Ce qui me fascine dans la musique du XXème siècle, c'est que contrairement à d'autres époques où les compositeurs oeuvraient de manière plus ou moins innovantes au sein d'une même mouvance esthétique dominante, c'est de pénétrer souvent des univers sonores singuliers et poétiques qui, finalement, finissent par être "antagonistes" les uns des autres, comme si en pénétrant la musique d'un compositeur ou d'une compositrice, je pénétrais le monde intérieur et inconnu d'un esprit solitaire et si personnel et suggestif à la fois...j'entre dans une demeure à plusieurs étages mais, chez chacun, il y a de nouveaux couloirs, de nouvelles couleurs sur les murs, de nouveaux meubles, de nouvelles portes à pousser, de nouvelles clefs à tourner, de nouvelles fenêtres à ouvrir sur des paysages sonores uniques et si différents les uns des autres. La création individualisée, le musicien avec ses notes qui se construit un monde poétique qui lui est personnel...parfois trop personnel, il est vrai, au point que l'auditeur ne trouve pas toujours la clef...La clef ou la porte, dans l'oeuvre d'
Edith Lejet, si je ne l'ai pas vraiment trouvée dans
Harmonie du soir pour orchestre à cordes, je l'ai très vite tournée ou poussée dans des compositions aussi savoureuses que ses
Espaces Nocturnes pour orchestre,
Des fleurs en forme de Diamants pour ensemble et son superbe
Dyptique pour orgue et cordes que j'aimerais bien faire découvrir à Ysov.
J'adore passer ainsi de l'univers très tonal et lyrique de
Caroline Marçot à un univers certes plus alambiqué et sophistiqué - bien que très émotionnel et poétique, lui aussi - comme celui d'
Edit Lejet. C'est d'ailleurs pour cette raison que je n'aime pas être défini comme un défenseur et connaisseur de la musique moderne/contemporaine mais davantage comme un défenseur de la musique du XXème siècle sous presque toutes ses formes...avec toujours comme point de ressource la musique classique à travers les siècles bien que consacrant la majeure partie de mon âme et mon coeur à celle du vingtième (et vingt-et-unième) qui est l'ensemble d'expressions musicales qui me parle le plus encore aujourd'hui, vis-à-vis duquel je me sens le plus réceptif d'un point de vue émotionnel et même intellectuel...Bien que j'aille ponctuellement vers les ténors du baroque et du classique, parce que c'est un besoin aussi, il me faut irrémédiablement retourner à mes préférences.
Edith Lejet, née en 1941, a été l'élève de Jean Rivier et d'André Jolivet au Conservatoire de Paris. Henri Dutilleux et Maurice Ohana ont particulièrement contribué à l'acquisition de sa compétence professionnelle et l'épanouissement de son talent. Grand Prix de Rome, elle est également lauréate de la Casa de Velazquez, de la Fondation Bleustein-Blanchet pour la Vocation et de la Fondation Copley de Chicago. Par ailleurs, plusieurs récompenses lui ont été décernées par la SACEM ou l'Académie des Beaux-Arts (Prix Florence Gould, Prix de composition Nadia et Lili Boulanger en 2003). Elle obtient au Conservatoire de Paris un poste de professeur titulaire de Formation Musicale dans le département des disciplines vocales (1972), puis est nommée professeur d'Ecriture Musicale en 1998. Ces fonctions pédagogiques n'ont fait qu'accentuer son goût pour la vocalité et le lyrisme, pour les combinaisons instrumentales raffinées et pour la rigueur de l'écriture. Elle lance dans ce cadre une nouvelle classe spécialisée sur la musique du XXème siècle, et notamment les courants modernistes. En 2004, elle se voit aussi confier une classe de composition à l'Ecole Normale de Musique de Paris. Ces responsabilités pédagogiques stimulent indéniablement son élan créateur. Son catalogue comprend des oeuvres très variées mais qui présentent des constantes profondes. En 1969, elle s'impose avec son
Monodrame pour violon et orchestre, commandé par Radio-France et largement diffusé dans le monde, et en 1970, avec le
Journal d'Anne Frank, oratorio écrit pour la Maîtrise de Radio-France et petit ensemble. Elle a composé une comédie musicale
L'Homme qui avait perdu sa voix, des oeuvres chorales,
Missa Brevis pour choeur mixte ou
Sept chants sacrés pour douze voix de femmes, de la musique orchestrale, sans omettre de mentionner un répertoire de musique de chambre fort éclectique.