Le luth

Le luth est un instrument de musique à cordes pincées. Bien que voisin de la guitare, le luth a connu une histoire différente et distincte, les deux instruments ayant coexisté au cours des périodes principales de la musique. Il est d'origine arabe et est assez proche du pipa chinois.

Il faut distinguer deux grandes catégories de luths :

Le luth arabe — aud ou oud, qui a donné le nom « luth », venant de al oud — encore utilisé couramment aujourd’hui en Afrique du nord, en Turquie et au Moyen-Orient. C'est un instrument essentiellement mélodique.

Le luth occidental, dérivé du luth arabe, est l'objet de cet article. Arrivé en Europe par l’Espagne, pendant la présence mauresque, il s’est différencié du précédent vers le XIVe siècle. Il est devenu vraiment polyphonique grâce à l’ajout de frettes sur le manche. Il a sans cesse évolué, principalement par l’ajout de cordes graves, jusqu’au XVIIIe siècle où il finira par disparaître, victime d’une image très élitiste et close du public, ainsi que de son manque de volume sonore. L'essor de la musique ancienne jouée sur des instruments copiés d'instruments originaux a relancé l'intérêt pour cet instrument depuis la fin du XXe siècle.

Le luth est presque entièrement en bois. La table est faite d'une fine planche de bois résonnant (le plus souvent de l'épicéa) en forme de poire. Tous les luths ont une, parfois trois rosaces décorées. Elles ne sont pas ouvertes comme sur une guitare classique actuelle (2006), mais constituées d'une grille décorative sculptée dans le bois de la table lui-même.

Le dos de l'instrument est un assemblage de fines planches de bois appelées côtes assemblées (avec de la colle) bord à bord pour former le corps très arrondi de l'instrument. L'intérieur de cette coque est renforcé par des bandes de parchemin collées 1. Le manche est réalisé dans un bois léger et couvert de bois dur (en général de l'ébène) pour la touche. Contrairement à la plupart des instruments actuels, la touche est au même niveau que la table. La tête des luths avant la période baroque faisait un angle avec le manche de près de 90°, probablement pour que les cordes de faible tension restent fermement plaquées au début du manche. Les chevilles sont coniques et sont maintenues en place par friction dans les trous qui les reçoivent. La forme et les bois employés font du luth un instrument très léger pour sa taille.

Les frettes sont réalisées à l'aide de cordes en boyau nouées autour du manche. Quelques frettes supplémentaires en bois sont généralement collées sur la table, où elles ne peuvent être nouées derrière le manche. Les cordes elles-mêmes étaient en boyau (ou très rarement en métal).
Les cordes sont groupées en chœurs, généralement deux cordes par chœur (plus rarement trois) à l'exception du chœur le plus aigu, la chanterelle, constitué d'une seule corde; dans les luths baroques tardifs, les deux chœurs les plus aigus sont généralement deux cordes simples. Les chœurs sont comptés en groupe, ainsi la corde la plus aigüe est appelée premier chœur, les deux cordes suivantes (pour un luth renaissance) deuxième chœur etc. Ainsi un luth renaissance à huit chœurs aura habituellement quinze cordes (sept fois deux cordes et une corde simple) et un luth baroque à treize chœurs vingt-quatre cordes (deux fois onze cordes et deux cordes simples).

Les chœurs sont accordés à l'unison dans l'aigu et le médium, les chœurs graves ayant une des cordes accordée à l'octave supérieure (selon les époques, cette octave est rajoutée à partir de hauteurs différentes). Les deux cordes d'un chœur sont presque toujours jouées à la même hauteur (dans la même case) et simultanément, à l'exception de cas rarissimes ou elles sont jouées séparément où dans des cases différentes. L'accord du luth est très peu standardisé et assez complexe.

Les luths ont été construits dans des tailles très variables et sans standard permanent d'accord, le nombre de cordes et de chœurs ayant lui aussi beaucoup changé.

Cependant, on peut dire que l'accord du luth Renaissance ci-dessous est en général celui qui était employé: pour un luth à 6 chœurs, on retrouve l'accord de la viole de gambe ténor, les chœurs ayant entre eux un intervalle de quarte juste, à l'exception de l'intervalle entre les 4ème et 3ème chœurs qui est une tierce majeure (on peut retrouver l'accord du luth Renaissance sur une guitare en abaissant la troisième corde au fa# - au lieu de sol - les notes jouées alors depuis la tablature sonnent une tierce mineure au dessous du luth).

Pour les luths de plus de 6 chœurs, les chœurs sont ajoutés vers le grave. En raison du grand nombre de cordes et de la largeur du manche, il est alors difficile de modifier le son des chœurs les plus graves en plaçant un doigt de la main gauche sur la touche; ces chœurs sont donc plutôt utilisés de façon diatonique pour permettre leur utilisation en cordes à vide, comme pour le luth prébaroque à 10 chœurs - voir ci-dessous.

Il s'agit ici de l'accord habituel, et il arrive que le compositeur donne d'autres indications sur la manière d'accorder - par exemple : 7ème chœur en Fa.

Le XVIIe siècle accroît encore la diversité d'accords, tout particulièrement en France. À la fin du siècle, une certaine norme se met cependant en place, l'accord dit en ré mineur s'imposant. Les basses indiquées ci-dessous pour le luth baroque sont modifiées selon la tonalité jouée.

Malgré sa quasi disparition au XVIIIe siècle, l'instrument continue à survivre tant en France qu'aux États-Unis. On trouve ainsi des traces du théorbe et du chitarrone au salon des Champs-Elysées de 1895. On parle aussi d'un luthiste aux États-Unis accompagnant les films muets, et composant pour son instrument.

Quelques compositeurs contemporains français ont écrit pour le luth à 10 cordes : Jacques Chailley, Yvonnes Desportes grand prix de Rome, Jean Loubier à la demande de Michel Faleze, luthiste français et élève de Michael Schäffer. A signaler une pièce du compositeur Hongrois Georg Aranyi-Aschner et une messe en latin avec luth, hautbois solo, quatuor à cordes, orgue et chœurs.

En classant des "vieux papiers", je suis tombée tout-à-l'heure sur le programme d'un concert qu'a donné mon ami Benoît Casteloot à Montpellier. Lui aussi mort bien trop jeune d'un cancer (il y a environ cinq ans), avec lequel j'ai travaillé en entreprise, et virtuose du luth et du théorbe (et ancien grand prix de guitare classique au Conservatoire de Musique de Barcelone).
Il ne pouvait vivre de sa passion, qui trouvait donc sa place à côté du "boulot lucratif de tous les jours".
Le programme de ce concert (1994) était éblouissant, j'en ai un souvenir très très ému   : Flûtes à bec, violes de gambe, et 
Benoît Casteloot au luth et au théorbe :
Marin Marais, Thomas Morley, Charles Mouton, Jacques Paisible, Tobias Hume, Matthew Locke, Monsieur de Sainte-Colombe, Girolamo Frescobaldi...

C'est mon ami qui m'initia à la musique baroque, aux instruments anciens (il m'expliquait tout du fonctionnement du luth).. Il se levait à 4 h du mat pour étudier 4 h avant de partir au boulot... Et on discutait bien plus de tout cela "en catimini" dans son bureau, que de nos statistiques marketing et autres prévisions "business" bien éloignées du luth... (ce qu'il ne faut pas faire pour gagner sa vie..).

C'était le mail "nostalgie", mais je dois absolument cet hommage à Benoît, sur ce fil et sur ce forum. Sans lui, je n'aimerais pas autant le luth, et le théorbe... Merci ....  

J'avais commencé le luth renaissance il y a deux ans, j'ai adoré ! Malheureusement j'ai déménagé et pour retrouver un cours, c'est pas évident. En plus il y a le problème de l'instrument qui n'est pas donné. J'avais commencé sur une guitare classique accordée en luth, c'était sympa quand même mais c'est moins bien.

En fait je n'ai eu que quelques cours pour cause de déménagement.
Il y a moins de cordes sur le luth renaissance que sur le luth baroque, et en fait elles vont par deux (ça s'appelle des "chœurs") qui sont accordées soit à l'unisson soit à une octave d'écart, sauf la chanterelle (corde la plus aiguë) qui est toute seule. Il y a en principe 6 ou 7 chœurs sur le luth renaissance et 13 sur le luth baroque.
Du coup quand on joue sur une guitare classique ça fait un peu comme sur un luth à 6 chœurs, sauf que les cordes sont simples donc évidemment ça change un peu la technique et le son.
Après il existe aussi des guitares-luths qui ont des cordes simples comme la guitare mais ont une forme - et donc une sonorité - de luth. Je pense dans l'avenir m'y mettre toute seule (pour pouvoir prendre tranquillement plein de mauvaises habitudes), et je pense que je prendrai une guitare-luth, déjà c'est moins cher et c'est plus facile au niveau de la technique.

Merci les filles, très intéressant vos messages.
J'adore le luth, j'en écoute beaucoup, c'est donc mon ami grand luthiste Benoit Casteloot, (voir mon message plus haut sur cette page), qui me l'a fait découvrir. Lui était concertiste et jouait du luth baroque.
Je suis ravie que beaucoup d'ensembles de musique baroque utilisent des luths, un des plus beaux exemples en sont les ensembles de Jordi Savall !

Ca, c'est un vrai petit bijou !

Je ne connaissais pas ce concerto, très joli en effet :-)
Comment se fait-il que je me sente toujours "chez moi" en écoutant la musique de Vivaldi
(et la musique baroque en général, mais Vivaldi, plus)

Je me suis posé la question aussi, hier soir, figure-toi ! , mais je crois que non... Ce concerto me rappelle vraiment le luth depuis toujours ! (dont de tendres souvenirs.. ).
J'irai chercher aussi de mon côté. Vivaldi adorait le luth et je pense qu'il l'a fait..
Ah oui , Vivaldi est un "petit miracle" de douceur, de gaieté, d'apaisement.. Tout est beau chez Vivaldi (y compris sa musique sacrée !), quand on est d'humeur un peu morose, c'est très !

C'est bien un concerto pour luth, fréquemment utilisé par Vivaldi (source : Wikipedia, très documenté).
Qu'il y ait eu ensuite des transpositions, certainement, mais alors certainement la flûte à bec n'a-t-elle pas remplacé le luth pour des questions de sonorité propres à l'oeuvre. A la limite la mandoline ou la guitare.., faute de luth..
Ecoutez cela, que je ne connaissais pas, un petit trio pour violon-luth-et basse continue. Ravissant !

Bonjour
Je m'immisce dans la conversation ;-).
J'ai découvert le luth, enfin je m'y suis davantage intéressé, suite au visionnage d'un film "Only Lovers Left Alive".
La BOF est signée Jozef Van Wissem, un artiste néerlandais contemporain qui ne joue que du luth et se produit en solo.

Voici deux titres extraits de la BOF :

Merci beaucoup cher Canaillou, j'ai adoré cette musique-là (même si je doute que le film me plaise... stressant, non ?).
A mon tour de t'envoyer une petite vidéo de mon cher Thomas Dunford, l'hyper-doué actuel du luth et du théorbe dans le domaine baroque... Ce morceau, plutôt rare, s'inspire un peu, par quelques mesures, de "Greensleeves"....

Anouchka a écrit:

Merci beaucoup cher Canaillou, j'ai adoré cette musique-là   (même si je doute que le film me plaise... stressant, non ?).
A mon tour de t'envoyer une petite vidéo de mon cher Thomas Dunford, l'hyper-doué actuel du luth et du théorbe dans le domaine baroque... Ce morceau, plutôt rare, s'inspire un peu, par quelques mesures, de "Greensleeves"....

Bonjour Anouchka
Content que la musique de Josef Van Wissem vous ait plue.
Quant au film, il n'est absolument pas stressant, il est romantique et mélancolique, bien loin des clichés sur les vampires. Et le luth accompagne très bien l'histoire.

Merci pour le partage de la vidéo de Thomas Dunford. C'est remarquable, bien que le baroque ne soit pas trop ma tasse de thé ;-).
Et en effet, quelques mesures rappellent sans conteste Greensleeves. Un clin d'oeil, une libre interprétation ?...

https://www.youtube.com/watch?v=dIsahFwffaU

Merci !
Je n'ai pas eu le temps de tout écouter, mais par nos temps de brutes, un peu de rêve fait du bien, c'est tout...

NB : la vidéo que tu as envoyée, pour moi , est spamée par du Mozart en ce moment , lol.
Je ré-essairai plus tard.

https://www.youtube.com/watch?v=_Q8tfudsylQ