délicieuse réflexion que la musique de ce compositeur me ramenait très souvent aux délices de l'enfance et des heureux pas de l'innocence. Il y a comme un "côté berceuse", une porte qui s'ouvre sur mon "soi" le plus lointain. C'est une sensation de bonheur qui m'envahit de l'intérieur, m'enivre. C'est une musique qui flatte mes souvenirs, caresse mes cris et enjolivent mes larmes. J'aime ce qui me ramène à l'enfance, au grand voile bleu qui colore ma douce perception du monde, ce monde qui, aujourd'hui, m'apparaît tel qu'il est, sans voile ni fard, brutal et impitoyable, magnifique et immonde à la fois. Heureusement, cette musique qui me prend par la main et me conduit sur le chemin de mon enfance, quand écolier je chantais l'amour pour me protéger de la forêt qui aboyait et croassait derrière ma frêle silhouette. Ca faisait plaisir à ma mère de m'entendre chanter, le rossignol sur le grand tilleul aussi. Ce n'est guère étonnant si Bruno Coulais mit en musique Babies; Bébés , un documentaire français (2010) de Thomas Balmès qui suit quatre nouveau-nés tout au long de leur première année après la naissance. Deux des bébés présentés dans le film sont originaires de zones rurales: Ponijao de Opuwo ( Namibie ) et Bayar (jargal) de Bayanchandmani ( Mongolie ) et deux d’urbains: Mari de Tokyo ( Japon ) et Hattie de San Francisco ( États-Unis). Pas étonné qu'il ait aimé collaborer sur ce film car je suis sûr qu'il aime, lui aussi, retrouver les chemins de l'enfance.

Les Saisons (film de Jacques Perrin & Jacques Cluzaud:

<<J'ai tenté avec la musique des "Saisons" d'inscrire le film dans l'univers du conte naturel. La densité musicale par rapport à celle de l'image a été ma préoccupation constante. Ainsi, la musique est souvent perçue dans le lointain comme des chants parmi les sons de la forêt. Elle colore la bande-son avec une certaine mélancolie plus qu'elle ne commente la situation. Elle marque également le temps et le passage immuable des Saisons par des vibrations de cloches, marimbas, vibraphones, boîtes à musique et légers glissés de cordes et de harpes. J'ai pensé l'orchestration en fonction de la spatialisation avec des échos de bois, percussions et cordes.>>

https://www.youtube.com/watch?v=F3bId1aEMGQ
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MessageSujet: Re: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2020-04-07, 07:28

Michel Korb par Christian Philibert:

<<Il est rare et chanceux pour un cinéaste de trouver, dès son premier long métrage, son alter ego musical. Michel et moi nous sommes rencontrés à Espigoule, en 1997, sur le tournage des 4 saisons. Le courant est tout de suite passé et nous avons rapidement jeté les bases d'une véritable collaboration artistique. Notre passion commune pour le cinéma et plus particulièrement pour la musique de film y a largement contribué. Au cours de nos nombreux échanges, je me souviens lui avoir fait écouter des dizaines de B.O. qui m'inspiraient. La recherche des thèmes d'Espigoule a pris de nombreuses semaines car la forme fiction documentaire et la multitude de personnages dans ce film rendaient la tâche difficile. Le résultat est allé au-delà de mes espérances. Dès lors, nous nous sommes plus quittés. Quelques années plus tard, pour "Travail d'Arabe", je souhaitais une bande son qui navigue entre le western et la musique orientale et j'ai été surpris par la rapidité avec laquelle il a réussi à trouver les mélodies, les accords et les sonorités que j'attendais. Avec "Afrik'aïoli", notre relation professionnelle est devenue complètement fusionnelle. Pour ce film, l'exercice était légèrement différent. Nous disposions déjà de l'univers musical des "4 saisons d'Espigoule" dont il s'agissait de développer les thèmes et les renouveler, ce qu'il a réussi à merveille. Aujourd'hui, sa musique est devenue indissociable de mon univers cinématographique. a travers ces accents de musiques ethniques et méditerranéennes, c'est une véritable dimension burlesque, lyrique et poétique que Michel apporte à mes films, un souffle nécessaire à un cinéma en quête perpétuelle de réalité épique. J'espère que l'avenir nous donnera maintes occasions de poursuivre cette belle et fructueuse collaboration.>> Christian Philibert, novembre 2013.

Je pense qu'il est toujours formidable pour un réalisateur de rencontrer un compositeur qui va devenir son alter ego musical. Je crois beaucoup à la magie des grandes collaborations entre un réalisateur et un compositeur. Ce n'est pas toujours évident de rencontrer, dès son premier long métrage, le compositeur avec lequel la compréhension mutuelle sera totale, suivie, dans le meilleur des cas, par l'envie indéfectible de retravailler ensemble et de former ainsi un duo artistique complémentaire, comme Fellini & Rota, Hitchcock & Herrmann, Leone & Morricone (pour ne citer que la plus célèbre car avec Morricone il y en a eu plusieurs tout aussi fusionnelles qu'avec Sergio Leone), Chabrol & Jansen, Spielberg & William, Lynch & Badalamenti, Almodovar & Alberto Iglesias (bien qu'Almodovar avait entamé une première collaboration avec Bernardo Bonezzi) ou encore Amelio & Piersanti, Wenders & Knieper... Je pense que Christian Philibert a été très enthousiasmé par la composition de Michel Korb sur Les 4 Saisons d'Espigoule (1999) qui fut le fruit d'une première collaboration. Elle sera suivie par Travail d'Arabe (2003) et Afrik'Aïoli (2013). Sept ans se sont écoulés depuis cette troisième collaboration et j'ignore s"ils sont en oeuvre sur un nouveau projet. A titre personnel, je peux déjà dire que la musique que Michel Korb confectionna pour Les 4 Saisons d'Espigoule m'avait fortement donné envie de voir ce film. Ne l'ayant toujours pas vu pour autant de mauvaises raisons qui serviraient à me justifier, je le recherche au moins en dvd afin de l'apprécier dans de bonnes conditions, sans qu'il ne soit entrecoupé de publicités à la noix. Dans cette partition très vivante de Michel Korb, il y a comme deux poétiques combinées qui évoluent et s'entremêlent dans un équilibre parfait, la poétique propre à la musique et celle, tout aussi vivante, du film de Christian Philibert. C'est peut-être mon expérience de la musique et du cinéma qui forge en moi l'intuition d'une collaboration réussie, d'une osmose totale entre deux formes d'expression dont la combinaison, l'association, est toujours délicate, peut conduire au meilleur comme au pire. Avec Les 4 Saisons d'Espigoule, j'ai l'intuition du meilleur. J'aimerais bien sûr voir aussi Travail d'Arabe et Afrik'Aïoli, les musiques de Michel Korb en donnent sacrément envie: eh oui! Une musique peut conduire à un film.
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MessageSujet: Re: Lorsque les cinéastes parlent de musique.   Lorsque les cinéastes parlent de musique. Empty2021-03-26, 17:43

Le cinéaste Gerardo Vera évoque Stephen Warbeck à propos de DESEO:

<<Je voulais un compositeur spécial, une personne capable de raconter l'histoire d'amour d'un point de vue qui n'était pas mélodramatique mais plutôt trouble. Je vois le film comme une sorte de toile d'araignée musicale où les personnages se sentent enchevêtrés, et où presque tout est un mystère. Je connaissais Stephen Warbeck de «Shakespeare in love», le film pour lequel il a reçu l'oscar, et «Billy Elliot». Plus tard, j'ai appris qu'il avait fait beaucoup de théâtre et qu'il avait donc une très bonne expérience dans ce domaine. Les compositions pour les pièces de théâtre doivent avoir une grande force synthétique. La musique pour le cinéma doit aller là où l'acteur ne va pas, sinon le film deviendrait un mélodrame bon marché. Et la musique de Stephen Warbeck ne peut être séparée du film, elle y est intégrée, c'est un miracle.>>

J'aime beaucoup la partition de Stephen Warbeck qui fait appel au "City of Prague Philharmonic Orchestra" sous la direction de Paul Englishby pour le film Deseo de Gerardo Vera (2002). Le film s'appuie sur la situation politique à la fin de la Seconde Guerre mondiale tout en relatant une histoire d'amour interdite entre une femme communiste mariée et un sympathisant nazi dans une Espagne très alambiquée. Le thème m'amène à mieux comprendre la volonté du réalisateur d'une musique trouble plutôt que mélodramatique. C'est justement ce que j'ai ressenti dans la musique de Warbeck, un romantisme trouble et troublant entre deux individus que tout devrait opposer, et, d'une certaine manière, je ressens comme une forme d'antagonisme intérieur qui s'exprime à travers des étreintes musicales très élaborées et judicieusement orchestrées: la clarinette sensuelle et intimiste de Martin Robertson, mais surtout ces fragments de violoncelle solo (Nick Cooper) qui transparaissent d'une matière orchestrale intense et raffinée. Elle ne fait pas pâle figure face à la superbe Ouverture de Tristan et Isolde de Richard Wagner.

Ca peut paraître un peu particulier, voire peu ordinaire d'évoquer des bandes-son sans connaître les films auxquels elles se rapportent, ce qui ne peut conduire qu'à des analyses incomplètes ou approximatives. Sauf, que je ne prétends pas faire des analyses, juste des impressions, les modestes impressions d'un simple mélomane qui a sans aucun doute une sensibilité plus ouverte que la normale pour le genre appliqué, une sensibilité que je ne saurais psychanalyser. Je me dis toujours que j'ai aimé la musique de film avant de connaître le cinéma. J'ai une explication très logique à ça: une bande originale, c'est d'abord de la musique avant d'être une musique de film. Entre hier et aujourd'hui, j'ai réécouté plusieurs bandes originales, toutes ayant été composées pour des images, des personnages, des scènes d'amour, des drames, des scènes de haine, des visages et des paysages que je n'ai toujours pas vus. Il y eut tout d'abord Le Mani Sporche/Les Mains Sales (1978) d'Ennio Morricone, une adaptation télévisée d'Elio Petri d'une pièce homonyme de Jean-Paul Sartre, il y eut ensuite dans un style radicalement différent la musique que composa Alexeï Aïgui pour La Vérité de Kore-Eda Hirokazu (2019), Adultère (mode d'emploi) de Bruno Coulais (1995), dernier film de Christine Pascal avant son suicide par défenestration en 1996, à l'âge de 43 ans, puis el olivo de Pascal Gaigne, un film de Iciar Bollain (2016).

Iciar Bollain évoque Pascal Gaigne à propos de EL OLIVO:

<<Aussi, comme c'est souvent le cas dans la "cuisine de montage", nous avons découvert qu'il y avait quelques dangers dans notre histoire et que la musique pouvait nous aider à surmonter. L'un était le ton ambivalent qui oscillait entre le drame et l'humour. La musique de Pascal Gaigne suggère cette ambivalence, dès le début: une musique légère, mais avec de la densité, avec une certaine joie et aussi avec mélancolie, qui aide le spectateur à passer naturellement de l'émotion au rire et vice versa. Et le deuxième danger que la musique évoque, c'est que le film était au nombre de deux, la partie disons espagnole, et la partie qui commence par le voyage et se termine en Allemagne. Comme il ne s'agit pas entièrement d'un road movie, puisque le voyage ne commence qu'au milieu de l'histoire, la musique nous a aidés à amener la première partie à la seconde, c'est-à-dire qu'elle a aidé en répétant le thème du générique avec des variations auxquelles L'Allemagne sonnera émotionnellement comme la partie espagnole, et que le film était un tout, un seul et non deux. Et encore une fois, comme dans les autres films auxquels nous avons collaboré, Pascal Gaigne a créé une musique suggestive, belle, pas évidente, pleine d'émotion, d'humour, de vital qui enveloppe les scènes mais sans être envahissante, laissant place aux sons du film, qui font aussi partie de la musique de l'histoire, aux dialogues, et surtout, en laissant un espace au spectateur pour s'émouvoir, mais sans le submerger. >>
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